Chapitre 14 : La bête

13 mins

La magie impie ne consiste pas, comme le veux la croyance populaire, en une liste exhaustive de sorts démoniaques bannis pour des raisons évidentes. La magie impie regroupe tous les sorts interdis car ils sont trop dangereux. On y trouve de la magie purement démoniaque corrompant les êtres vivants aussi bien que des sorts bien trop puissants. Les pactes magiques, par exemple, peuvent vous affecter durant une vie entière. Ou celles de vos descendants. Les sorts chaotiques alliant plusieurs écoles de magies à celles des démons peuvent réduire en cendre des villes entières.
-Extrait de Introduction aux magies impies par Adert Getak

* * *

Iad 41 de l’ère impériale, premier dan de Grosta

-Et tu es qui, toi ?

Steshin était encore stupéfait sur le pas de la porte. Il se tenait face à une femme assez jeune au teint très clair, les cheveux blonds en tresses et les yeux d’un vert émeraude. Il l’observa de bas en haut et finit par s’attarder sur sa tenue.

Encore une varvarish ! Et assez hostile avec ça.

Elle avait adopté une posture de combat à mains nues inconnue de Steshin et elle se tenait entre lui et le lit où se reposait Oronay.

-Je suis le compagnon de route de celui-là.

Il désigna le varvarish alité en le pointant d’un doigt sans toutefois trop avancer le bras.

-Je doute que mon Orony s’acoquine avec un sodugist dans ton genre.

Orony ? Dans mon genre ?

-Alors que fais-tu là ? Si c’est pour lui tirer sa bourse c’est raté.
-Je suis venu voir comment il allait.

Même moi je n’y croirais pas. Mais elle ne peut pas savoir quelle relation nous entretenons. C’est bien le problème d’ailleurs.

Le visage de la jeune femme ne montra aucun signe de doute, elle ne comptait pas se laisser convaincre si facilement.

Comment faire ?

-Sors d’ici, sodugist !

Il me faut une idée, vite !

L’expression de son visage changea lorsqu’elle entendit Oronay gémir, son visage devint plus doux et elle se retourna alors vers le blessé.

-Orony ?

Elle semblait s’inquiéter sincèrement. Le principal intéressé finit par ouvrir les yeux au bout de quelques instants d’efforts et une expression de surprise apparut immédiatement sur son visage. Une très désagréable surprise.

-Mesia !
-Orony ! Tu vas mieux !

Elle le serra dans ses bras sans attendre. Steshin assista à la scène médusé, observant le visage défait, implorant de pitié du varvarish. Une lueur traversa son esprit.

La dernière fois que je l’ai vu avec cette expression, c’était avec les filles de la taverne chez les voleurs à Ledan. Il a vraiment un problème avec les femmes.

Oronay était totalement figé à présent, tel une statue de cendre laissé par le passage d’un terrible cataclysme.

Il ne bouge plus d’un cil ! Et il semble implorer de l’aide maintenant. Ce n’est peut-être pas avec les femmes qu’il a un problème, mais seulement avec elle. Et ça se répercute sur les autres.

Elle sautillait de joie en tenant fermement Oronay dans ses bras tout en gloussant.

Elle ressemble plus à une petite fille qu’à une guerrière maintenant. Ça ne doit pas être simple tous les dano avec elle.

La scène, de plus en plus gênante, dura encore quelques minuto à la fin desquels la dénommée Mesia calma sa joie débordante et relâcha son étreinte. Elle se tourna de nouveau en direction de Steshin en affichant une nouvelle fois son air combatif.

-Revenons-en à toi, sodugist. Disparaît de la chambre de mon Orony !
-Je te l’ai déjà dit ! Je suis son… Compagnon de route.
-Men…
-C’est… C’est vrai, Mesia !

L’intervention d’Oronay avait visiblement semé le trouble chez la varvarish et elle baissa immédiatement sa garde.

