D1
Nous continuions notre chemin. Les chasseurs de trésor ne nous avaient pas dit clairement où nous allions ensuite. Je supposais qu’on retournait à la demeure de Rem pour se reposer. Nous guérissions nos légères blessures tout au long de la marche parcourue. Pansant nos plaies et discutant peu ou sur des choses banales et édulcorées. Plus j’avançais, plus un vide se creusait en moi. J’avais une fatigue et une fringale énormes. L’eau était abondante mais la nourriture venait à manquer surtout pour moi qui avait un grand appétit. Je me restreignais. Si cela continuait, j’allais manger cet esprit qui était semblable à un chevreuil, ce Ratoon Lucky. Je me demandais quel goût cela aurait et si c’était vraiment nourrissant un esprit. C’était certainement que de l’air. J’abandonnais tout de suite mes pérégrinations qui n’avaient aucun sens. C’était la faim qui me dictait ses pensées là. J’ oublia bien vite ma faim surtout qu’au détour d’un chemin, on rencontra quelqu‘un. Une personne bien mystérieuse qui avait l’air de sortir d’un pays exotique et lointain que je ne connaissais pas. Elle avait une tenue légère et toute blanche inadaptée pour cette jungle totalement verdoyante. Cela la rendait très visible dans ce milieu. Pas très discret si on voulait ne pas se faire remarquer.
On était tous sur nos gardes. Elle avait une apparence inoffensive mais on ne savait jamais. Elle aurait pu être dangereuse. Je me demandais si elle nous avait vu. En tout cas, nous, on l’avait observé quelques temps à l’abri d’un arbre. Elle n’était en rien dangereuse. Au contraire, on avait la sensation que c’était un oisillon qu’on devait protéger. Le premier qui avança vers elle fut Pounce. Il la scrutais bizarrement, encore plus que nous.
– Bonjour, la salua-t-il d’une voix enjôleuse.
Elle le regarda brièvement, ne disant toujours. Elle avait l’air perdue et un peu apeurée.
– Qu’est-ce qu’une belle fille comme toi fait dans cette jungle sinistre ? Ce n’est pas un endroit pour les jolies filles, disait-il tout en clignant d’un œil aguicheur.
Je rêvais ou il la draguait. Je ne connaissais pas ce pendant de sa personnalité. J’étais surpris.
Elle ne répondit toujours rien. A peine ouvra-t-elle la bouche quelques secondes. L’air encore plus triste. Visiblement sa drague ne fonctionnait pas. Il changea alors de tactique d’approche.
– Si tu es perdue, nous pouvons t’aider, parla-t-il avec un ton protecteur et un peu plus rauque que sa voix habituelle.
Dès le dernier mot de sa phrase, un torrent de larmes se déversa de ses beaux yeux couleur miel ambrée, comme sa peau. C’était une beauté exotique. Seules quelques mèches roses foncés étaient présents étrangement dans ses cheveux couleur sable du désert. C’était peut-être de là où elle venait. Du désert.
Ses pleurs durèrent quelques minutes puis elle dit :
– En effet, je ne sais plus où je suis. Je suis partie d’un pays très lointain: Sevesta et j’ai fait un long voyage.
– Je connais ce pays. Tu as été bien courageuse pour faire tant de chemin mais c’est certainement dans un but précis, demanda avec bienveillance Pounce.
Elle hésitait. Elle se dit qu’elle pouvait bien lui faire confiance, il était gentil, par conséquent :
– Je suis venu chercher la couronne du roi des djinns. C’est important, je dois la retrouver ! ponctua-t-elle, déterminé. On sentait le sentiment d’urgence.
Il était étonné. C’était un objet légendaire que personne n’avait vu jusqu’à présent. On ne savait pas quels pouvoirs il renfermait. Il n’y avait qu’une vague histoire d’êtres extraordinaires là dedans. On se demandait même si ce n’était pas qu’un mythe.
– Je ne sais pas exactement où il se situe. Il paraît que sa localisation est sur le territoire ouest, à la frontière entre ce pays, Enventure, et le Royaume des Fleurs.
– Viens Pounce. Maintenant qu’elle a eu son information, nous pouvons partir, dicta Rem.
