Chapitre 17 : L’œil du cyclone

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Le roi Lusinol voulut partir en pillage,
Alors au divin Luku il rendit hommage.
Mais le présent offert était si ridicule,
Qu’il dû promettre d’offrir le gagné pécule.
Il gagna la mer et le précieux butin.
Pourtant, à son retour sa promesse il ne tint.
Il reprit la mer et la tempête éclata,
Par la fureur du dieu, le navire sombra.

-La fable du roi Lusinol

* * *

Iad 41 de l’ère impériale, seizième dan de Grosta

Steshin, les adeptes Grona et Smenkes ainsi que Borshia “tie Magsarnist” arrivèrent la veille au village, tard dans la nuit. Le navire providentiel les y attendait sagement après une petite remise à neuf. Ces derniers dano, le temps se fit de plus en plus nuageux mais aucune chute de neige ne fut à déplorer.

Après quelques uniao de repos bien méritées, le petit groupe s’éveilla avec le lever de Sonse. La première chose que fit le capitaine, ce fut de faire la connaissance de sa nouvelle moitié. Steshin le rejoignit peu après, toujours accompagné de ses deux adeptes tout en grignotant une tranche de pain couverte de beurre.

J’ai des courbatures plein les jambes. Elles n’ont pas apprécié d’autant marcher avec aussi peu de repos.

-Et bien, il a pas l’air en bonne forme vot’ rafiot.

Steshin bâilla à s’en décrocher la mâchoire et répondit avec les yeux encore mi-clos.

-On l’a entretenu comme on a pu.
-Bah… À cheval donné on ne regarde pas les dents comme on dit.
-Comme on dit, oui.
-Je vais voir ce que je peux faire pour elle.
-Elle ?
-Pour un capitaine, un navire est comme une seconde épouse.

Borshia fit un clin d’œil avec un sourire espiègle à Steshin. Ce dernier afficha un air plutôt amusé.

-Dans votre cas, ça a davantage l’air d’être la première.

Ils se regardèrent longuement et éclatèrent de rire. Ce fou rire dura quelques minuto sans interruption.

-La mer est ma première épouse !
-Ha ha ! Mais vous semblez assez proche de cette femme à la taverne.
-Mes deux premières épouses ne sont pas jalouses.

Le capitaine arbora un sourire entendu souligné d’un nouveau clin d’œil, complice cette fois.

-Ah ! Et votre équipage ? Enfin, mon futur équipage.
-Je dois aller les chercher, je devrais être de retour en soirée au plus tard.
-Le temps semble empirer depuis quelques dano. Il n’y a pas encore trop de vent alors il vaudrait mieux faire vite.
-Pourquoi ? La houle ne serait-elle pas plus dangereuse justement ?
-Avec ce genre de navire, on peut y survivre en pleine mer. Mais les récifs de l’archipel par contre…

Steshin avala d’un coup sa tranche de pain comme s’il venait de recevoir un ordre auquel il ne pouvait échapper.

-Hum… Je comprends. Je vais me hâter dans ce cas. Et n’hésitez pas à faire le plein de provisions. Voyez avec l’ancien du village si il y a un quelconque ennui. C’est l’homme chez qui nous avons passé la nuit.
-Pour combien de personnes ?
-Un peu plus d’une quarantaine.
-C’est juste pour notre périple, il faudra éviter les blessures. Hum… Et la nourriture va coûter cher.

Steshin délia sa bourse et y jeta un coup d’œil. Il n’y restait que quelques pièces d’argent agrémentées d’un bon nombre de pièces de bronze.

J’ai été un peu trop dépensier ces derniers temps et ce voyage ne nous rapporte rien. Je dois garder une petite réserve au cas où et ça devrait être suffisant.

Steshin prit toutes les pièces d’argent qui lui restait et les donna au capitaine.

-Je ne pense pas que ça suffira.
-Dans ce cas-là, c’est une avance. Je serai de retour avec le reste de la somme et l’équipage en fin de dan.
-Bon, je vais tenter de négocier comme ça.
-Voyez avec l’ancien, il devrait être une garantie suffisante pour récupérer les provisions.
-Je pense aussi.
-Adeptes Grona et Smenkes, restez avec notre capitaine et veillez à ce qu’il ne lui arrive rien.
-Comme vous voudrez, seigneur Steshin.
-Nous donnerons nos vies pour accomplir vos desseins.

Borshia “tie Magsarnist” ne les avait pas entendu prononcer un seul mot depuis leur départ de Moron et il fut interloqué par leur façon de s’exprimer. Il dévisagea longuement Steshin mais il n’osa pas émettre la moindre remarque. Steshin n’y prêta guère attention et partit en direction du manoir où il avait laissé son culte.