-Dans ce cas…

Elle retourna au chevet du blessé. Steshin se montra hésitant à l’idée de s’approcher d’elle pour rejoindre son lit. Il avança alors à tâtons, guettant la réaction de la guerrière. Mais elle n’avait d’yeux que pour Oronay qui affichait une mine dépitée. Finalement, Steshin parvint à se coucher dans son lit et ne dormit que d’un seul œil.

* * *

Le trio passa les cinq dano suivant à se reposer au village, le temps qu’Oronay soit en état, non seulement de voyager mais surtout de combattre à peu près décemment grâce aux bons soins de sa nouvelle compagne. Steshin profita de cette période de repos pour se remettre totalement sur pieds au grand étonnement de tout le monde.

Il découvrit par ailleurs que Mesia, contrairement à Oronay, ne maîtrisait absolument pas la magie car elle préférait hacher ses ennemis à grands coups d’espadon. Ce qui ne le rassura pas tellement en fin de compte étant donnée la longueur de la lame.

Durant ces cinq dano, l’ancien avait fait ramener le navire des pillards. Il ne payait pas de mine mais il était en assez bon état pour naviguer. Le vieil homme, reconnaissant, fit faire l’entretien de l’embarcation.

À la fin de cette période de repos, le nombre d’aventuriers de passage et autres profiteurs douteux d’événements avait explosé dans le village.

* * *

Iad 41 de l’ère impériale, septième dan de Grosta

Ce dan-là, Oronay passa la matinée à faire quelques exercices afin de se remettre en jambe après ses quelques dano de convalescence. Steshin, quant à lui, passa cette même matinée à la taverne sirotant lentement de l’hydromel et écoutant les rumeurs colportées par la très récente augmentation du nombre de voyageurs.

La grande majorité de ces racontars concernaient évidemment l’immense créature qui était apparue au camp des pillards quelques dano plus tôt et que quelqu’un avait aperçu pour ensuite en répandre la rumeur.

-Un dragon ! J’vous l’dis comme c’est, mes amis !

On lui prêtait toutes sortes de capacités et d’actes cruels. Mieux encore, on accordait même des vertus à ce qu’on pourrait prendre de lui. Des écailles plus dures que l’acier pour les armures, une chair succulente guérissant tous les maux, des crocs pouvant ressusciter les morts une fois plantés dans le sol et, bien évidemment, la queue réduite en poudre pour les problèmes de virilité.

Pour l’instant, les fameux chasseurs de dragons improvisés n’avaient aucune piste à suivre pour le retrouver. Alors les spéculations allaient bon train. Mais malgré la disparition soudaine du fameux dragon et des pillards, la région recelait encore bien des dangers. Et ce n’était pas seulement la nature sauvage.

Une rumeur courrait sur une créature à la forme vaguement humaine éliminant de manière spectaculaire les aventuriers. Steshin ne parvenait pas à se détacher de la conversation.

-C’est comme j’t’le dis ! On l’a r’trouvé la tripaille à l’air, l’gros cordon tiré sur toute la longueur !
-Et y’en a un autre ! Il était parti se soulager. On l’a retrouvé les parties au vent et le visage arraché. Y restait plus qu’les os !
-Y a le grand balèze qui s’est fait attaquer aussi…

Oronay et Mesia arrivèrent à ce moment-là et s’installèrent à la table de Steshin, lui faisant perdre le fil de la conversation.

-Y a quelque chose d’intéressant ?

Oronay semblait pressé. Mesia, par contre, prit le temps de commander un repas bien consistant pour son ” Orony ” .

-Seulement des rumeurs sur des attaques isolées.
-Pas vraiment intéressant.
-Et ça ne nous aide pas à trouver un équipage.
-J’avais oublié ce détail.

Steshin noya son sourire moqueur dans sa chope d’hydromel sachant la raison derrière cet oubli.

-Mais ici, la renommée suffit pour recruter des hommes.
-Tu penses aux attaques, Oro ?
-C’est un début.
-Mouais.

La fille de salle déposa les premiers plats d’un repas relativement lourd et nourrissant sur la table.