Cela provoqua une nouvelle vague de larmes. C’était d’une insensibilité totale, même pour lui. Faire pleurer d’aussi jolis yeux était presque un crime.
– Je vous en prie ! Je ne saurais pas comment faire pour trouver cette couronne. Si des gens comme vous qui avaient l’air si expérimenté ne savent pas où elle est précisément, comment je m’en ressortirais moi toute seule ? pleurnicha-t-elle.
Ce qui nous toucha en plein cœur. Tous sauf Rem.
– Tu es assez grande pour te débrouiller par toi-même. Nous ne voulons pas être tes chaperons…
On le bâillonna de la main pour qu’il ne puisse pas continuer de dire des méchancetés pareilles.
– Qu’est-ce qu’il dit comme bêtises des fois. Ce Rem alors!? ria jaune Pounce tout en le sciant du regard.
Cela le calma pour un moment. Plus aucune parole ne sortit de sa bouche. Cela facilita la discussion.
– Je pense que nous pouvons l’emmener. Il n’y a pas de soucis. Hein, Pounce ? questionnais je.
– Oui, bien sûr. Avec grand plaisir. Nous ne pouvons pas laisser une fille aussi charmante que toi vagabonder sans savoir la direction où elle va précisément, la courtisa-t-il de nouveau.
A peine nous avions terminer une quête que nous commencions tout de suite une autre. Le ventre à moitié vide pour certains. Je me plaignis :
– Par contre, nous n’avons pas assez de nourriture. Comment nous allons faire ?
– Ce n’est pas un problème. Nous pouvons nous faire livrer de la nourriture par De Liver, cousin d’Ambris, vu au palais de Rem, qui a le même pouvoir que lui mais est dans la livraison multiservices. Par contre il en faudra deux fois plus, vu que ce que tu manges et notre nouvelle invité.
– Non mais je ne manges pas tant que ça.
Il me regarda d’un air sceptique à la fin de ma phrase.
– Bon c’est vrai que j’ai un gros appétit, avouais je honteusement devant la demoiselle.
Cette question réglé, nous nous mîmes en marche.
Je n’ai pas besoin de vous faire le topo. La même jungle quoique plus clairsemée que dans mon souvenir. Ah non, c’était vrai qu’on allait à l’ouest du pays. Le lieu où était le portail était donc différent. C’était pour cela que le portail était plus grand et lumineux, se trouvant dans une clairière dégagée. J’avais l’habitude maintenant, je le traversai avec moins d’appréhension. Pounce aidait Djennyma.
Cette beauté du désert s’appelait comme ça. En tout cas, le nom était très beau mais difficile à prononcer.
– Tu ne veux pas qu’on te surnomme Jenny plutôt ? Cela sera plus facile pour se parler.
– D’accord, pas de soucis. Sa joie illuminant son visage. Elle était encore plus belle comme ça. Tant mieux, son surnom lui plaisait bien. Je voyais aussi que quelqu’un avait remarqué sa beauté. Pounce. Il l’aimait bien. Quand je lui en fis part, il répondit par la négative et détourna la tête vivement pour ne pas que je voies qu’il rougissait.
D2
Nous étions en haut du plateau tout à l’ouest du pays. Contrairement à ce que j’avais vu avant, le paysage était invariablement différent. D’immenses falaises nous encerclaient et formaient un grand canyon.
– Ce coin est assez mystérieux. On le surnomme la vallée des Maures. Un peuple antique à ce qu’il paraît. On aurait dû la nommer la vallée des Morts car il y a eu de nombreuses disparitions inexplicables ici.
– Ah oui ? Cela ne me rassure pas du tout.
Cela aiguisait en même temps ma curiosité et ma peur. Un peu plus cette dernière car le soleil commençait à se coucher et la nuit allait venir sous peu. Je n’aimais pas trop l’obscurité. De mauvais souvenirs, c’est vrai.
La fois où on était tombé de très haut dans le noir complet. Je n’avais pas trop aimé cela. Rem reprit :
– C’est peut-être dû à ces canyons qui forment comme un labyrinthe. Ils ont dû se perdre à jamais.