* * *

J’espère qu’ils sont prêts pour le départ. Je veux rentrer à Pavan au plus vite pour revoir ma chère Larny ! Ah… Ce qu’elle me manque…

Steshin avançait sans répit depuis quelques uniao lorsqu’il vit enfin la silhouette du manoir au loin. À cette vue, il redoubla d’efforts malgré les douleurs et finit par en atteindre l’entrée peu de temps après. Il entra à l’intérieur et découvrit une sorte de camp improvisé en intérieur avec tout le nécessaire pour préparer des repas, du dépeçage à l’assiette.

Les quelques adeptes se retournèrent tous ensemble en direction du nouveau venu et, reconnaissant leur maître, ils se mirent tous à genoux avant de ne parler que d’une seule voix.

-Bienvenue, seigneur Ravust !
-Sous cette forme, vous devez m’appelez Steshin !
-Comme vous voudrez, seigneur Steshin !

Ça, ils ne l’ont toujours pas compris visiblement.

-Vous pouvez vous relever, mes fidèles adeptes.

Ils obéirent comme un seul homme et l’un d’eux prit la parole d’une voix pleine d’assurance.

-Je vais aller chercher le haut maître.

Et il disparut en moins de temps qu’il ne le faut pour le dire. Il s’était enfoncé dans l’escalier menant au sous-sol. Quelques instants plus tard, le haut maître Toldaka Avosy en émergea.

-Mes excuses, seigneur Steshin, de ne pas vous avoir accueilli comme il se doit.

Le haut maître se prosterna à son tour avec énormément de déférence envers son seigneur.

-Tu es très occupé, haut maître. Je le sais bien. Inutile de t’excuser.
-Merci, seigneur Steshin.
-Relève-toi, haut maître, nous avons à parler.

Le haut maître se releva et fit face à Steshin, il soutenait son regard comme si il était mis à l’épreuve.

-Haut maître, montre-moi les progrès que vous avez réalisés durant mon absence.
-Vos serviteurs nous ont appris à chasser et à cuire la viande correctement, seigneur Steshin.
-Montre-moi, haut maître.

Toldaka l’invita à s’approcher d’une table ensanglantée sur laquelle reposait la carcasse d’un sanglier ainsi que plusieurs morceaux de chair animale. Steshin y jeta un coup d’œil.

-Hum… C’est bien. Montre-moi la cuisine maintenant, haut maître.

Le chef du culte lui présenta un brasero sur lequel reposait une grille ainsi que des brochettes de viande. Steshin en prit une, souffla un peu dessus et y goûta.

Basique. Aucun travail sur la saveur. Suffisant pour survivre.

-Vous avez bien appris. Je vous félicite tous, haut maître.
-Vous m’honorez, seigneur Steshin. Nous ne faisons que de notre mieux pour vous servir.
-J’en suis ravi, haut maître.

C’est un bon début. Hum… Où sont les deux autres ?

-Haut maître, où sont mes deux servants varvarisho ?
-À l’étage. Dans l’une des chambres, seigneur Steshin.
-Bien. Haut maître, préviens tout le monde que nous partons sur le champ.
-Tout de suite, seigneur Steshin.

Toldaka exerça son autorité d’une voix puissante aux cultistes présents dans la pièce.

-Vous avez entendu adeptes Ugnest et Damut ? Annoncez le départ à tous !
-Ce sera fait, haut maître !
-Tout de suite, haut maître !

Les deux cultistes partirent en trombe annoncer la nouvelle après avoir employé quelques sorts de rage.

-Haut maître, as-tu trouvé les adeptes que je t’avais demandé ?
-Oui, seigneur Steshin. Nous avons le bon nombre d’adeptes malgré… Les quelques pertes durant l’initiation.
-Des morts, haut maître ?
-En effet, seigneur Steshin. Cela arrive de temps à autre.
-C’est sans importance alors, haut maître.

On devrait être dans les temps.

-Pardonnez-moi seigneur Steshin, quelque chose vous dérange-t-il ?
-En aucun cas, haut maître. Tu as fait du bon travail jusque-là.
-Merci seigneur Steshin. Mais quelque chose vous chiffonne. Un ennemi approcherait-il ?
-Seulement le temps, haut maître. Il pourrait se gâter rapidement.
-Je comprends, seigneur Steshin. Je vais hâter les préparatifs dans ce cas.

Il ne laissa pas le temps à Steshin de réfléchir à une réponse qu’il fut déjà lancé dans les escaliers grâce à la magie impie du démon de la rage.

Il est décidément bien utile ce haut maître.

Moins d’une unia plus tard, l’intégralité de la quarantaine de cultistes était rassemblée à l’extérieur du manoir en ruine. Ils se tenaient prêts à prendre le départ face à Steshin. Les deux varvarisho restaient entre eux, un peu à l’écart du culte. Mesia semblait aller bien mieux depuis la dernière fois.

Ils ont l’air de s’être rapprochés, les deux tourtereaux.