-J’ai besoin de me dégourdir les membres de toute façon.
-Ah ! C’est ça finalement ! Je comprends… Je vais aller demander quelques précisions dans ce cas.

Steshin se leva de table avec sa chope pour aller rejoindre une table de chasseurs de dragon improvisés et il ne put s’empêcher de jeter discrètement un œil sur le couple de varvarisho.

Elle lui donne la becquée. Comme c’est mignon ! Vu ce qu’elle a commandé, il va devenir gras comme une oie et il a l’air davantage contraint que volontaire.

* * *

-D’après les soiffards de la taverne, ça devrait être par là.

La petite troupe marchait depuis quelques uniao à la recherche des lieux des attaques mais, entre la neige tombée entre-temps et une vague description donnée par des chasseurs déjà bien imbibés, il était difficile de trouver une piste viable dans ces bois.

Les trois voyageurs marchaient à quelques dizaines de metro les uns des autres pour couvrir davantage de terrain. Steshin était au centre et les varvarisho sur les côtés.

À force de marcher, ils sentirent le sol s’élever légèrement et comprirent qu’ils s’étaient suffisamment éloignés de la côte pour sentir les premières collines malgré la faible visibilité dans les bois.

Steshin avait un étrange sentiment qu’il n’avait pas ressenti depuis longtemps, un sentiment familier semblant venir du plus profond de son être.

Étrange… Je n’avais pas ressenti ça depuis…

Inconsciemment, il avait lentement changé de trajectoire, guidé uniquement par son sixième sens. Ses pas l’amenèrent jusqu’aux restes de ce qui semblait être un humain de corpulence moyenne. Le corps avait été sauvagement mutilé mais pas par un animal.

-Mesia ! Oro !

Les deux varvarisho accoururent. Oronay examina rapidement le cadavre.

-Intéressant… La bête qui a fait ça ne l’a pas fait pour se nourrir.
-Oui mon Orony. Ce type s’est fait éventrer, les os ont été tordus ou brisés pour faciliter l’accès aux organes qui ont été balancés un peu partout après avoir été broyés.
-Hum… C’est ça Mesia. Même sa propre mère ne pourrait reconnaître ce gars maintenant.
-C’est étrange mon Orony. Je n’ai jamais vu de bête massacrer pour le plaisir du massacre.

Moi si. Mais ça ne peut pas être ça.

-Et vu l’expression de ce type, il était encore vivant quand cette bête lui a sauté dessus.
-On a de la chance. Il est mort après la dernière chute de neige. Il ne nous reste qu’à suivre les traces de pas et de sang.
-Bien dit Stesh. En chasse !

Oronay arbora de nouveau son sourire carnassier. Steshin savait que lorsque cela se produisait, son compagnon d’infortune devenait un véritable chien de chasse.

Ils s’élancèrent tous les trois à la poursuite de l’étrange créature, espérant la trouver avant la nuit et, surtout, avant les prochaines neiges.

* * *

La piste ne fut pas difficile à suivre étant donné la quantité de sang qu’avait laissé derrière elle la bête. Le trio était arrivé à l’entrée d’un tertre peu après avoir traversé l’équivalent local d’une voie royale menant à la capitale du duché voisin. Enfin, si l’on peut appliquer les standards de construction du continent à l’archipel. Le sentiment de Steshin, de son côté, s’était intensifié.

Ce qui nous attend au fin fond de ce tertre n’aura aucune pitié pour nous. Mais je ne peux pas m’empêcher de ressentir une forme de sympathie pour cette créature.

Steshin se claqua les joues pour chasser ses pensées idiotes qui n’avaient pas lieu d’être présentement.

C’est pas le moment !

-Tu n’as pas besoin de te faire dessus, Stesh.

Mesia se contenta de jeter un regard légèrement méprisant à Steshin, comme à chaque fois que l’occasion s’y prête.

Elle ne m’aime pas, c’est certain. Elle serait mignonne si elle n’avait pas cette expression renfrognée à chaque fois qu’elle me regarde.

-On y va ?