– Mais ne t’en fais pas, nous sommes là. Pas de soucis.
Pounce voulait nous réconforter Shrin et moi mais surtout Jenny. C’est ce que je pensais. Mon petit doigt me l’avait dit et c’était son attitude équivoque surtout. Il la dévorait des yeux. Cela se voyait comme le nez au milieu de la figure.
Nous déambulions depuis un certain temps. Cet endroit était vraiment tortueux et labyrinthique. On ne s’y retrouverait jamais. Comment on allait faire ?
– Regardez tout en haut sur la falaise il y a comme un symbole, il me semble, nota Jenny.
En effet, il y avait une trace à l’endroit où elle pointait son doigt quoique je ne savais pas ce que c’était. Peut-être que Pounce verrait mieux avec l’ultrasens. Il dit :
– Cela ressemble à une couronne surmontée de trois vagues allant de bas en haut. Cela pourrait être lié à la relique que nous cherchons.
Il scruta les alentours à la recherche d’un même symbole et il le vit, il était quelques mètres plus loin. Plus nous avancions, plus ce symbole indiquait un chemin et nous guidait vers je ne sais quel lieu.
Le sigle n’était pas si visible. Cependant, plus on le voyait plus il le devenait. Comme si il aimantait notre regard vers lui. Je me demandais comment.
– D’ailleurs, comment l’as-tu repéré en pleine nuit, Jenny ? Alors que moi-même je n’y vois goutte.
– C’est simplement que j’ai vu comme un éclat ! Puis je m’étais dit: c’est le symbole du roi des djinns !
Quelque chose sur la falaise avait brillé sous le clair de lune comme si c’était phosphorescent.
Je l’apercevais à présent. C’était cette légère lueur dans la nuit qui aiguisait ma vision vers ce sigle.
– Les autres ont bien dû le voir. Pourquoi nous spécifiquement ? doutant de ce qu’on avait vu.
– A cause de l’endroit où nous sommes, banane, m’insulta Rem. Ce lieu est réputé maudit suite aux nombreuses disparitions. Même si les chercheurs de trésors aiment vadrouiller la nuit parce qu’ils sont plus tranquilles. Beaucoup ont les liquettes quand une personne leur demande de faire une quête ici la nuit.
Cela expliquait tout. C’était pour cela que tout le monde s’était perdu. Il n’avait pas vu la piste puisqu’ils y allaient de jour.
– De plus, je ne t’ai pas dit. Dès le début, on racontait qu’un monstre déambulait dans ces lieux. Il dévorait les tout petits et gentils aventuriers. C’est une histoire qu’on raconte au coin du feu mais qui peut être véritable. Alors fais attention là où tu vas, nargua-t-il avec un soupçon de mystère.
Cela me foutait la frousse, ce qu’il me disait là. Shrin et Jenny étaient aussi peu rassurés que moi. La belle jeune femme se serra tout contre Pounce qui ne disait pas non, au contraire, il en redemandait.
C’était un vrai vicieux tout compte fait. J’hallucinais ou il bavait. J’étais dans une moins bonne situation que lui. J’aurais aimé que ce grand colosse de Shrin ne se serre pas autant contre moi pour se rassurer. Il m’écrasait de toute sa masse et c’était un peu gênant d’être aussi proches l’un de l’autre dans ce lieu.
– Il dit des conneries comme toujours. C’est totalement faux. C’est l’autre Bazyr, le pochetron qui l’avait inventé pour se faire des sous pour se saouler.
Rem resta impassible. Pounce aussi en racontant cela. On ne savait qui croire. Le blond aux yeux bleus était rude mais était il un vrai salaud pour nous provoquer de terribles sueurs froides ? J’allais répondre que oui quand un bruit se fit entendre comme une lamentation ou un gémissement guttural. Dans la nuit profonde et noire, cela ne ressemblait pas au cri d’un animal connu mais d’un démon sorti des enfers. Je m’immobilisai un instant très long qui me sembla une éternité comme si le fait de ne pas bouger allait dissuader toute attaque de la bête qui se cachait n’importe où. Toujours au bras de Jenny, Pounce m’encouragea vivement:
– Allez viens ! Cela ne doit être que le souffle du vent entre les falaises, cela arrive souvent dans ces lieux.