La varvarish remarqua que Steshin l’observait et elle lui répondit avec un regard plus noir que la nuit de Vima la plus sombre.

Elle me hait. C’est certain. Je vais heureusement m’en débarrasser dans quelques dano. Et retrouver Larny. Je l’espère…

-Adeptes du culte de la rage, mes chers adeptes ! Comme le haut maître Avosy vous l’a dit, nous partons en voyage pour apprendre la véritable voie de la rage !

La seconde phrase de Steshin laissa place à un enthousiasme de la part de ses adeptes absolument inexistant.

J’espérais un peu plus de… N’importe quoi d’autre en fait.

-En avant, mes adeptes ! Vers le monde promis où vous pourrez manger du cerf et du papillon !

Cette fois-ci, il déclencha une vague de cris. Des sortes de cris guerriers un peu pathétiques et assez énervés.

Je crois comprendre, ça doit être la promesse d’un avenir dans un monde meilleur qui les avait attirés à l’origine.

Le culte se mit en marche à la suite de Steshin en direction du village côtier. Les varvarisho fermèrent la marche. Lorsque la troupe arriva à l’orée du bois, elle fut rejoint par l’adepte Kushust, l’homme-bête. Il se mit à trottiner aux côtés de Steshin et insista pour lui offrir sa dernière prise, un corbeau en piteux état.

Je dois trouver une solution pour celui-là.

* * *

Le culte de la rage arriva au village après le coucher de Sonse sans attirer davantage d’attention que cela. Les varvarisho se rendirent chez l’ancien sans concerter qui que ce soit comme si c’était chez eux. Steshin, quant à lui, emmena ses adeptes proche du rivage et du navire qui lui avait apporté tant de soucis.

-Haut maître, que les adeptes prennent place à bord de cette embarcation et qu’ils se familiarisent avec.
-Ce sera fait, seigneur Steshin. Devons-nous faire quelque chose de particulier ?
-Pas pour l’instant, haut maître. Le culte sera l’équipage alors n’abîmez rien, c’est tout.
-Bien, seigneur Steshin.
-Une dernière chose, haut maître. Les adeptes Grona et Smenkes doivent protéger le capitaine de ce navire. Nous avons besoin de ce capitaine pour traverser les eaux.
-C’est compris seigneur Steshin. Il n’arrivera rien à cet homme.
-En tout cas, passez une bonne nuit, haut maître. Je vais retrouver mes serviteurs varvarisho.

Le haut maître s’inclina bien bas avec toujours autant de respect face à son seigneur et maître.

-Bonne nuit à vous aussi, seigneur Steshin.

Steshin laissa le haut maître et prit la direction de la demeure de l’ancien en cette nuit froide de fin d’iad. Il en eut des frissons traversant tout le corps.

Et dire que nous allons encore plus au Nord. Quelle idée de fou !

Il finit par rejoindre la maison et alla directement dans sa chambre à coucher. Les deux varvarisho y étaient déjà et semblaient de nouveau distant. Mesia qui préparait sa couche n’accorda qu’un regard emplis de mépris à Steshin lorsqu’il entra dans la pièce.

Elle porte encore quelques traces de sa défaite mais rien de grave on dirait. Juste des tâches noires sur la peau.

Oronay, de son côté, était occupé à aiguiser son couteau et il n’accordait pas spécialement d’attention au nouveau venu.

-Orokay ?
-C’est Oronay.

Il avait répondu encore plus sèchement sans pour autant lâcher du regard sa lame.

-Il faudra que tu payes ta part des provisions.
-Je le ferai demain. Il manque combien ?
-Je ne sais pas. J’ai laissé le capitaine s’en occuper.
-Il a intérêt à rien n’avoir pris de superflu.
-J’espère aussi.
-J’irai le voir pour en être sûr.

Steshin resta debout, à l’entrée de la pièce, ne sachant quoi ajouter et les deux varvarisho étaient occupés à leurs affaires. Un silence pesant se mit en place.

Quelque chose a définitivement changé.

Sans un mot, Steshin se prépara à dormir. Une fois allongé dans son lit, il se laissa bercer par le son du couteau affûté sur une pierre. Il s’endormit d’un sommeil lourd et sans rêve.

* * *

Iad 41 de l’ère impériale, dix-septième dan de Grosta

Steshin se réveilla le lendemain matin. Il se sentait reposé pour la première fois depuis longtemps.

C’est le grand dan. On va enfin en finir avec toute cette histoire… Quelle unia est-il ?

Il s’étira dans son lit avant de prendre conscience que Sonse était presque levé.

Merde ! Il est déjà tard. Ils doivent m’attendre !

Il se leva d’un coup et se prépara en trombe jusqu’à ce qu’un détail ne lui saute aux yeux.

-Où sont les deux autres ?

Il continua à se préparer, harnachant ses affaires dans la plus grande hâte.

-Ils auraient pu me réveiller.

