VINGT-SIX — EDENN STERN (suite)
Jeudi, je leur mis l’eau à la bouche en disant qu’il ne me restait plus que quelques point à régler avant de prendre ma décision. Nathan et Maëlle me regardèrent avec impatience, mais je ne dis rien de plus. Nathan était très curieux de connaître Alexandre, il nous avait dit qu’il avait été surpris, mais il n’a pas voulu nous dire pourquoi. Et Maëlle aimait son ami et voulait le rassurer. Mais Paul ne dit rien, il avait apprécié le jeune homme et je ne pensais pas que ça le dérangerait s’il habitait ici, mais il n’était pas particulièrement impatient, juste indifférent, comme avec beaucoup de chose.
Vendredi matin, au petit déjeuner, une fois que tout le monde était occupé à manger et à tenter de garder les yeux ouverts, je me levai. Ils arrêtèrent de manger et me regardèrent anxieux, ils avaient compris que j’avais pris une décision.
– Bien, commençai-je. J’ai fait des calculs pour connaître au centime près le coût d’Alexandre, et j’en ai déduit que l’argent ne devait pas être un facteur de mon choix. Ensuite, j’ai réfléchi à l’impact qu’il pourrait avoir sur notre famille, sur nos traditions, ou nos visions des choses, et c’est ce qui m’a fait le plus douter.
Je faisais monter une dernière fois la tension pour que leur soulagement soit si immense qu’ils en oublient de se demander pourquoi j’ai pris cette décision.
– Il a très certainement des façons de faire différentes des nôtres, une vision du monde plus simpliste et des convictions politiques que nous ne partageons pas. Il pourrait nuire à Nathan en lui inculquant des idéologies absurdes, il pourrait blesser Maëlle en lui avouant qu’elle n’a jamais été son amie. Il pourrait tous nous détruire.
Mes paroles ont fait douter les deux plus jeunes, surtout Maëlle. Elle doit se demander si ce que je dis est vrai, si Alexandre est vraiment quelqu’un de bien. Mais je la rassurai :
– Mais j’ai aussi réfléchi à ce qu’il pourrait apporter de bon dans notre foyer. Ses idées différentes pourraient nous ouvrir l’esprit. Il pourrait nous faire découvrir un autre monde, son monde. Il pourrait être le grand frère que Nathan n’a jamais eu et lui apprendre des trucs de garçons que Maëlle ne pourra jamais connaître. Il pourrait donner de la confiance à Maëlle qui lui permettrait de faire de grandes choses.
Nathan a souri à l’évocation du grand frère. Et Maëlle s’est détendue.
– En additionnant toutes ces choses, les mauvaises comme les bonnes, j’ai choisi de prendre un risque. Un risque qui pourrait nous être fatal, mais qui pourrait aussi nous sauver. J’ai choisi d’ouvrir ma porte à ce garçon dans la difficulté, en espérant qu’il ne nous fera pas de mal.
Le visage de ma fille s’est illuminée. Elle se leva à son tour et me pris dans ses bras. Nathan avait un sourire jusqu’aux oreilles. Et Paul riait. J’avais pris la bonne décision et ma famille était d’accord.