Le Prince Arabe (Extrait du chapitre 3 – La haine qu’elle lui donne)

4 mins

2381, Riyad en Arabie Saoudite (37 ans plus tôt).

Le Roi Abdoullah était soucieux et il n’arrivait pas à se concentrer sur les différents points à traiter avec son homme de main. Il avait déjà reporté la veille et l’avant-veille certains sujets devenus urgents. Il devait se ressaisir car après tout rien n’était sûr.

— Votre Majesté, je vois bien que quelque chose vous inquiète depuis quelques jours déclara son bras droit. Je vous demande encore une fois de me laisser vous aider. Je suis sûr que nous pourrons trouver une solution…

— C’est le bébé. L’interrompit-il.

— Il y a un problème avec la Reine Amira. Je vais dépêcher de ce pas les meilleurs gynécologues…

— Ce ne sera pas la peine. Ils vont bien. Le ton sur lequel le Roi avait prononcé ces derniers mots était bouleversant. On aurait dit que la maladie et la mort étaient un bien meilleur sort que ce qui les attendait.

La Reine Amira était la quatrième épouse du Roi Abdoullah. C’était une jeune fille pleine de vie et avec un sourire communicatif ce qui faisait d’elle la Reine préférée de ses sujets mais aussi celle du Roi qui en était éperdument amoureux. Dès qu’il la vit le soir de leurs noces, il sut qu’elle causerait sa perte disait-il mais aussi son plus grand bonheur. Sa beauté sauvage correspondait parfaitement à son caractère, un caractère qu’on ne pouvait apprivoiser que par les mots d’amour et les caresses. La Reine avait connu une vie de privilège dès la naissance étant la fille d’un riche héritier du royaume d’Arabie mais une chose pourtant lui manquait terriblement. Un enfant. Le Roi Abdoullah rencontrait des difficultés à concevoir des enfants malgré ces quatre mariages et les années qui passaient n’étaient pas pour l’aider. Il avait eu deux filles de ses deux premiers mariages et il lui manquait un héritier direct pour sa succession. La Reine Amira avait une foi inébranlable et elle espérait encore et toujours un enfant. Ainsi elle suivait avec le plus grand sérieux les différents protocoles de procréation assistée qu’on lui proposait. Et le miracle tant attendu arriva. La princesse était enceinte de l’héritier du trône d’Arabie. Sa joie était sans pareille. Le couple royal rayonnait de bonheur et déjà tout le royaume se préparait à célébrer l’enfant du miracle comme on l’appelait. Mais voilà arrivé au septième mois, Amira commença à faire des rêves d’abord abstraits et qui par la suite devenait de plus en plus précis. Il s’agissait toujours du même rêve : son fils était né en bonne santé, il était magnifique avec ses grands yeux noirs et son teint doré. Elle le regardait avec émerveillement lorsqu’une chose attira son attention, il avait une minuscule tâche de naissance au niveau du poignet. Cette tâche n’en était pas une en fait, il s’agissait d’un dessin, une carte. Celle de la Pologne.

Au château, personne ne reconnaissait la Reine. La joie de vivre avait laissé place à une tristesse infinie et profonde. Personne ne comprenait car tous savaient qu’Amira avait toujours voulu un enfant et qu’il s’agissait là d’un véritable miracle pour les époux. Alors que la venue du futur héritier se faisait proche, le désespoir s’était emparé de la princesse à un point de non-retour. Le Roi fut appelé d’urgence au chevet de sa femme qui à bout de force lui avoua son rêve. Dans les yeux du Roi, Amira avait espéré trouver du réconfort, du soulagement mais ce qu’elle y vu était bien loin de ça et même pire que tout : l’abdication d’un Roi face au destin. Dès lors, elle comprit qu’elle était la seule à pouvoir le sauver.

2388, Arsew en Algérie (7 ans plus tard).

La Reine Téodora en était persuadée. Les habitants avaient beau dire qu’il n’avait jamais vu l’enfant reconnaissable par son tatouage au poignet, elle avait senti sa présence. Ces dernières années, elle l’avait cherché à travers le globe sans succès. Mais là c’était différent, le lien qui les unissait n’avait jamais été aussi fort. Elle touchait au but. Et après ça ils retourneraient à Gdynia rejoindre les autres élus et la princesse Brielle. Il était temps !

Ismaël était agité et il devenait fiévreux. Les signes ne trompaient pas : la Reine était là. Il fallait partir tout de suite. Amira était fatiguée de ces 7 ans de traque. Elle avait renoncé à sa vie d’autre fois pour garder son fils auprès d’elle. Et même à lui. Elle l’aimait toujours malgré les épreuves, malgré sa trahison. Ces dernières années, ils avaient vécu dans 7 pays différents et à chaque fois elle avait dû s’armer de courage et de patience pour éviter de sombrer. Dans son malheur, elle avait eu la chance de faire de belles rencontres. Il y avait encore des gens bons capables d’aider leur prochain. Il faut dire aussi que la Reine Téodora n’était pas appréciée par le peuple c’est le moins que l’on puisse dire. Elle avait tristement marqué l’histoire par sa cruauté et son mépris des autres. Elle avait échoué à réunir tous les élus auprès de sa fille et cela l’avait rendue inqualifiable. N’avait-elle pas compris le projet de Dieu sur Terre songea tristement Amira. Et pourquoi Dieu avait laissé le libre arbitre à ces reines ? Elle était dominatrice et avait fait démonstration de sa force à plusieurs reprises notamment face à la désobéissance de ceux qui l’ont aidé. Des larmes roulaient sur ces joues en repensant à tous ces sacrifiés. La culpabilité la rongeait chaque jour un peu plus. Et Ismaël dans tout ça ? Il avait vécu tant d’horreurs si jeune. Pourra-t-il lui pardonner un jour ? Quoiqu’il en soit, il fallait fuir coûte que coûte ? Tous ces sacrifices n’auraient pas été vains. Elle se l’était promis. Son fils était toute sa vie et elle ne laisserait personne le lui prendre. Même pas une Reine avec des pouvoirs.

Ils se dirigeaient vers le port pour espérer prendre le premier ferry prêt à partir mais à leur arrivée un sentiment étrange envahit la Reine Amira. Tout semblait calme, trop calme. À ce moment-là elle comprit qu’elle avait vidé le port de ses occupants et qu’elle les attendait. Aussitôt elle prit la main d’Ismaël mais il était déjà trop tard elle était comme paralysée. Elle regarda son fils une dernière fois avant d’être projetée par-dessus la falaise où elle se trouvait.

Ismaël hurlait de toutes ses forces sa mère et dans un geste désespéré il courut droit vers le fossé où elle avait été projetée. Sa descente fut arrêtée nette et il resta suspendu quelques secondes avec l’image du corps sans vie de sa mère en contrebas avant de retrouver la terre ferme.

Ce jour-là, le jeune prince avait perdu une mère aimante pour une autre qui le méprisait.

— La prophétie a un coût. Celui de la mort. Avait dit sa nouvelle Reine.

Il ne l’oubliera jamais. 

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jilla
jilla
1 année il y a

bravo !

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