Steshin sortit de la chambre en vitesse et tomba nez à nez avec l’épouse de l’ancien.

-Oh ! Mes excuses, madame.
-Oh ! Ce n’est rien. Vous vous êtes levé tard.
-Oui, en effet. Je dois d’ailleurs me hâter.
-Je comprends. Tant que vous êtes là, votre ami est passé payer pour l’avance que nous vous avons faite.
-Ce n’est pas mon ami.

La vieille femme fut étonnée par une réponse aussi directe et aussi peu empreinte de chaleur pour un compagnon de route.

-C’est une longue histoire… C’est une bonne chose. Aviez-vous avancé beaucoup d’argent ?
-À peine trois pièces d’argent.

La poisse ! Ça m’en a coûté bien plus !

-Merci encore. Nous ne vous importuneront plus.
-Ce n’est rien, ne vous en faites pas. Si vous êtes de nouveau de passage dans nos contrées, passez nous raconter vos aventures.
-Ha ha ! Je n’y manquerai pas si vous insistez.

Elle parvint à faire oublier à Steshin son retard et le désagrément d’avoir été laissé derrière.

-Mes excuses, je dois m’en aller au plus vite.
-Faites bon voyage. Vous serez toujours le bienvenu ici.
-Merci.

Steshin partit d’un bon pas vers le débarcadère où l’attendait tout le monde, ou pas. Lorsqu’il arriva, les cultistes s’afféraient en tout sens pour finir de monter caisses et tonneaux. Le haut maître le vit s’approcher et l’aborda immédiatement.

-Bien le gudan, seigneur Steshin.
-Gudan haut maître. Comment se passent les préparatifs ?
-Nous sommes sur le point de terminer, seigneur Steshin.
-Bien, où est le capitaine, haut maître ?
-Sur le pont, seigneur Steshin.
-Finissez au plus vite, haut maître. J’ai hâte de partir.

Toldaka s’inclina avec un immense respect alors que son seigneur et maître montait déjà à bord du navire.

-Capitaine “tie Magsarnist” !

L’interpellé se retourna avec un air mêlant surprise et soulagement sur son visage.

-Ah ! Vous voila enfin !
-Quand pourrons-nous mettre les voiles ?
-Dans très peu de temps. Vos… Hommes sont très efficaces.
-C’est pour ça que je les ai pris.
-Mais… Ils sont un peu… Étranges.

Borshia “tie Magsarnist” semblait un peu tendu à l’idée d’évoquer cela.

-C’est à dire ?
-Et bien, un homme se prend pour une sorte d’animal.
-C’est une longue histoire mais il ne posera pas de problème.
-Très bien mais les autres… Semblent vénérer quelque chose… Ou quelqu’un.
-C’est pour ça qu’ils sont efficaces.
-Ils peuvent bien vénérer le divin qu’ils veulent tant qu’ils ne contrarient ni Bokin ni Luku.
-Ne vous en faites pas pour ça, ils seront sages.
-En fait… J’ai bien peur qu’ils ne vénèrent un démon.

Les craintes du marin apparurent au grand dan, dans sa voix et sur son visage.

-Allons, les démons sont peu de choses face aux divins, non ?
-Hum… C’est vrai. J’aimerais qu’ils nous protègent dans ce cas si mes craintes s’avèrent fondées.

J’espère qu’il ne va pas poser problème celui-là. Ce serait le comble en pleine mer.

Toldaka monta sur le pont d’un pas sûr pour rejoindre Steshin et le capitaine.

-L’embarquement est terminé, seigneur Steshin. Les amarres sont en train d’être larguées.
-Merci, haut maître.

Steshin remarqua l’air interrogatif emplis de diverses craintes de Borshia.

-C’est également une longue histoire.
-Ça ne me regarde pas après tout. Et je ne veux pas savoir où vous les avez trouvés, tant que vous tenez parole…
-Heureux que vous le preniez comme ça.
-Comme si j’avais encore le choix maintenant.

Le capitaine s’adressait désormais à Toldaka sans pour autant avoir gagné en sérénité.

-Je n’ai pas bien saisi votre nom… Haut maître.
-Toldaka Avosy. C’est comme ça que l’on m’a nommé.
-Hum… Toldaka, rassemblez vos hommes que je leur explique comment s’occuper d’un navire.
-Tout de suite, capitaine.

Toldaka commença à rassembler la quarantaine de cultistes sur le pont en usant de son autorité.

-Capitaine ?
-Oui ?
-Où sont les varvarisho ?
-Dans la cale. Ils doivent en profiter pour se faire des mamours.

C’est pas vraiment le genre.

Steshin admira son culte se rassembler devant lui, prêt à naviguer pour la première fois. Borshia “tie Magsarnist” distribua les rôles et les expliqua à chacun.

Ça se voit qu’il est expérimenté.

