2ème Partie – CHAP.12/02 : Nouvelle saison

6 mins

…….. 

       Après avoir prévenu les autres, et sans protestation de Syvanna, nous nous étions mis en marche. Arrivé Place du Marché au Blé, nous arpentions les allées du campement qui se structuraient de mieux en mieux au fil des semaines. Un réseau de voies piétonnes s’organisait en toile d’araignée avec pour épicentre le pole des services publiques (sécurité, secours, municipale). Soudain, je fus alerté par une certaine effervescence autour de la tente des communications. J’indiquai du doigt à Syvanna la direction à prendre. Nous nous retrouvâmes bloqué par un mur de dos encerclant le stand. Je tendis l’oreille et essayais de décortiquer les différents sons. Des crachouillis et des bribes de conversations amplifiées par une enceinte connectée à la radio me parvinrent. Je me tournai euphorique vers mon amie.

— Quelqu’un communique avec nous par radio !

— Super, glapit Vanessa indifférente.

— Mais tu ne te rends pas compte ? C’est le premier lien avec l’extérieur de la ville depuis la cata.

— C’est peut-être un mec dans un quartier voisin qui a retrouvé un talkie-walkie en état de marche.

— Pff, toujours aussi défaitiste…

— Ça me tuera !

— T’as qu’à rester là, faut je rentre dans le tas pour écouter ce qu’il se dit.

— Fais-toi plaisir.

Je baissai la tête jusqu’aux hanches des individus qui me faisaient barrage, je rentrai les épaules et me faufilai jusqu’au premier rideau. Je m’extrayais de la mêlée comme un bouchon de champagne. Quatre conseillés et le chef de la sécurité s’agglutinaient autours de l’opérateur radio manipulant constamment la molette de l’appareil pour régler au mieux la réception.

— … aque quartier s… organisé en camps… la plus p… des parkings souterrains et … centres commerciaux en sous-sol ont été reconditionnés en esp… dortoirs… crachait l’enceinte du transistor.

— Paris ! il parle de Paris, demandai-je surexcité à mes voisins.

— Ouais mec ! ferme là qu’on entende ce qu’il se dit !

J’acquiesçais et fermais tout de suite mon bec.

Le conseillé avocat colla sa joue à celle de l’opérateur pour parler à son micro-casque.

— Quels sont les dégâts chez vous ? La zone d’impact doit ressembler à un cratère lunaire.

— Cruishhh… cruiiiii…

— Allo, vous m’avez entendu ?

— Oui, bien reçu… Je ne sais pas quoi répondre… La zone 0 ne ressemble pas du tout à … ‘on pouvait s’imaginer…

— Comment ça ?

— Pas de cratère, pas de trous, aucun renfoncement, aucu… déformation… la zone est complètement plane… nettoyée de tout, bâtiments, véhicules, mobilier urbain.

— Qu’est-ce que ça veut dire ?

— La zone d’impact qui a pour centre la place de la concorde, sur un rayon de cinq cent mètres ressemble au lac salé américain de Bonneville, si vous voulez…

— Un lac salé ?

— Comme si vous aviez soufflé sur une plaque de verre recouverte de farine…

Abasourdi, le conseillé se tut et se releva. L’opérateur reprit l’entretient.

— Quelle arme à bien pu provoquer ce type de dommage.

— Aucune connue de nos servisssss… ‘ous n’en avons aucune idée. Sssssss… qui est sûr, c’est que ce n’est pas une bombe nucléaire, ou sale. La radioactivité serait même plus basse que la moyenne à cet endroit.

Suite à cette information, un brouhaha monta dans l’assemblée.

« Les chinois ont réussi à nous créer une bombe propre ! », « Trop fort ces chinetocs ! », « moi je dis, c’est un coup des russes… », « pas assez avancés, c’est les américains, c’est les plus forts en armes technologiques ! », « et si c’était une expérience française qui avait mal tournée ? », « T’es con ou quoi, une expérience placée à l’endroit de la Concorde ? », « Ils ont peut-être un labo secret dans les égouts », « Je confirme, tu es complètement con ! »…

Je levai la main comme à l’école.

— Et lors de la cata, on-t-il vu quelque chose traverser le ciel ?

Le chef de la sécurité me repéra du regard et indiqua à l’opérateur de répéter ma question au micro.

— Nous non, mais des témoignages nous rapporte une sorte d’éclair parffff… aitement rectiligne.

