Écriture dangereuse tome 1

4 mins

Au vu des circonstances, le directeur libéra les élèves pour la journée. Marie, suivie d’Amélie, se dirigea vers l’arrêt de bus d’un pas lent. Ses pensées se mélangeaient dans sa tête. Que s’était-il passé ? Pourquoi cela devait-il arriver juste au moment où elle s’était mise à lire son histoire ? Toutes ces années d’entraînements, de sacrifices soldés par un échec cuisant! Du moins c’est ce qu’elle ressentait. Amélie, sentant que son amie n’allait pas bien, la prit par les épaules et tenta de la consoler. -Ne t’en fais pas Marie. Je suis sûre que le concours sera reporté et que tu pourras de nouveau présenter ton histoire. Et ce jour-là, on fêtera ta victoire! Marie sourit faiblement quand elle remarqua monsieur Vittorio qui faisait traverser les élèves de la maternelle vers le car scolaire. Elle traversa pour le rejoindre mais fut coupée dans son élan quand une voiture faillit la percuter. La femme au volant, le visage décomposé, se mit à lui crier dessus et reparti, tremblante vers le centre-ville.

-Marie, enfin, fait attention! Tu as failli te faire renverser, lui cria Amélie.

Mais Marie cherchait des yeux monsieur Vittorio et le vit installé à l’intérieur du car qui s’éloignait pour raccompagner les bambins chez eux. Elle rejoignit Amélie et elles allèrent se poster à l’arrêt du bus. Assise sur un banc, son amie la regardait avec inquiétude. Marie, de son coté, était plongée dans ses pensées. Silencieuse, elle repensa au rêve qu’elle avait de nouveau fait et à cette vieille femme qui la mettait en garde. Elle ne savait pas quoi penser de tout ça. Était-ce pour la prévenir de ce qui était arrivé aujourd’hui ? Pourquoi venir la voir elle et non ce garçon dans ce cas ? Le trajet se passa dans le calme et les filles arrivèrent à destination. Sortant lentement du bus, les filles se dirigèrent vers la maison de Marie et entrèrent par la porte de la cuisine. La mère de Marie, Evelyne, était occupée à préparer des cookies qu’elle devait apporter pour le dîner de la paroisse Notre Dame des Grâces qui se déroulait le soir même et la pâtisserie embaumait la pièce d’un doux parfum de chocolat fondu. Marie et Amélie prirent placent à la table de la cuisine et Evelyne se retourna sur sa fille et son amie pour leur demander pourquoi elles étaient déjà de retour. Les filles lui expliquèrent l’incident à l’école et la mère de Marie les écouta avec une certaine inquiétude. Surtout lorsque Marie lui précisa que l’accident s’était produit au moment précis où elle avait commencé à lire sa prose. Elles lui racontèrent également le rêve étrange que Marie avait fait à deux reprises et décrivirent la vieille femme qui la prévenait d’un danger imminent. Evelyne écouta sa fille attentivement et son embarras n’échappa pas à Marie. Elle se mit à questionner sa mère sur les raisons qui pourraient expliquer de tels événements. Sa mère fut sur le point de lui répondre quand Arturo, le père de Marie, entra dans la pièce en sifflotant. Il travaillait dans l’immobilier et avait fait visiter une belle maison à un jeune couple le matin même. Comme la vente avait été conclue rapidement, il avait pu revenir plus tôt à la maison.

Il embrassa sa femme et se tourna vers Marie et son amie. – Salut les filles! Déjà de retour ? Marie et Amélie répétèrent l’histoire du collège et le sourire de son père, tout en les écoutant, s’amenuisa. Il avait l’air pensif mais quand il sentit le regard des filles sur lui, il retrouva le sourire et leur répondit que le jeune garçon devait être épileptique et qu’il avait certainement dû faire une crise. Il tenta de les rassurer en leur assurant que le jeune homme s’en remettrait certainement. Regardant sa femme, il conseilla aux filles d’aller faire leurs devoirs dans la chambre de Marie. Les filles montèrent donc à l’étage et entrèrent dans la chambre, en laissant la porte entrouverte. Marie soupçonnait que ses parents en savaient certainement plus que ce qu’ils voulaient lui faire croire. Elle demanda donc à Amélie de faire un peu de bruit pour donner l’illusion qu’elles s’installaient au bureau pour leurs devoirs, et elle resta postée à l’entrée de sa chambre, tendant l’oreille pour savoir si ses parents allaient dire quelque chose qui lui permettrait de la mettre sur une piste.

Arturo écouta un instant à l’entrée des escaliers et, entendant la chaise du bureau glisser sur le plancher de la chambre de sa fille ainsi que le bruit d’une tirette qui lui indiquait qu’elle ouvrait son sac d’école, se dirigea vers sa femme, la mine assombrie. Evelyne, paniquée, lui demanda : – Comment cela a-t-il pu arriver ? Je pensais que tu t’étais occupé des activités extrascolaires. Comment as-tu pu la laisser s’inscrire dans un groupe d’écriture ? Tu connaissais les risques! Tu savais que c’était dangereux avec cette malédiction qui pèse sur notre famille! Les mots ont un pouvoir dangereux, surtout dans notre cas. Qu’allons-nous faire maintenant ? Le père resta silencieux un moment, puis il prit son téléphone, composa un numéro et attendit. -Qui appelles-tu ? lui demanda Evelyne. Arturo leva la main pour l’interrompre et tomba sur la messagerie de son correspondant. Il laissa un message dans une langue que Marie ne comprit pas, malgré les nombreuses langues apprises à l’école et entendit son père raccrocher.

-Alors ? dit Evelyne. Arturo la regarda d’un air grave et lui dit : -Laisse-moi m’occuper de ça, chérie. On trouvera une solution. Tout se passera bien. Sur ce, il quitta la pièce, alla dans le grenier et en descendit muni d’un vieux coffret en bois gravé de symboles bizarres, le mit dans un sac et sortit de la maison. Marie se dirigea à la fenêtre de sa chambre et vit son père s’éloigner dans sa voiture en direction de la sortie de la ville. 

Sans faire de bruit, Marie alla refermer la porte de sa chambre et se retourna sur son amie qui la regardait avec un air ébahi. -Qu’est-ce que cela veut dire, Marie ? De quoi parlaient tes parents ? Une malédiction ! Je n’y comprends rien. Marie garda le silence un instant puis se retourna sur Amélie et lui dit : – Je ne sais pas mais je compte bien le découvrir. Mon père est monté dans le grenier pour la première fois depuis que nous avons emménagé. Il ne l’avait jamais fait avant, il déteste les greniers. D’ailleurs, je n’ai pas le droit d’y aller non plus. Mais j’ai bien l’intention de le découvrir. Ce soir, quand mes parents iront à la paroisse, on montera au grenier et on essayera de trouver des indices. Ils savent ce qu’il se passe mais il me le cache et je veux découvrir pourquoi.

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