Après avoir fait le tour de l’intégralité du culte, il revint auprès de Steshin. Pendant ce temps, l’équipage improvisé s’attelait à déployer la voile.

-C’est l’unia de vérité.
-En effet, capitaine.
-Nous allons faire quelques manœuvres au large avant de prendre la direction de la Varvary.
-Cela nous prendra t-il beaucoup de temps ?

La voile se déploya en totalité d’un seul coup et elle prit juste assez de vent pour faire avancer le navire.

-Oh, c’était juste.
-Capitaine ?
-Vos hommes manquent cruellement d’expérience. Au mieux, quelques uns ont déjà navigué il y a longtemps.
-Et je n’ai pas mieux à vous proposer.
-J’sais bien et on f’ra avec. D’ailleurs j’ai une question qui me trotte par contre.
-Laquelle ?
-D’où vient votre navire ?
-Pourquoi ? Il a un problème ?
-C’est une sorte de bâtard entre un navire du continent et de l’archipel. On ne fait pas de séparation entre le pont et la cale chez nous.
-Et ça pose quoi comme problème ?
-Ce navire sera sans doute plus lourd que ceux dont j’ai l’habitude mais rien de bien problématique.
-Si vous le dites.

Le navire s’éloigna de la côte en se laissant porter par le vent tout en étant bercé par les quelques vagues. Le village d’où il était parti n’était qu’un amas noirâtre sur un fond blanc lorsque Borshia s’époumona à donner des directives à “son” équipage. Un coup, on virait à bâbord, un coup, à tribord, on remontait et on rabaissait la voile, on usa même des rames. Finalement lorsque la matinée fut bien avancée, les exercices prirent fin.

-À bâbord toute, cap plein Sud ! En route pour la Varvary !

Il est particulièrement enthousiaste. Ça devait le peser de ne plus pouvoir naviguer.

* * *

Iad 41 de l’ère impériale, dix-huitième dan de Grosta

La moitié de la nuit était déjà passée lorsque le navire était proche de sortir de l’enceinte protectrice et rassurante de l’île principale qui formait un croissant de Mona. Malheureusement, le temps avait empiré, nuages noirs cachant les étoiles et grandes vagues frappant la coque du navire. Steshin ne parvint pas à dormir avec tout ça.

-Capitaine, votre avis ?
-Vous voyez la lumière à tribord là-bas au loin ?
-Oui. Ça ressemble à un brasier.
-C’est celui du phare de Podug. On peut aller y finir la nuit et se lancer dans la tempête au lever de Sonse.
-Mais le temps ne va faire qu’empirer et ce sera pire dans quelques unia, non ?
-Possible. Vous préférez quoi ? C’est vous qui commandez puisque vous payez.
-Si vous estimez qu’il est plus sûr de se lancer maintenant, faites-le.

Borshia “tie Magsarnist” afficha un sourire déterminé. Il avait manifestement déjà pris sa décision.

-Si nous parvenons à quitter les eaux de l’archipel, je devrais trouver un nom. Pour le bateau je veux dire.
-Alors nous avons une chance, c’est ça ?
– “Tie bastastkinol’sereo” .
– “Tie bastastkinol’sereo” ?
-C’est le nom que je lui donnerai.
-Un peu prétentieux, non ?

Steshin et Borshia partagèrent un sourire amusé comme symbole d’une complicité naissante entre les deux hommes.

-C’est pas tout ça mais on a des récifs à éviter. Steshin, allez me chercher le chef des encapuchonnés.
-On doit s’attendre à quoi ?
-Beaucoup de vent, la houle et des récifs. Des éclairs peut-être… Mais ça devrait aller, vos gars sont p’tet bizarres mais ils sont réactifs et endurants.
-On va s’en sortir alors, capitaine “tie Magsarnist” .

Steshin partit chercher le haut maître dans la cale et l’envoya auprès du capitaine qui lui ordonna de préparer des cultistes à tous les postes et en particulier aux rames.

Dès que l’embarcation quitta la protection de l’île principale, elle fut chahutée de toutes parts par les vents et une mer déchaînée. Bien que l’île la plus proche, celle de Varsov, soit trop éloignée pour constituer un réel danger, de nombreux îlots parsemaient la mer. Et chacun d’eux disposait de son lot de récifs, de bancs de sables et autres éléments traîtres.

Les adeptes du culte de la rage avaient de la force et de la détermination à revendre fort heureusement. Ils usèrent même de leur magie impie pour tenir le coup. Steshin s’époumona à les encourager à défaut de pouvoir en faire davantage. Les varvarisho, quant à eux, faisaient office de vigie, aidant le capitaine à éviter les dangers.

Ils leur fallut tous luter intensément durant presque deux uniao pour dépasser l’île de Varsov mais ils y arrivèrent non sans dommage. Quelques rames se brisèrent sur un rocher sournoisement masqué par les vagues et la quille frotta quelque peu dans une eau trop peu profonde mais elle ne fut pas trop abîmée.