— Comme un rayon laser, hurlai-je.

L’opérateur s’apprêta à répéter, mais l’interlocuteur m’avait entendu.

— Non… Plutôt un flash laissant des traces de ligne droite de lumière pendant quelques secondes.

Je m’avançais de quelques mètres pour ne pas avoir à crier.

— Ces témoins ont-ils vu un engin volant lanceur.

— Non, monsieur !

Monsieur ? Ce type à l’autre bout du fil me prenait vraiment au sérieux. Je n’avais pas l’habitude de ça. Un peu vexé par mes questions pertinentes, pensais-je, l’avocat reprit la main sur la conversation.

— Quelle est la situation politique chez vous ?

— C’est le chaos et l’anarchie qui prédominent pour le moment… En majorité, des groupes d’influences et de milices d’extrême droite se sont formés apparemment gravitant autour d’une entité unique. L’identité de cette personne, sorte de gourou nous est inconnu. Des gens parlent du président du Groupe Identitaire qui aurait surv…..cu…

— Toujours les meilleurs qui survivent, marmonnai-je.

— Quel est l’état de notre gouvernement, soldat ?

C’était l’information que j’attendais depuis quelques minutes. C’était un membre de notre armée.

— Le président était en déplacement en Arabie Saoudite. Nous n’avons aucune nouvelle. Une mission de sauvetage a récupéré les cadavres des ministres de la défense, de la santé, de l’économie, des affaires étrangères, de l’écologie. Elle a retrouvé le premier ministre en état végétatif. Sans respirateur ni machine, il a succombé deux jours plus tard. Elle est parv…. nue à récupérer la ministre de l’intérieur Mme Kapumba sous les gravats de son ministère. Elle est paralysée des membres inférieurs. Nous l’avons recueilli dans notre QG.

— Ou se trouve-t-il ? Coupai-je.

— Désolé, sécurité nationale, nous ne pouvons pas vous fournir cette information.

— Mais des personnes motivées et impliquées venant de l’extérieur peuvent vous apporter leur aide.

— Je vous remercie monsieur pour votre enthousiasme, mais il est encore trop tôt.

— Peut-on se rendre à Paris ?

— Comme vous voulez, mais la situation ici n’est pas forcément plus attractive que chez vous.

— Avez-vous des véhicules militaires et de secours en état de marche ?

L’avocat me fit signe de la main de me taire.

— Laissez les adultes responsables discutés, jeune homme !

Le responsable de la sécurité lança un regard perplexe à l’avocat.

L’enceinte cracha à nouveau.

— Messieurs… nous sommes au regret de rompre la communication. Le temps qui vous était imparti pour aujourd’hui est révolu. Nous avons d’autres centrales à appeler. Nous reprendrons contact dans deux jours à la même heure.

— Mais du coup, vous avez de l’électricité, lançai-je désespérément.

Le signal radio s’interrompit. L’avocat pesta à mon égard. Le responsable à la sécurité me gratifia d’un sourire de remerciement. Je restai planté devant le stand des communications tandis que la foule se dispersait. Le garant de l’ordre m’appela d’un signe du doigt. Je ne me fis pas prier pour approcher. Il me tendit la main.

— Jacques Fellow.

J’accepta sa poignée de mains.

— Micaël tout court.

— Enchanté Micaël Toucour.

C’était de la moquerie ou pas ? Je me demandai s’il pensait que mon nom était Toucour. Je ne relevai pas sa boutade.

— J’ai beaucoup apprécier ton intervention énergique et tes questions ciselées. Tu sembles être bien structuré dans ta tête et motivé à rebâtir notre communauté citoyenne.

— Merci M. Fellow.

— Je t’en prie, appelle moi Jacques. Nous avons besoin d’éléments motivés comme toi dans notre service.

Je m’aperçus que Vanessa m’avait rejoint derrière mon épaule, mais je ne savais pas depuis combien de temps.

— Euh… Je ne sais pas si je suis capable de…

— Ecoute, je ne te demande pas de t’engager tout de suite. Prends le temps de réfléchir et donne-moi une réponse quand tu te sentiras prêt.

— D’accord ! Je repasserais mercredi prochain. Bonne journée Jacques.

Je fis volte-face vers Vanessa.

— Alors on s’engage chez la flicaille, me piqua-t-elle.

