Je voulus consulter une troisième et dernière fois. Je contactais l’association française d’arachnophilie en leur demandant si parmi leurs membres se trouverait une personnalité connue du monde de la musique. Un tableau à double entrée en quelque sorte. Effectivement une harpiste foldingue était membre. Je l’invitais aussitôt à passer boire un thé à la maison : elle était non seulement arachnophile mais également anglophile. Sa passion pour Manini fût immédiate. Pas un jour ne passait sans la voir débouler pour écouter l’artiste. Un jour même, elle débarquât avec sa harpe. Elles jouèrent de concert et c’était très réussi mais bientôt elle voulut faire de Manini une harpiste. Une harpie pour une araignée je veux bien mais pas une harpiste : le caractère aérien de l’instrument s’accordait mal avec l’aspect trapu et velu de l’exécutante. Et puis de toute façon, Manini ne voulut pas en entendre parler : pianiste elle était, pianiste elle resterait. Profondément vexée, notre harpiste déclara que de toute façon les araignées ne comprendraient jamais rien à la musique. Avant que les choses ne s’enveniment, je la mettais dehors prestement. Elle ne revint jamais. Elle donna quelques concerts, déguisée en araignée, sans s’expliquer sur les raisons de son accoutrement, puis les journaux cessèrent de parler d’elle et je perdis sa trace.
J’étais bien avancé.
L’ARAIGNEE QUI VOULAIT DEVENIR PIANISTE – chapitre 13
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