J’ai toujours ce sentiment d’une finitude quelconque dans les œuvres que j’ai éditées jusqu’à présent.
Ce sentiment, animé par une merveilleuse trouvaille, devient omniprésent dans l’esprit qui travaille le corps.
On y consacre des secondes entières à déchiffrer, parcourir les extravagantes aventures de l’être aimé(e) qui nous émerveille chaque jour, à chaque minute du temps qui passe.
On s’abandonne pour découvrir ces gigantesques trésors fascinants, parfois espiègles qui alimentent notre esprit enchanté. Je crois bien que c’est une histoire fabuleuse, merveilleuse qui nous attend… je dis ça sans la moindre certitude du devenir de l’être aimé(e).
Puis, avant que nous ayons échappé un doux souffle dans la nostalgie du vent, nous puisons en notre esprit ce voyage formidable de cet être aimé(e) que nous chérissons inlassablement, rempli d’une liesse extraordinaire, débordante d’une infime particule de… je-ne-sais-quoi. Nous scellons en notre cerveau les aventures merveilleuses, rocambolesques, martiales de cet être devenu notre allié, notre amant, notre insécable attachement, sans imaginer en une fraction de seconde que ces songeries, ces péripéties s’achèvent. Brutalement.
C’est un anéantissement pouacre, ténébreux, teigneux qui vient subitement de surgir du néant en travers de notre rétine qui viole cet immense intérêt que nous dévouons, l’esprit s’empoisonne de cette hantise devenue machiavélique. L’univers dans lequel nous nous sommes réfugiés, que nous avons ensemble appréciés, est un désenchantement le plus immoral qui soit. Car nous y avons consacré des secondes entières à méditer sur le devenir de l’être aimé(e).
Subrepticement, en une infime lueur, nous y goûtons avec bêtises cette forme d’abandon pour ce personnage et hélas ceci est terrible, angoissant de pouvoir annoncer que l’œuvre adorée est subitement vaporisée par un savant fou chimiste.
Et nous descendons d’un pas, dans l’horreur, emportés par des méandres suspicieux… dans lesquelles ne serait-ce-t-il point sage d’extraire cette hideuse contemplation.
Rédemption ! Le repentir est lâche, fougueux et volontaire.
Je pourrais noircir des pages et des pages sur ma vie dans ces croyances inutiles. Mais j’ai préféré alimenter ma plus grande dévotion dans ces trouvailles inaccessibles que seule l’imagination peut y entrer. Trouver des trésors antiques, partager des moments essentiels avec autrui devient presque un enchantement, un étourdissement farfelu.
Nous y entamons une violente descente quand l’esprit sauvageon, espiègle, se voit réfugier en ces aventures d’infinitude.
Sache que la réponse est non.
C’est une faribole tout ce que je viens expressément de raconter jusqu’à maintenant.
Qui aurait l’audace de croire à ces montagnes de balivernes, à ces nébuleuses paroles ?
Jamais plus nous descendrons d’un pas dans ce méandre indivisible.
Jamais plus nous fumerons les espiègleries futiles de ce savant fou chimiste.
Jamais plus nous retournerons à cette époque où l’enchantement est chaotique.
Jamais plus nous souviendrons de l’Ancien Temps qui s’arrête ici.
NEVERMORE.
Tel un Prince des Nuées, sur la chevauchée du fleuve invisible, nous guettons au passage un étonnant présage…
Et de ces grandes ailes qui hantent une tempête, où la mémoire a oublié une rustique doctrine d’une civilisation du temps jadis, l’Autrefois maudit te menace de sa trompe immortelle :
REMEMBER.
NEVERMORE 2019 , Timeho Plouerzoc’h, 7 novembre 2019