Ce n’était pas lui qui flippait sa race. Obtempérant, je restai prostré derrière. N’avançant qu’à pas prudents. Les suivant d’assez près pour ne pas les perdre. Tout seul, je n’aurais aucune chance si jamais quelque chose m’agressait dans le noir.
Tout d’un coup une forme indistincte se jeta sur moi et je me débattis. J’étais encore plus embrouillé, une peur folle s’emparait de moi. J’étais la proie d’une affreuse bête en chasse qui allait me dévorer avant même que je ne me rendes compte de la douleur de la morsure de ses crocs tranchants comme des poignards. J’agitais les mains follement pour me défendre mais déjà je voyais la vie m’ être ôté. Non surtout pas ça ! Je ne voulais pas mourir.
– Calme toi ! Calme toi ! Mais tu vas te calmer espèce d’abruti. Quelqu’un m’insulta violemment.
Je reconnaissais ce ton rêche. C’était Rem. Je n’étais donc pas en danger de mort. Tout allait bien. Je rouvris les yeux difficilement comme si ils avaient été frotté au papier de verre. Je le regarda fixement.
– Qu’est-ce qui t’as pris ? Tu as paniqué ou quoi ? C’est ma sotte histoire qui t’as fait peur?
Je hochais trois fois de la tête d’un signe affirmatif à toutes ces questions tout en tremblotant.
– Excuse moi de te dire que tout cela est faux. Pounce a dit la vérité. C’est cette saleté de Bazyr qui l’a inventé une fois au coin du feu lors de veillées. Ce que t’as cru être un monstre est Shrin, te tombant dessus suite à un énorme coup de vent balayant la poussière du sol et nous aveuglant. Cela a déséquilibré le géant et il t’a écrasé de toute sa masse.
– Ah oui ? Désolé de te dire que c’est toi qui m’as foutu la pétoche avec ton histoire. Tu sais bien que je suis un peu froussard sur les bords.
– Tu es surtout crédule pour croire une histoire pareille que même un enfant aurait du mal à admettre. Le plus étonnant dans cela est que tu aies survécu à l’énorme poids de Shrin. Il ne t’a pas aplati comme une crêpe.
– Non puisque je suis là. Debout et en pleine forme. Pour ne pas voir ça, il faut que tu aies encore une sacrée couche de poussière dans les yeux, me moquais je gentiment.
Il allait répliquer quelque chose mais abandonna. C’est vrai que c’était surprenant. Comment j’avais pu survivre à cela sans la moindre blessure ? Moi qui était d’une constitution assez fine par rapport à lui. Je regardais mes mains. De nouveau ces griffes de verre. Serait-ce lié à ces griffes ? Mystère.
Je fis mes plates excuses à Shrin qui n’avait pas mérité cela. Son espèce de cape avec capuche avait quelques petites entailles. Il me dit que ce n’était rien et que c’était normal d’avoir peur. Cela faisait partie de l’être humain. Fondamentale comme la terre que nous avons sous nos pieds et le pain bénit que nous mangeons au quotidien. Il me raconta un truc comme cela, comme seul Shrin pouvait le faire. Et ce n’est pas un grand costaud comme moi qui va se faire entailler la couenne par un chétif comme toi, rajouta-t-il plus gaillardement. C’était plus compréhensible ce qu’il me dit là, plus terre à terre. Une fois ma frayeur passée, nous reprîmes notre chemin. On était bientôt à la fin de ces symboles. Je le sentais. La fin de la piste.
D3
Plus aucun signe nulle part et rien à l’horizon. Ne serions nous pas trompés de route ? Non, c’était impossible. Il y avait cet indice qui nous menait à cet endroit précis. Il n’y avait pas grand-chose à part un arbre rabougri qui avait perdu ses feuilles depuis longtemps et un énorme rocher tout à droite.
– J’ai l’impression qu’il y a quelque chose derrière cette grosse pierre, notais je.
