L’accident

3 mins

Luttant contre la somnolence, je me trouvais assis sur la banquette inconfortable du Pilatus.
Je fus ramené à la réalité par une secousse. L’avion venait de ralentir. Il s’était aligné sur l’axe de largage, au-dessus de la drop-zone. Rajustant mes lunettes de saut, j’aperçus, à l’avant de l’appareil, le chef d’avion donnant le signal d’ouverture de la porte.
L’ensemble des parachutistes vérifièrent leurs équipements.
L’un d’entre eux ouvrit la porte, qui coulissa vers l’arrière de l’aéronef. Un vent frais s’engouffra dans l’habitacle et acheva de me réveiller.
Après avoir contrôlé le bon état de mon altimètre à mon poignet, je vis le chef d’avion relayant le signal de saut du pilote.
Un de mes camarades disparut alors dans le vide.
M’avançant à mon tour vers l’ouverture, un mouvement brusque dans le cockpit attira mon attention. En me retournant, j’aperçus une gigantesque ombre à travers la verrière latérale du fuselage.
Un autre appareil.    
Un bruit sourd retenti et je fus brusquement projeté à travers l’ouverture de l’avion.
Le souffle coupé, j’essayais de reprendre mes esprits.
Le vent me griffant le visage, enfin je réalisais que j’étais en chute libre, désorienté par une vrille incontrôlée.
De nouveau lucide, j’orientais mon buste vers l’avant, stabilisant ma position.
Ayant enfin un visuel sur le sol, je vérifiais mon altitude.
3200 m.
Essayant de comprendre ce qui s’était passé, je me positionnais sur le dos, cherchant à distinguer les autres parachutistes.
Avec effroi, je n’en vis aucun.
A leur place, une masse métallique enflammée, entourée de débris, dérivait dans le ciel crépusculaire.
Il s’agissait du Pilatus. L’avion était entré en collision avec un autre aéronef. Ils avaient tous les deux explosé en vol.
Le souffle de la combustion du kérosène m’ayant propulsé hors de l’avion, je tâtais mon parachute dans mon dos, espérant qu’il soit intact.
En me repositionnant sur le ventre, posé sur un coussin d’air, je vérifiais à nouveau l’altimètre.
2100 m.
Je décidais d’actionner la poignée d’ouverture de ma voile principale.
Je senti le sac s’ouvrir dans mon dos me retrouvant en position verticale. Ma chute ne ralenti que faiblement.
Cherchant du regard ma voile, je vis un ensemble de suspentes et de tissus flottant de manière désordonnée. La voile avait brulé.
Instinctivement, je libérais ce qui restait de ma voilure principale. Repartant en chute libre, je regardais une fois de plus mon altimètre.
900 m.
Le sol sous mes yeux se rapprochait dangereusement. J’actionnais alors les commandes de ma voile de secours, espérant qu’elle n’ait pas trop souffert de l’explosion.
Enfin je senti le choc du ralentissement d’ouverture.
Passant de 180 km/h à 20 km/h, je repris mes esprits quelques secondes.
Quelque chose n’allait pas.
J’étais entré en rotation incontrôlée sur la gauche.
Saisissant les commandes de cette seconde voile, je me décidais à jeter un œil au-dessus de ma tête.
A travers la toile, je pouvais distinguer en plusieurs points le ciel sombre.
Le feu n’avait causé que quelques trous. En revanche, l’un des élévateurs, à l’origine de la rotation, était sectionné.
Vérifiant mon l’altitude, je regardais mon poignet.
400 m.
Il me restait peu de temps pour agir. Une seule solution se présentait à moi. Il me suffisait de tirer sur l’une des commandes pour rééquilibrer la voile.
Tractionnant de toutes mes forces, la rotation finit par se stabiliser. Je décrivais maintenant de larges cercles.
Je devais maintenir la pression jusqu’à mon atterrissage.
Regardant en dessous de moi, je constatais que j’étais hors zone. Dans la pénombre, je distinguais des champs et des bois.
N’étant plus qu’à une centaine de mètre du sol, je repérais un bosquet d’arbre.
Tirant déjà sur ma commande, je redoublais d’effort pour m’orienter vers un bosquet d’arbre, dans le but d’atténuer le choc au contact du sol.
25 m.
Distinguant les détails du sol, ce dernier sembla se précipiter à ma rencontre.
J’étais hors de danger. Au pire des cas, je ne risquais que quelques os brisés.
10 m.
J’atteignais la cime des chênes, ma vision fut saturée de feuille et de branchage.
Déverrouillant mes genoux, tête en avant, j’étais paré à réceptionner le sol.
Je sentis un choc sur mon harnais.
Les branches avaient bloqué ma voilure, je me trouvais suspendu à seulement quelques mètres au-dessus du sol.
Je ne pus m’empêcher de crier de joie. J’étais en vie.
Cette victoire sur le vide du ciel fut éclipsée par une intense douleur sur mon flanc droit.
Ma combinaison était humide. Je m’aperçus qu’un morceau de métal dépassait de mon ventre.
L’adrénaline provoquée par ma chute avait masqué le ressenti de la blessure.
Il s’agissait d’un éclat de l’explosion du réservoir du Pilatus.
Je pensais soudainement aux autres chuteurs, j’espérais qu’ils aient eu autant de chance que moi.
Essayant de comprimer la plaie sanguinolente, je perdis connaissance.

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