Mesia ne prit pas le temps de répondre, elle se contenta de détacher le fourreau de son espadon de son dos pour le prendre à deux mains. Une main à la base de la lame et l’autre sur la poignée. Elle avança prudemment en direction de l’entrée du tertre. Oronay lui emboîta le pas, également sur ses gardes et prêt à rôtir tout ennemi. Steshin se contenta de fermer la marche, sa dague à la main.

Sa grande lame n’a pas l’air bien pratique dans un espace restreint. Et encore moins lors d’une attaque surprise si elle doit prendre le temps de défaire son attirail à chaque fois.

L’entrée du tertre était une grande arche de pierre donnant sur une vaste salle circulaire faite de pierres taillées sans intérêt esthétique. Il n’y avait qu’un seul autre moyen de sortir de cet endroit, c’était un passage semblant donner sur un début de couloir à priori.

Le trio s’approcha de l’ouverture illuminée par les flammes produites par Oronay, aveuglant Steshin par la même occasion. Une odeur pestilentielle s’échappait du fond du tertre et chatouilla les narines des trois aventuriers.

L’odeur des morts en putréfaction.

-Des cadavres pourrissants.
-Et pas qu’un seul, Orony.

Le couloir n’était en réalité qu’un passage de quelques metro de longs à peine assez large pour permettre à deux personnes de marcher de front. Ce passage était fait des mêmes pierres que la première salle mais cette fois, elles étaient pourvues de petites alcôves taillées dans lesquelles reposaient divers objets. On y trouvait des fruits pourris, des fleurs fanées, des amphores au contenu inconnu, quelques armes sans doute plus belles qu’efficace et même quelques pièces d’argent.

Aucun des trois ne toucha à quoi que ce soit, les varvarisho ayant trop de respect pour les guerriers enterrés ici et Steshin ne souhaitant pas troubler davantage le repos des morts. Ils préférèrent traverser le couloir et découvrir sur quoi il débouchait.

Ils trouvèrent un escalier en colimaçon taillé directement dans la roche. Et ils entendirent quelques sons provenant des profondeurs du tertre. Alors ils s’engagèrent sans hésiter mais doucement, les marches étant glissantes. L’odeur de moisi se fit de plus en plus présente.

Cette odeur est de pire en pire. Les corps ont dû subir les outrages du temps. Cet endroit doit donc être ouvert depuis un moment déjà.

L’escalier se terminait sur un couloir bien plus long et large que le précédent. Des alvéoles bien plus grandes que les précédentes se trouvaient de chaque côté. Chacune de ces cavités comportait un corps embaumé profitant du repos éternel.

Ici aussi les proches des morts ont déposés des offrandes pour rendre leur vie suivante plus douce.

Le groupe fit à peine quelques pas dans ce corridor que Mesia le stoppa d’un geste. Ils se tinrent prêts à toute éventualité, la garde haute, et ils tendirent l’oreille.

On entendait plus que trois choses dans le tertre, le sifflement du vent s’engouffrant par intermittence à l’intérieur, la respiration d’une narine obstruée et, enfin, des grognements étouffés, désordonnés et par moment, hystériques. Cela ne pouvait venir que de devant eux mais ils n’y voyaient pas assez pour savoir ce qui les attendait.

Les trois commencèrent une discussion dans une sorte de langage des signes improvisé pour savoir qui devait passer devant et servir d’éclaireur. Les varvarisho parvinrent à se mettre d’accord, Steshin servirait d’appât. Le désigné volontaire s’avança prudemment, à pas lents en direction des grognements. Oronay en profita pour éteindre sa flamme par prudence. La colère montait de plus en plus en Steshin.

Tout ça parce que je fais moins de bruit. Au moins le manque de lumière ne me posera pas de problème… Je le sens. Il est droit devant. Il est seul. Et il n’est pas loin. Il a l’air… Perdu.