-Steshin ! Dites à vos hommes de se reposer et faites remplacer les rames brisées !
-Ils ont combien de temps, capitaine ?
-Moins d’une unia !

Steshin fit signe qu’il avait bien compris et porta l’information à Toldaka qui à son tour s’occupa de la transmettre aux adeptes de son culte. Oronay, Mesia et Steshin remplacèrent les rames qui devaient l’être. La pluie tomba violemment sans crier gare.

Les adeptes sont exténués, j’espère qu’ils tiendront jusqu’au bout.

Steshin échangea un regard avec Toldaka qui, lui, affichait un air déterminé.

Ils ne se laisseront pas faire. Ils vont y arriver. Ou ils mourront en essayant.

De nouveau, le danger se rapprochait avec l’île d’Okokov qui promettait un passage bien plus étroit de presque la moitié du précédent. Et la tempête empirait.

L’épreuve dura de nouveau deux uniao mais elle fut bien plus ardue entre la fatigue et le nombre important d’obstacles. Plus d’une fois Borshia fit faire au navire une manœuvre dangereuse pour éviter de couler au point que sur l’un de ses passages, l’intégralité des rames bâbord furent brisées contre un îlot de roche quasi vertical. Mais il ne restait pas assez de matériel pour remplacer toutes les pertes dans l’urgence et une partie des rameurs changèrent de bord pour éviter toute dérive d’un côté ou de l’autre.

Finalement lorsqu’ils quittèrent cet étroit passage, Borshia fit une embardée à bâbord particulièrement brusque pour atteindre le large et s’éloigner de toute forme de terre le plus rapidement possible. La houle et la tempête continuaient de faire rage mais tout danger était écarté pour le moment.

Les cultistes, qui avaient donné tout ce qu’ils avaient, tombèrent de fatigue comme des mouches. Toldaka, Steshin et les varvarisho les portèrent aussi vite que possible dans la cale pour qu’ils puissent prendre un repos bien mérité.

Je pensais pas les voir épuisés un dan. Ils prennent vraiment à cœur ce culte, j’ai l’impression. Peut-être que je pourrais faire quelque chose pour eux en échange ? Juste histoire de récompenser leurs efforts.

Steshin fut impressionné par l’adresse de Borshia qui ne portait pas son surnom pour rien et il alla le rejoindre à la barre une fois l’évacuation des cultistes terminée.

-Capitaine, est-ce que c’est terminé maintenant ? À part le vent, la pluie et les vagues évidemment.
-On dirait bien, on est assez loin des rives maintenant.
-Évitez les ennuis, l’équipage est épuisé.
-J’ai vu, vous en faites pas. On part plein Nord loin de tout danger. Vous pouvez aller vous reposez dans la cale si vous voulez.
-Et vous ?
-J’ai encore un peu d’énergie et j’ai envie d’en profiter encore un peu.

Il a le regard d’un petit garçon à qui on a donné un nouveau jouet.

-Très bien mais ne coulez pas le “Tie bastastkinol’sereo” durant mon sommeil.

Borshia “tie Magsarnist” rit de bon cœur à cette plaisanterie malgré la dernière épreuve.

-Ça ne risque pas ou vous pourrez m’appeler “Tie nevistbibuie” !
-Ha ha ! Très bien. Elle porte bien son nom, en tout cas.

Steshin partit rejoindre sa couche tant désirée dans la cale, espérant pouvoir attraper quelques uniao de sommeil malgré le fait que Sonse allait pointer le bout de son nez dans une unia ou deux.

Il a traversé la tempête avec le sourire du début jusqu’à la fin. Il aime le risque ce capitaine. Mais vu où l’on va c’est peut-être bien de ça dont on aura besoin pour revenir vivant.

* * *

Iad 41 de l’ère impériale, dix-neuvième dan de Grosta

Un premier dan passa tranquillement depuis la tempête, le ciel était désormais d’un bleu clair typique de cette période et le gel s’installait à l’extérieur. On ne voyait plus Kongeya à l’horizon et seuls l’inconnu accompagné de la solitude les attendaient maintenant.

-Toldaka, dites aux hommes de sortir bien couverts désormais. Et que ceux qui ne servent pas restent dans la cale au chaud.
-Ce sera fait, capitaine.

Toldaka fit le tour de ses adeptes sur le pont puis il descendit en-dessous de celui-ci pour continuer de distribuer la nouvelle instruction mais Steshin semblait l’attendre.

-Seigneur Steshin, avez-vous besoin de quelque chose ?

Il s’inclina avec le plus grand respect devant lui comme à son habitude.

-Haut maître, peux-tu me dire ce que c’est ?

Steshin désigna de la main une sorte de tabouret en bois amélioré si l’on peut dire ou défiguré, au choix. Il était ornementé de diverses babioles sans la moindre valeur pour la plupart, le tout tenant grâce à un filet, du fil de pêche et des hameçons.