– Oui, j’ai bien l’impression que ce doit être un passage souterrain comme une grotte, confirma Pounce. Tu penses qu’on pourrait déplacer ce roc.
Il lança un regard en coin à Rem.
– Cela me semble difficile à réaliser.
– Je peux vous aider, intervint Shrin. Mon ombre se déplace facilement et peut servir de levier pour soulever le rocher. Avec votre aide, c’est possible.
– C’est vrai que ton ombre est comme vivante et peut se bouger indépendamment de ta personne. Tu peux presque tout faire avec. C’est une bonne solution. Hein les gars ? Je repris du poil de la bête.
– Alors, allons-y pendant qu’on y est, dit Pounce.
L‘ombre leva le rocher petit à petit, aidée par Rem qui avait enveloppé le roc avec sa magie pour réduire le frottement à l’air et au sol et par Pounce qui avait appelé Séphyra pour les aider avec sa force du vent. Il roulait progressivement et dégageait l’entrée d’une caverne ténébreuse où on ne voyait rien d’ici.
Nous entrâmes prudemment dans la cavité. On ne savait pas qu’il nous attendait.
C’était un endroit assez énigmatique. De chaque côté de la salle était disposé des statues humanoïdes étranges, peut-être des djinns, dans des positions ridicules. Un roi sur le trône et autres. On aurait dit plus un palais qu’une grotte. Une porte se profilait plus loin au fond de cette pièce. Il n’y avait pas encore de piège, c’est ce que nous vérifiâmes. Une fois devant, nous découvrîmes que l’issue était fermée et qu’une empreinte palmaire était présente juste au centre. Il y avait une logique dans cela, mais laquelle. Qui devait mettre la main dans cette stupide encoche ? Je ne comprenais pas.
– Que devons nous faire pour ouvrir cette porte ?
– Nous devons juste apposer la main dans l’empreinte et je pense savoir laquelle, indiqua-t-elle fièrement tout en faisant ce qu’elle avait dit.
Il ne passa rien pendant un certain temps puis la porte s’ouvrit et on put entrer.
– Comment as-tu fait ? Qui es-tu en fait ? se méfia pour la première fois Pounce. Il ne la connaissait pas vraiment. Avait-il été trop confiant ?
– Je suis un djinn, je veux récupérer la couronne de mon roi et la lui donner. On lui a volé il y a longtemps en le trompant honteusement avec ruse !!
Il était sceptique. Il ne savait pas s’il devait la croire.
– Seul un djinn pouvait ouvrir cette porte. Nous sommes là pour trouver la couronne du roi des djinns. C’est dans la logique même, décocha-t-elle enfin.
– C’est vrai. Pour l’instant je te crois, médita-t-il.
– Par contre, en apposant ma main, j’ai certainement enclenché des pièges. Pas la peine de vous plaindre. Si nous avions détruit la porte, cela aurait eu le même effet. Le voleur de couronne était un grand ennemi de notre roi, il le jalousait et était d’une intelligence rare.
– Devons nous nous attendre à des pièges compliqués?
– Les plus compliqués sont souvent les plus simples.
Rem faisait attention à elle. Il s’était montré hostile envers elle dès le départ. A cet instant, encore plus. Elle n’avait pas tout dit. C‘était plausible. Il devait rester sur ses gardes. Moi, je ne voyais pas pourquoi. Elle défendait une noble cause. Je l’aimais bien et pas que moi. J’étais intrigué par son attitude. Elle demeurait bien secrète, cette fille. De toute façon, on avait bien autre chose que ça à penser. Il y avait évidemment des embûches sur le chemin et on allait devoir les affronter.
Après qu’on passa la porte, on aperçut une salle remplie de suites de colonnes serrées, espacées de deux mètres et présentes dans tout le volume. C’était tellement encombré qu’on ne pouvait pas mesurer les dimensions de l’énorme pièce au haut plafond. Cela faisait comme des allées sombres et sans aucune visibilité quelques mètres en avant. C’était comme si l’espace était infini.
– Comment allons nous trouver le bon chemin dans ce labyrinthe de colonnes ? Désespérais je.