Le couloir se terminait par une embouchure masquée par un simple drap suspendu fait de tissu épais, troué et taché. Steshin attrapa l’étoffe et la tira d’un coup sec. Les varvarisho n’entendirent qu’un hurlement strident et la créature sauta sur l’appât comme si elle était montée sur un ressort. Durant ce très court instant, Steshin en avait profité pour incanter un sort très rapidement et il vit que la créature fut distraite par cela durant son saut mais il n’y prêta pas plus d’attention que ça, il pensait seulement à la poignarder pour le moment.

Steshin ne put encaisser le choc, l’élan de la créature le fit chuter au sol et elle avec. Il eu le temps de lui planter sa dague dans le flanc sans beaucoup d’effet avant de recevoir un violent coup à la tête. Il sentit un liquide au goût ferreux sur ses lèvres, celui du sang. Cette saveur si particulière lui remit les idées en place.

Où sont les deux autres ? Je vais finir en charpie à ce rythme !

Steshin se défit de l’emprise de la créature et la rejeta sur le côté. Il tenta de s’enfuir à quatre pattes mais la bête n’avait pas prévu de le laisser s’enfuir si facilement. Elle se jeta de nouveau sur lui avec force et il sentit quelque chose se déchirer quelque peu mais n’y prêta guère d’attention dans l’immédiat. Il ne dut son salut qu’à une boule de feu provenant de la main d’Oronay. Celle-ci rata totalement sa cible mais elle put distraire suffisamment la bête et permit de créer une source de lumière en embrasant le morceau de tissu.

Steshin vit Mesia s’élancer l’espadon en avant vers la créature et lui-même qui était encore en dessous. Il sentit la bête sauter de son dos en direction de la varvarish, elle évita maladroitement la lame de l’espadon et percuta Mesia de plein fouet. Elles finirent toutes deux au sol avec l’élan et la guerrière avait lâché sa lame juste avant l’impact pour se protéger de la charge.

C’était réellement une bête féroce, Mesia luttait à mains nues pour ne pas périr le visage arraché. Ses poumons se remplissaient de l’haleine fétide de la créature. Elle sentait ses joues se couvrir de la salive dégoulinante de la bête. Elle ressentait les griffures sur la peau de ses avants-bras, là où les manches s’étaient relevées dans la confusion. Par chance, la bête humaine ne voulait arracher avec les dents que son visage sinon elle n’aurait déjà plus de doigts.

Steshin peinait à se relever pendant qu’Oronay avait bondi en direction de Mesia, il agrippa la bête par la peau du cou et un semblant de ceinture puis il la releva avant de tenter de la jeter contre un mur mais elle fut assez agile et rapide pour lui mordre le poignet.

-Enfoiré !

Oronay abattit plusieurs poings furieux dans la tête de son ennemie pour la faire lâcher prise, ce qu’elle fit. Ensuite, il incanta rapidement un sort de cône de flammes pour la maintenir à distance quelques instants. Mesia profita de ce répit pour se remettre debout et ramasser son espadon.

La magie d’Oronay a légèrement changé depuis quelques temps, j’en suis certain.

Steshin était réduit au simple rôle de spectateur désormais et ce, malgré ses réflexes améliorés par la magie. Il ne ferait que gêner les varvarisho. Lorsqu’Oronay stoppa son sort, la créature était nettement visible désormais grâce aux flammes tenant encore sur sa peau et ce qui ressemblait à des vêtements. Steshin pouvait désormais voir très nettement la bête et il comprit qu’il ne s’agissait que d’un humain recroquevillé. Et celui-ci savait se servir de la magie. Et il s’en servait !

L’homme balbutia quelques paroles incompréhensibles et, depuis le mur contre lequel il avait été acculé, il s’élança en direction de Mesia une nouvelle fois, ignorant les douleurs et les brûlures. Son visage était totalement déformé par la rage.

Cette fois-ci, Mesia anticipa la trajectoire de son opposant et plaça un coup d’estoc directement dans l’abdomen de l’enragé qui, avec son élan, s’empala dessus bêtement. Mesia ne put supporter son poids et le laissa glisser le long de la lame. Lorsqu’il retomba au sol, il tenta de se relever mais la varvarish n’hésita pas à l’achever avec le tranchant de la lame. À plusieurs reprises.

