Q : « Comment trouver son style ? »
E.E.S. : « On ne doit pas avoir son style, un style. Encore moins le bon style. On doit avoir plusieurs styles. Le style adapté à son roman. Ecrire comme parlerait un enfant de 10 ans, comme penserait Einstein…
‘Monsieur de Nemours était le plus bel homme de la cour.’ (La Princesse de Clèves) Il s’agit là d’un style. Cela ne dit rien, aucune description sur Mr de Nemours. Moi j’aime bien, car on peut laisser sa place à l’imagination. Mais on peut aussi dans un autre style, donner quelques détails… »
Q : « Quelles sont les erreurs à ne pas commettre ? »
E.E.S. : « L’excès de richesses, d’adjectifs, de descriptions. Plutôt que multiplier les descriptions ,citer le(s) trait(s) saillants. L’économie du trait. Souvent on veut faire bien et quand on veut faire bien souvent on en fait trop. Si vous faîtes la description d’un visage, d’un caractère ou d’un lieu, voyez ce qui est vraiment signifiant. Ce qui est saillant, pénétrant et touche l’esprit Et ce qui ne parle pas ou est redondant ou a juste un côté plat, facile, mou, sans interêt. Sachez que c’est normal quand on cherche d’en faire trop. Une fois qu’on a posé tout ce qu’on a trouvé, il faut trouver ce qui est à garder ou pas.
On peut aussi brosser son chapitre comme un peintre, indiquer les grandes idées sur le papier et puis après, il faut se mettre à écrire. Et après le premier jet, il faut regarder si on n’a pas trop écrit.
Il faut se relire. 80 % d’écriture et 20% de relecture, re-travail. Mais ces 20 % sont énormes. Ils font tout. »
(« D’autres auteurs citent d’autres proportions, ou font autrement. »)
Q : « Pouvez vous nous parler des rythmes binaire ou ternaire que vous avez évoqués
tout à l’heure ? »
E.E.S. : « Et bien soit on est binaire, soit on est ternaire on a tous en nous une musique naturelle,
un rythme de prédilection.
Mais il faut savoir faire les deux. Passer de l’un à l’autre.
Le rythme binaire :
Exemple la citation latine « Dura lex sed lex » (2 x 2)
Elle signifie « la loi est dure mais c’est la loi »
« Dura lex sed lex » possède un caractère de formule, d’aphorisme, ça met en branle la pensée, ça fait réfléchir.
Le rythme ternaire :
« Vini Vidi Vici » une phrase de Jules César (3 éléments)
« Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu.»
Le ternaire est plus dynamique que le binaire. Moins réflexif.
« Il s’assit. Le silence pesait. » immédiatement le 3ème élément créé une dynamique. On a envie de savoir ce qui va se passer.
Fin du live:
« Ne vous découragez jamais. Ne vous haïssez pas.
Il y a chez vous celui qui écrit et celui qui juge. Souvent quand on se relit on n’aime pas. Si vous écrivez c’est que vous avez une spontanéité. Ne détruisez jamais cette spontanéité.
Il faut toujours travailler, acquérir de nouveaux outils. »
« On doit le premier vers au génie, le deuxième au travail. » a écrit Paul Valery
« Moi j’ai décidé d’aimer toutes les tâches de l’écriture :
le moment où je suis inspiré,
où je me juge,
où je retravaille,
ou je cherche,
me relis.
Ne vous découragez jamais. »
Notes par Marco O’ Chapeau