-Je l’ai trouvé là, à l’avant de la cale en descendant.
-Les adeptes du culte ont voulu vous rendre hommage comme ils le pouvaient avec cela, seigneur Steshin. Dois-je réprimander les auteurs de cela ?
-Euh… Non. Je n’étais pas au courant, haut maître, voilà tout.

C’est gentil mais c’est laid. Vraiment laid.

-Très bien seigneur Steshin.
-Remercie les adeptes qui ont réalisé ça pour moi, haut maître.
-Comme vous le désirez, seigneur Steshin. Il seront ravis de savoir que cela vous a plu.

* * *

Iad 41 de l’ère impériale, vingtième dan de Grosta

-La rage est un moyen et non une fin, adeptes.

Steshin avait décidé de consacrer un peu de temps chaque dan à l’enseignement dans la cale devant les adorateurs emmitouflés de son culte. Il commençait en revoyant les fondamentaux de son dogme.

-Voyez ça comme un flot d’énergie vous traversant de la tête aux pieds et venant du plus profond de vos tripes. La véritable voie de la rage est de contrôler cette énergie pour atteindre un but et pas de se laisser dominer par elle.

Les cultistes l’écoutaient religieusement sans émettre le moindre bruit. On entendait les vagues frapper la coque au dehors.

Je ne sais pas s’ils m’écoutent ou s’ils sont morts de froid.

Il prit dans ses mains le grimoire contenant les enseignements impies du culte.

-Prenons par exemple l’introduction du livre que j’ai dicté au haut maître il y a fort longtemps.

* * *

La rage, la colère et la haine ne sont qu’une seule et même chose issue de la même origine. À l’état brut, il s’agit du sentiment le plus commun pour tout être ayant subit le vol, la brutalité et la souffrance. Mais ce sentiment est fluctuant, imprévisible et violent au point que seul, il ne permet pas de redresser les torts dont on a été victime. Cette rage bouillonnante a donné naissance à une nouvelle forme de magie permettant à ses adeptes d’employer cette colère à volonté et à n’importe quel instant. Ils peuvent ainsi redresser tous les torts qui leur sont faits à leur convenance sans plus jamais manquer de force.

* * *

J’ai l’impression que Toldaka a légèrement exagéré les propos du précédent Ravust. Je le vois mal s’exprimer comme ça. Ou c’était un lettré refoulé à ses uniao perdues.

Cette idée fit rire intérieurement Steshin. Il dû se reprendre rapidement pour assurer le reste de l’enseignement avec sérieux.

-Certes, la colère est quelque chose de naturel mais si vous oubliez pourquoi et d’où elle vient, vous n’arriverez à rien. D’où vient votre rage adeptes ?

Au bout d’un instant de flottement, l’une d’entre eux leva la main pour prendre la parole.

-Seigneur Steshin, des hommes du comte qui m’ont arraché mon bébé des bras avant de me déshonorer.
-Je ne sais quoi te dire… C’est quelque chose d’horrible, adepte…

Mince, quel est son nom déjà ? Gosy ? Je crois…

Une main se leva, Steshin bascula sur cet adepte rapidement pour ne pas laisser s’installer de moment de silence gênant.

-Seigneur Steshin, elle vient de ceux qui se prétendent bons et qui n’hésitent pas à nous marcher dessus.
-Il y a ça également…

D’autres mains se levèrent, toutes les mains se levèrent. Tous les adeptes avaient une raison d’être là et avaient quelque chose à ajouter.

-Seigneur Steshin, il y a aussi ceux qui nous écrasent d’impôts pour remplir leur gosier et nous on bouffe de la merde.
-Y a aussi les voisins qui jurent l’amitié et qui vous connaissent plus une fois qu’vous avez perdu votre affaire, seigneur Steshin.
-Ou quand le cap’taine d’la garde prend vot’ ‘tite fille adorée, seigneur Steshin.

Et ainsi de suite, ils racontèrent tout ce qui les avait amenés ici sans jamais entrer trop dans les détails mais ce fut suffisant pour Steshin qui eut un début de nausée. Les histoires sombrant davantage dans l’horreur au fur et à mesure que le temps s’écoulait.

-Merci d’avoir chacun partagé une partie de votre passé, adeptes. Même si c’est dur, gardez toujours en tête d’où vous vient cette rage qui vous tenaille. Repensez aux bêtes que vous aviez créées, elles erraient sans but, tuant et mutilant tout sur leur passage mais sans parvenir à effrayer le moindre paysan. Maintenant elles sont mortes sans raison et sans avoir pu se rapprocher de ce qui les avaient enragées à l’origine.

Steshin laissa passer quelques instants pour permettre à ses adeptes de bien comprendre ce qu’il essayait de leur expliquer.