Une fois le vacarme du combat retombé et leur ennemi immobilisé dans son propre sang qui s’écoulait dans les irrégularités de la roche taillée, Oronay ralluma une petite flamme pour y regarder de plus près.

-Voyons voir à quoi on a affaire…

Les varvarisho l’examinèrent sous toutes les coutures, ou tout du moins ce qui en restait… Mesia n’avait pas fait dans la dentelle, l’une des mains avait même roulé un peu plus loin. En tout cas, ils ne décelèrent pas de particularité sur cet humain en dehors d’un amaigrissement extrême.

-Je ne sais pas ce qu’il avait mais il était dangereux. Et il était capable de lancer des sorts.
-Et alors Orony ? Il est mort maintenant, quelle importance ça a ?
-Je ne sais pas. C’est peut-être l’œuvre d’un mage fou.

Ou d’un sorcier.

-Peut-être qu’il avait attrapé une sorte de rage mais on s’en fiche maintenant. On y va Orony ? Il faut les laisser se reposer ces défunts.

Pensif sur le sort de cette “bête” , il lui répondit seulement par un acquiescement positif.

-Un instant tous les deux. J’aimerais voir son antre avant de partir.
-Dépêche-toi Steshin dans ce cas.

Steshin se dirigea vers le fond du couloir. Il prit un instant face au drap toujours embrasé par quelques flammes de-ci de-là et se décida à le tirer une bonne fois pour toute avant de s’en servir comme source de lumière. L’antre de la bête empestait les excréments et divers autres choses en train de pourrir.

C’est chez lui. Ça ne fait pas de doute.

C’était une petite salle circulaire dans laquelle reposait tout un tas d’offrandes diverses et variées. Dans l’une des alcôves reposait un morceau de tissu rouge cramoisi jeté négligemment. C’était un capuchon rapiécé de toutes parts. Des morceaux d’étoffes de la même couleur étaient disposés ça et là dans la pièce.

C’est ici qu’il a sombré. C’était un miséreux étant donné l’état de ses vêtements.

Steshin ne trouva rien de plus ici malgré une fouille attentive. Il entendit ses compagnons de route s’impatienter.

Rester ici ne m’apportera aucun indice supplémentaire.

Il rejoignit les deux varvarisho et ils partirent d’un bon pas en direction de la sortie.

Ce gars employait la même magie que moi et ça l’a transformé en bête furieuse. Comment ?

Ils sortirent du tertre en empruntant le même chemin qu’à l’aller et une fois dehors, ils profitèrent quelques instants du bon air frais. Puis ils repartirent en direction du village, laissant les morts à leur repos éternel. Après à peine quelques pas, Oronay ne put s’empêcher de faire ressortir quelques ressentiments.

-Tu aurais pu faire plus attention Steshin ! Tu nous a gênés lorsqu’elle était sur toi. Mesia a failli finir en bouilli.
-C’est vrai ça !
-Mes excuses. Il m’a pris par surprise et ma dague n’a eu aucun effet sur lui.
-Et ensuite, tu t’es contenté de regarder pendant qu’elle était sur le point de se faire écharper.
-Tu as incendié presque immédiatement la moitié du couloir. Je n’avais pas envie de finir en rôti.

La suite du trajet se fit dans un silence pesant. Mesia collait Oronay de près.

Peut-être que ce gars est devenu ainsi à cause d’un rituel. Mais comment quelqu’un aurait-il pu apprendre mon école de magie ici ? Cette bête, ou quoi que ce fut, m’apporte au final plus de questions que de réponses.

Cet étrange sentiment que Steshin avait ressenti plus tôt dans ce dan n’avait pas disparu avec la créature. Il était simplement plus… Diffus, plus lointain. Mais il n’y prêta pas attention pour le moment car son esprit était trop pris par certaines questions. Et par la soudaine hostilité d’Oronay.

Le groupe marcha, marcha, marcha et rentra finalement au village peu après la tombée de la nuit, juste avant de nouvelles chutes de neige.

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