Lettre à ma fille…
Ton petit minois,
Rouge rosé, tendres baisers. Douces sont tes lèvres et généreuse est la pulpe familière de ces petits bouts de moi, et aussi, un peu de toi…
De cette bouche d’amour aux contours précis, s’évapore une chaleureuse nuée chargée, filtre miraculeux de la nature. Un joli coquelicot a besoin de soleil et d’eau pour que de la terre fertile, il puise l’essence l’assurant de grandir et de s’épanouir. D’un souffle d’air, le flux s’ouvre et s’emplit, expirant au dehors ce qui l’a soulagé l’instant juste avant. Similaire à chaque seconde, cette buée pleine d’amour envahit mon cœur burgundy, d’un nuage vermillon, langueur émouvante, halo de mes sentiments.
Un peu plus haut ta fossette, commissure sacrée, recouverte de duvet, douillet endroit velours blond comme les blés, saille ton menton, si mignon. Protubérance arrondie, pleins et déliés déployés, peau de pêche somptueusement sucrée aux arômes fruités, j’embrasse et croque ce point exquis de ta frimousse, ainsi exaucée. Est-ce bien moi qui l’ai créée ?
Douceur inconnue et singulière de la vie, le miraculeux petit ange inspire via deux orifices, trous béants, lieux de tous les échanges, fluides nauséabonds et délicats parfums d’airs se conjuguent ensemble pour éveiller ton âme. Courants d’oxygène, t’indiquant que la vie est composée de toutes sortes de flux : c’est par ici que te sera délivré le secret, que tu pourras distinguer ce qui est bon ou mauvais, flairer par l’instinct le sillon que tu chemineras.
Oh, ma fille ! Ma vie, mon cœur et mon Amour, respire, inspire, expire et prends, saisis toutes les facettes que t’offre ton souffle. Palette mystérieuse dont tu apprendras, au fil du temps passé, les goûts et les fragrances qui te conduiront. Parfois, ton charmant museau dégouline d’un suc, sève de ton organisme, défense immunitaire de ton corps, face à l’adversité. Philtre mythique de tous les êtres humains, ton tarin rebondi est source de vie. Uses-en à bon escient, enivres- toi des odeurs qui subliment ton cœur, saisis les reflets et les effets de chaque parfums pour en délier les effluves. S’exhaler, se dévoiler, se découvrir… Vivre ! Ton museau, mon petit agneau, est l’organe de l’entrée, de l’accès, de l’excès : triomphe à tes subjuguantes cavités, ma beauté !
Regarde, ma fille, vois et observe, de tes iris couleur noisette, aux chaleureux accents de café torréfié, aux notes subtiles de vanille et praliné, le monde qui t’entoure, t’enrobe et te porte. Imite, démarques-toi, défies tes limites : maman sera toujours là. Ovales ronds, sphères envoûtantes, tes globes sont mes planètes et font tourner mon monde. Un blanc sidéral, signe de ta bonne santé, enjôlent tes opales, ainsi pleinement comblées. Des cils enchantés viennent animer tes paupières qui se jouent des émotions. Elles rient, pleurent, plissent, écarquillent… C’est de ta sensibilité que ta vision sera affûtée, affinée. Des petits paillassons, fins et bruns, essuieront les perles de ta sueur, les poussières d’étoiles et autres atomes, moléculaires acrostiches, Objets Virevoltants Non Identifiés. Ce sont des tapis magiques, révélateurs des états de toi : colère, joie, tristesse, peur, bonheur… Volent au-dessus de tes billes, ces carpettes fantaisistes, inspirant à ton front, le caractère de ses tons.
La dentelle du plafond, ton visage en abîme, blanche comme ta peau, couleur des pages, ajustée de rosée, se fronce et se tend pour réveiller tes sentiments. A sa racine, des bulbes farceurs encerclent ta candeur, ton innocence, façonnée par tant de sens… Hâlées sont les tiges qui poussent sur ta tête, reflets d’ébène et de chêne, odeur de miel et de lait, de lilas, de châtaignier, de pomme d’automne et de fleur d’oranger…
Que j’aime parcourir, de mes doigts vagabonds, les courbes de ton crâne, hémisphères d’idées. Fils de soie, ma fille, à moi. De ton cou que j’adule, secret des baisers les plus crédules, de ma spontanéité qui m’indique de t’adorer, tu tournes la tête, petite alouette, et de droite à gauche, balance toute ton innocence. Passage de l’esprit à ton tronc rondelet, il tient en son sein les plus belles des pensées…
Nombril du monde, veinules apparentes sous ton derme translucide, sillages bleutés, liens indéfectibles dans lequel circule l’Amour sous sa forme liquide, opaque, ma prune, ma plume. Il bat, ton cœur sous ce torse, expression morse, d’une chamade régulière, tambour de ma vie, harmonie précieuse des jours les plus heureux. Tout au long de tes bras, potelets il va de soi, un léger eczéma scintille sur ta douceur. Maman te soigne et passe dessus, un baume réparateur et nourrissant : te soulager, te réconforter, te consoler, te dorloter, te bercer, te câliner. Oh ma fille, je t’aime tant.
De fée, tes doigts transportent tes jouets, tatillonnent les livres, visitent les trains et les poupées, effleurent ma joue, mon tendre amour. Les paumes traversées par des rubans dorées, lignes de ta vie, de ton cœur, de ta destinée, s’entremêlent et s’enlacent, soulignant ton honneur de plissures et de traces. Gravé ici, ton futur s’inscrit, dans la pluralité de tes mains associées. Auriculaire chimère, du bout des ongles, la rêverie cavalière, songes éphémères, pointent les astres de tes fastes lumières.
Membres inférieurs, enrobés de gelée, c’est dodues et charnues que sont dressées deux grues. Montée sur pilotis, en haut tes frisottis, en bas tes orteils, bonbon, caramel, chocolat, chewing-gum… petites douceurs de toutes mes heures, anti-douleur, enivrant catalyseur de mes réflexions les plus intimes. Inspiration suprême des mélodies de mon affection, c’est à toi que je dédie toute mon affectation.
Ma fille, ma chérie, ma petite amourette, je t’aime et te le dis : merci d’avoir mis, des couleurs dans ma vie.