Ce qu’ils haïssent en vérité, c’est l’empire dans son ensemble. Son fonctionnement, ses réalités contradictoires, son laxisme ponctuel.

-Si vous n’avez rien à ajouter adeptes, l’enseignement est terminé pour ce dan. Demain, nous aborderons les différentes manières de préparer un ragoût en pleine mer. Vous pouvez retourner à vos tâches.

Les cultistes se dispersèrent, certains montant sur le pont, d’autre allant se reposer les uns contre les autres pour conserver la chaleur et enfin certains prirent le temps de se recueillir face à l’autel construit en l’honneur de leur seigneur démon.

Mais ce n’est que l’arbre qui cache la forêt, avant l’empire tout cela existait et c’était peut-être même pire. La différence, c’est que maintenant il y a quelqu’un que l’on peut tenir pour responsable de tous les maux.

Le haut maître Avosy s’approcha d’un Steshin pensif sans se faire remarquer.

Le vrai problème est dans la nature de chacun. Et ça a pour conséquence qu’il peine à se faire respecter, cet empire. Il a dû beaucoup céder pour rebâtir le continent après autant de décennies de guerre continue. L’esclavage est interdit mais il fallait reconstruire certains territoires isolés sans argent dans les caisses, alors l’empire a fermé les yeux sur ça et maintenant il ne peut plus endiguer ça frontalement dans certaines régions au risque d’une révolte. Et c’est pareil pour…

-Seigneur Steshin ?
-Hum… Oui ? Haut maître ?
-Vous semblez pensif, seigneur Steshin. Y a-t-il un problème ?
-Non, haut maître. Je repensais aux dires des adeptes.
-À ce sujet, puis-je vous poser une question, seigneur Steshin ?
-Bien sûr, haut maître. Laquelle ?
-D’où vous vient votre propre rage, seigneur Steshin ?
-Celle d’origine ? Je ne sais plus, je me contentais d’errer jusqu’à notre rencontre, haut maître.
-Et maintenant, seigneur Steshin ?
-Après qu’on se soit séparés, haut maître, nous avons perdu la guerre. Depuis, je souhaite me venger de Glorst, de sa femme et de son héritage. Mais on ne peut pas abattre ce genre d’ennemi en errant et tuant tout ce qui bouge sur sa route.
-Je comprends mieux vos nouveaux enseignements, seigneur Steshin. Merci de partager votre sagesse avec nous, seigneur Steshin.

Toldaka s’inclina une nouvelle fois en signe de respect et de gratitude.

-Vous êtes mes adeptes, haut maître. C’est mon rôle.

* * *

Iad 41 de l’ère impériale, vingt-deuxième dan de Grosta

-Hé ! Steshin debout !
-Oh… Quoi Orokin ?

Oronay se tenait debout sur les marches menant au pont tout en s’appuyant contre une poutre.

-On voit les premiers signes de la Varvary au loin.
-D’accord… J’arrive.

Steshin se leva de sa couche et monta sur le pont précédé par le varvarish. Mesia était déjà sur le pont regardant au large, le sourire aux lèvres. Le ciel était toujours aussi clair et le vent gelait les poils de barbes et les sourcils.

Il ne m’a pas réprimandé pour une fois. Il doit être trop heureux pour ça cette fois. Ou peut-être que c’est ça son nom en fait. J’en m’en suis peut-être souvenu cette fois.

-Regarde Steshin, là bas !
-C’est quoi ?
-De la glace à la surface de l’eau.
-On dirait un îlot couvert de neige d’ici.
-Non, c’est bien de la glace.
-Pas mal mais je n’arrive pas à savoir si c’est gros ou pas.
-Vu la distance, ce glaçon est de taille moyenne. À peu près la moitié du “Tie bastastkinol’sereo” . Vous en dites quoi capitaine ?
-C’est à peu près ça !

Borshia se rapprocha nonchalamment des deux compagnons de route, il avait l’air de bonne humeur.

Orokin est heureux comme un enfant retrouvant sa mère après un dan de petit labeur. Même les varvarisho sont capables d’aimer leur terre natale visiblement. Aussi impitoyable soit elle.

-Vous voyez ce truc Steshin ? C’est pour ça qu’il faut faire vite. Il va y en avoir de plus en plus.
-Ils sont dangereux à quel point, capitaine ?
-On aura pas de seconde chance si on en percute un.
-Je vois.
-Même la mer sera gelée. D’ailleurs nous d’vrons peut-être faire un détour sur le retour.
-Bien capitaine. Faites de votre mieux et pas de risques inutiles.

La remarque de Steshin provoqua un rire franc chez Borshia “tie Magsarnist” .

-Vous en faites pas pour ça. Nous arriverons demain dans la matinée normalement. On va ralentir l’allure lorsque Sonse se couchera à cause du manque de visibilité malgré la pleine Mona approchant.

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