LES ORIGINES DU POUVOIR RELIGIEUX – IV- JUGEMENT PARTIAL (4)

SOMMAIRE :

PROLOGUE ( SVP pas encore)

I– CHARITÉ FUNÈBRE

II– LA MORT RÔDE TOUJOURS

III– SUSPECTIONS COLLECTIVES

IV- JUGEMENT PARTIAL

            Durant sa longue audience, Amita s’efforça de répondre à toutes les questions que lui posait l’assemblée citadine.

– Qu’est-il réellement arrivé à votre mère Dadama ? Demande le premier notable avec autorité.

– Elle est tombée gravement malade étant déjà à terme et en est morte. Répondit Amita sans battre les sourcils de ses yeux qui faisaient face courageusement aux regards accablés de cette assemblée strictement masculine.

– Qui a tué tes sœurs Pelana, Pinis et Pifanda ? Questionne le deuxième notable.

– Chacune à son tour était très malade et n’a pas résisté à la mort. Se défend t-elle.

– Ta sœur Pifanda se sentait elle malade avant de mourir ? Dit le troisième notable.

– La veille de sa mort, Pifanda paraissait forte, à part un petit mal de ventre dont elle s’était plainte après le repas du soir. Mais vraiment rien de sérieux croyez-moi.

– Si cela n’était pas sérieux, pourquoi est-elle alors morte ? Interroge une voix irritée parmi l’audience.

La jeune fille resta muette comme une tombe toujours éprouvée par la mort de sa sœurette. Cela se lisait facilement sur son visage comme le reflet du miroir.

– Cette fois-ci, vous allez vous débrouiller seule pour l’enterrer ! Tranche le quatrième notable.

Et tous acquiescèrent à cette résolution.
Puis Amita fit quelques pas lents pour se rapprocher davantage des hommes du pouvoir de Ndiki-Nen, tous assis face à elle. 

– Et vous Chef Yingui ? Qu’avez-vous à dire de toutes ces accusations injustes ? Déclare t-elle à l’encontre du Chef du Village.

– Jeune demoiselle, de quel droit oses-tu t’adresser à notre Chef Yingui comme s’il était ton égal? Fustige le premier notable.

– Tu veux mourir ? Menace le sixième.

Puis elle commença à essuyer d’horribles injures.

– Vous êtes de mauvaises personnes ! Hurle quiconque parmi le public.

– Menteurs ! Dis un autre.

– Criminels ! Renchérit autrui.

– Sorciers ! Crie de nouveau quelqu’un.

– SILENCE ! Coupe le Chef Yingui. Celui qui lève encore la voix, sortira sur le champ de Po-Le.

Le grand auditoire se tue comme des élèves terrorisés par le maître qui demande qui veut aller au tableau.
Et il reprit :

– Amita mon enfant, ton père a trop abusé de notre pitié…

– Vous êtes des démons ! Commence à proférer en chœur les autres membres de la réunion.

– Démons ! Rejoignent-les notables.

– Démons ! Démons ! Démons ! Démons ! Démons ! …

Ce mot fut prononcé autant de fois qu’ils puissent le dire, accompagné de projectiles, du sable, des cailloux, des babouches, des sandalettes, des vêtements même pour certains passionnés de la pétaudière, de morceaux de bois ramassés au sol provenant de l’arbre à palabres, et même des crachats. La malheureuse s’enfuit sans se retourner jusqu’à chez elle le visage couvert de chaudes larmes qui lui rendait la vision brumeuse. Elle trouva son père et sa sœur Melal en train de nettoyer le cadavre de Pifanda, à l’aide de plantes brassées dans un seau en bois remplit d’eau, pour mieux conserver le corps pendant des jours. Elle raconta à son père tout ce qui s’était passé. Ce dernier fou de rage, partit illico à Po-Le.

Arrivé, Babagnack se mit à reprocher à tout le monde sans discernement leur acharnement injuste sur sa fille aînée Amita.

– Si vous cherchez le chien à noyer, me voici, laissez mon enfant en dehors de cela…

Sans lui laisser le temps de continuer, les notables lui informèrent que personne ne mettra pied à son nouveau deuil. Et qu’il ne devait espérer aucune aumône. Puis les injures et menaces du groupement entier reprirent de plus belle :

– Démon ! Criminel ! Incube ! Cannibale ! Sorcier ! Diable ! Satan ! Méphistophélès ! …

Et on le chassa comme tout à l’heure, ils furent avec Amita, mais avec plus d’agressivité et d’animadversion.

À SUIVRE…