Chapitre Un

4 mins

 Ils étaient assit là, chacun dans un coin de cette pièce, les genoux repliés contre leur poitrine et les bras entourant ces derniers. Aucun d’eux n’osait prendre la parole, aucun d’eux n’osait se regarder ou effectuer le moindre mouvement. Ils restaient là, le regard rivé au sol et le corps tout tremblant.

 La pièce n’était pas bien grande et du peu que l’on pouvait en voir, elle n’était pas en bon état. Le papier peint sur le mur semblait pendre sur au moins deux d’entre eux, et de la moisissure s’accumulait sur certains endroits, au moins autant que les traces de passage des quelques rongeurs qui semblaient également avoir élu domicile en ces lieux.

 Une forte odeur présente dans toute la maison aurait pu empêcher n’importe qui d’y respirer convenablement. Des courants d’air venant de toutes parts finissaient de rendre l’endroit horriblement peu accueillant.

 Pourtant, vu de l’extérieur, la petite maison était impeccable et son jardin, parfaitement entretenu, avait de quoi en rendre certains jaloux. Impossible de comprendre alors l’état plus que mauvais de cette pièce en particulier.

 Les deux prostrés semblaient si petits et si fragiles. Leurs visages encore innocents se ressemblaient comme deux gouttes d’eau, tout était similaire jusqu’aux taches de rousseurs disposées exactement de la même manière sous leurs yeux et sur leur nez. Il était impossible de trouver des jumeaux se ressemblant encore plus que ces deux-ci.

 En pénétrant sur cette propriété, il ne s’était pas préparé à découvrir une scène qui risquerait de le traumatiser à vie. Il y était allé après qu’on ai signalé la présence de deux jeunes enfants sur un lieu d’accident. Qui l’avait signalé ? Il n’en avait aucune idée, mais n’avait cherché en aucun cas à le savoir. La priorité pour lui ? Éloigner le plus rapidement ces pauvres enfants de ce lieu afin de les mettre en sécurité.

 Il était accompagné d’un collègue à lui et ensembles, ils passèrent le petit portillon noir pour accéder au jardin avant.

 Tout était absolument calme à première vue, rien ne laissait présager qu’un accident venait d’avoir lieu ici-même.

 « Nous avons reçu l’appel il y a exactement vingt-trois minutes. Nous n’avons aucune certitude que ces enfants soient encore ici. »

 « Ils sont ici. En nous voyant arriver, les voisins seraient venus nous trouver si jamais ils n’étaient plus dans cette maison. »

 Le deuxième homme haussait les épaules avant de se diriger en premier vers la porte de la maison.

 « Nous allons le découvrir bien assez vite. »

 La porte d’entrée s’ouvrit suite à une faible poussée seulement et les deux hommes n’en furent pas rassurés, ils s’échangèrent un regard qui en disait long avant d’oser entrer.

 Ils furent immédiatement frappés par l’odeur insupportable que renfermaient ces murs et après de violents hauts-le-cœur pour les deux, ils entreprirent de se couvrir la bouche et le nez avant de partir de nouveau à la recherche de ces deux enfants.

 Plus ils avançaient dans cette maison et plus ils découvraient l’état déplorable de cette dernière. Ils purent même croiser rongeurs et toutes sortes d’insectes s’y balader comme si ces lieux leur appartenait.

 « Tu es sûr que quelqu’un vit ici ? »

 « C’est l’adresse que nous avons obtenu.»

 « Cette maison semble avoir été abandonné depuis des années déjà. »

 « C’est impossible. Regardes l’état du jardin. Il est parfaitement entretenu, qui prendrait soin du jardin d’une maison abandonnée ? »

 « Et qui prendrait soin d’un jardin mais pas d’une maison ? »

 La question demeurait sans réponse.

 « Faisons le tour avant d’en tirer des conclusions. »

 Ils se remirent à explorer les lieux plus sérieusement. Et ce n’est que lorsqu’ils arrivèrent dans la cuisine et qu’ils virent un plat encore fumant posé au milieu d’une table, qu’ils acceptèrent véritablement de croire que des gens vivaient ici.

 À en juger par les couverts, ils devaient être cinq et s’apprêtaient visiblement à passer à table.

 « Qu’est-ce qui a bien pu se passer pour qu’on nous appelle alors que cette famille semblait être sur le point de dîner ? »

 « J’aimerais bien le savoir.»

 Une photo trônant fièrement sur un plan de travail lui aussi en mauvais état, attirait le regard d’un des hommes. Elle représentait une famille toute souriante, avec un père plutôt grand et fin, une mère plus petite mais fine également, un premier enfant qui semblait être sur le point de dépasser sa mère de taille et, enfin, deux autres enfants, plus petits, se ressemblant trait pour trait. Tous, avaient réellement heureux sur cette photo, rien n’avait l’air forcé ou pour de faux. Ils portaient tous de magnifique vêtements, neufs et semblant coûter une fortune, de quoi se demander si la famille présente sur la photo et celle vivant dans cette maison étaient bien les mêmes.

 « Eh ! Faut que tu viennes voir ça. »

 Il voulu se tourner vers son collègue, mais il constatait que ce dernier ne se trouvait plus dans la même pièce que lui.

 « Où est-ce que tu es ? »

 « Ici, viens vite ! »

 Il s’orientait grâce à la voix de l’autre homme jusqu’à arriver dans une autre pièce, plus petite, plus délabrée, plus humide et presque vide.

 « Qu’est-ce que tu voulais que je… »

 « Là… Regardes… »

 Son collègue avait chuchoté en pointant le doigt dans une direction, il l’avait donc suivi du regard jusqu’à ce que ce dernier entre en contact avec une première silhouette, puis rapidement, une deuxième.

 L’homme ne perdit pas de temps avant de se diriger dans un premier temps vers la silhouette appartenant à une petite fille.

 « Occupes-toi du deuxième. »

 Il arrivait rapidement à la hauteur de la petite qui n’avait même pas relevé les yeux, tout comme son frère. Tout en posant une main délicate sur son petit bras frêle, il s’accroupit avant de s’adresser à elle.

 « Hey… est-ce que tu vas bien ? Tu es blessée ? »

 Comme il s’y attendait, elle ne répondit pas et sans la brusquer, dans la plus grande délicatesse, il attrapait ses deux poignets.

 « Je vais juste t’examiner un peu… Je ne te ferai pas de mal. »

 Malgré son absence de communication, elle se laissait faire. Il était déjà tombé sur des enfants bien plus difficiles qui refusaient tout contact physique et qui se mettaient à hurler, se débattre ou bien-même à mordre lorsqu’il devait les examiner.

 Il éloignait ses bras de son corps et l’obligeait à se redresser un peu juste avant que son regard n’entre en contact avec une vision désagréable et qui faisait froid dans le dos.

 « Il faut qu’on les emmène à l’hôpital ! »

 Ils avaient parlé en même temps, sur le même ton.

 Les deux enfants avaient leurs vêtements couverts de sang au niveau du ventre et la couleur pâle de leur visage prouvait que ce dernier était bien le leur.

 Qu’avait-il bien pu leur arriver pour qu’ils se retrouvent dans cet état ? Était-ce un acte criminel? Ou bien étaient-ils la victime de tout autre chose ? Et où pouvaient bien se trouver les trois autres membres de cette famille ?

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