— Mais non. Et puis les flics, ça n’existe plus ici. Ce serait pour l’apport de mon aide à la communauté survivante.

— Bien sûr…

— De toute façon la question ne se pose pas. Avec ses nouvelles inédites provenant de Paris, je compte bien lancer mon opération ; exploration de la capitale.

— Merde Mic, t’as pas lâché ta marotte.

— Et non ! et je suis plus motivé que jamais. Ce militaire à la radio m’a regonflé à bloc.

— D’accord.

Vanessa baissa la tête et marqua un moment de silence, puis me fixa vivement.

— Je t’en supplie, amène-moi avec toi !

— Que ?…

— J’ai besoin d’espace, de rompre la monotonie du campement, de voir ce qu’il se passe ailleurs.

— OK, mais on va rentrer au club, se poser, raconter ce qu’il vient de se passer aux autres, et après on prendra une décision réfléchie et construite.

J’étais tellement emballé par cette communication et pressé de tout déballer à mes amis que je ne continuai pas le parcours habituel dans le camp. Nous rentrâmes au plus vite.

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ccccccccccccc bbbbbbb
2 années il y a

Un flash? Ce qui est passionnant, entre autres, c’est de ne pas savoir le qui a provoqué le chaos.
Hâte de visiter Paris dans ces conditions.

O. DeJavel
2 années il y a

1/2 La deuxième saison se lève sur le mystère de la catastrophe. Le mystère est toujours une bonne chose, et c’est en soit un bon début. Le mystère devra être révélé par petits morceaux, un chapitre à la fois.

À éviter ABSOLUMENT: Ne rien trouver pendant quarante chapitres et souffler une grosse surprise à la fin.

Le PRINCIPE : Le lecteur n’aime pas être le dernier à comprendre.

Voici deux trucs :

1-L’ironie dramatique
Il s’agit de créer des situations où le lecteur pige AVANT le protagoniste, afin que notre cher lecteur se ronge les ongles d’angoisse.

Le lecteur aime se sentir plus intelligent que les protagonistes.

Exemple : Le gros méchant se tient derrière le rideau, le poignard levé…
Exemple : Syvanna tente de rejoindre Mic par radio pour lui dire de ne pas aller dans la grande salle parce que les Aliens ont installés un piège mortel. Mic n’entend que des parcelles de voix et il comprend l’inverse et alors tu termines le chapitres sur la séquence où il s’élance dans le piège.. Le lecteur met des miettes de biscuits secs partout sur lui et il s’en fout, parce qu’il ne veut qu’une chose, tourner la page. L’ironie dramatique peut/doit durer sur plusieurs chapitres, il faut devenir un virtuose de cet instrument magnifique.
2 – La tension dramatique
Le protagoniste VEUT quelque chose (on appelle cet objet, le McGuffin, voir Wikipedia) et le récit est structuré pour que l’on doute continuellement de ses chances de l’obtenir. Dans le Constellation, le McGuffin de Gerflynt est sa mère, cette femme élusive)
Règle essentielle : Le McGuffin doit être l’objet d’un désir TRÈS personnel. Cet objet, DOIT ÊTRE tangible (comme dans toucher, 3D, scratch & sniff). Ça ne peut pas être à propos de se sentir bien ou de satisfaire une petite curiosité. Tout le monde veut un trésor, mais Uldège veut un trésor pour payer le traitement expérimental qui sauvera la vie de sa fille. Tu vois ? C’est personnel.

O. DeJavel
2 années il y a

2/2 : Alors la question est :

Que veut Mic ? Qu’y a-t-il à Paris qui soit si important pour lui ? Qu’est-ce qui le retient d’y aller ? Syvanna ? En quoi est-il déchiré ? Protéger son amour versus obtenir son McGuffin, voilà une tension intérieur, une cocotte pression gonflée à bloc. Une tension intérieure, un frein qui se ronge…

Mais alors, comment mettre le récit en mouvement si tout est habilement figé par l’auteur, ce sadique créateur de conflits intérieurs croustillants ?

La réponse est : Il faut un événement déclencheur. Quelque chose qui rompe l’équilibre. Quelque chose qui interpelle Mic, qui le fasse réagir, le fasse sortir de sa zone de confort. Ça doit être dérangeant, ca doit l’interpeller dans sa raison de vivre. Voilà comment on en vient à aimer le protagoniste et à vouloir l’accompagner dans sa quête.

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