Elle nous expliqua le contexte dans lequel nous allions évolué et la difficulté de le résoudre:
– Celui qui a construit cet édifice était astucieux et malin. Nous devons penser comme lui. Autrement, nous n’y arriverons pas, affirma-t-elle.
C’était assez difficile de se mettre dans la peau d’un gars qu’on ne connaissait pas. C’était déjà assez compliqué d’être dans la mienne. En tout cas, si l’homme avait été si intelligent, cela ne devait pas être si évident que cela. Déjà que la découverte du chemin menant à ce lieu était un miracle. Cette histoire était bien obscure. On ne devinait rien. C’est ça. Il y avait peu de visibilité. C’est qu’on devait le sentir. Je tâta les colonnes avec délicatesse sous les yeux de mes comparses. Ils se demandaient ce que je faisais.
– Que peut-on faire pour se repérer dans la semi obscurité quand on n’y voit rien? les interrogeai je.
Ils avaient enfin compris ce que je voulais dire.
– On peut essayer de toucher des objets pour se guider.
Ils dirent ce que j’avais pensé à l’unisson tout en touchant le grain de la pierre des colonnes. Il y avait sûrement quelque chose à sentir dans la matière.
– Voilà j’ai deviné quelque chose dans la roche. Une forme indistincte de couronne surmontée de trois vagues formant comme un souffle, arrondis à la fin.
– Moi aussi. Il y a une petite différence, la couronne est inversée, les pointes en bas par rapport à l’original.
Shrin et Pounce avait découvert des fausses pistes gravés légèrement dans le roc pour nous égarer. Il allait falloir se montrer prudent sinon on pourrait se tromper facilement de chemin.
– J’ai le bon symbole avec la couronne et trois vagues bien formées dessus, s’enthousiasma Jenny la djinn.
Nous l’effleurâmes. Conséquemment, c’était le bon.
Nous avançâmes à tâtons dans le clair obscur, prenant garde au symbole pour nous montrer la route et à être proches pour ne pas nous perdre.
D4
Nous avions traversé la totalité de la salle aux milles colonnes et étions face à une arche qui donnait sur une autre pièce pleine de possibles chausse-trappes. Il n’y avait rien qu’un sol et des murs mais on ne savait jamais. Tomber dans un trou, cela arrive souvent. C’était très longiforme. Le fond était invisible à nos yeux, plongé dans le noir. Nous progressâmes avec attention, se demandant ce qu’il allait nous arriver. Toujours rien. Il n’y avait pas de problèmes. Mètre par mètre, nous allions tranquillement en avant sans qu’aucun évènement se passe. Le parcours était un peu trop calme et on faisait du surplace, j’en étais sûr et certain. Quelque chose n’allait pas.
– Tu as senti comme nous ? C’est comme si on était resté au même endroit tout du long, confirma Pounce.
– Il doit y avoir de la magie là dessous. Tu penses qu’un sort de terre pourrait faire se bouger le sol constamment depuis ce temps, remarqua Rem.
– Lorsqu’ils ont construit cette fondation, je pense qu’ils ont installé une source d’énergie magique pour activer ce piège et bloquer les rares intrus.
– C’est certain mais comment allons nous faire, on sait où est cette source ? lui posais je cette question.
– Non. Nonobstant j’ai une solution. Nous allons faire de l’escalade. Pounce avait dit ça comme si c’était normal. J’étais dans un brouillard complet. Qu’est-ce qu’il voulait signifier par «escalade» ?
Il demanda à Rem s’il avait encore le matériel pour la montagne, il répondit que oui, aussi perdu que moi.
-Nous allons éviter le sol en montant aux murs.
– Tu en es sûr ? La magie ne s’applique pas également aux murs. Les fondateurs de ce lieu auraient été imprudents de ne faire que le sol.
– Cela m’étonnerait. Une grande quantité de magie est requise pour ce sort. Même si ils utilisent un artefact magique puissant, ils ne peuvent pas faire se déplacer simultanément le sol, le plafond et les murs, conta Pounce tout en plantant deux pitons dans la pierre. Un à quelques mètres au dessus du sol et l’autre au dessus de lui. Après ceci, il reprit sa diatribe :
– De plus, ils ont dû forcément laisser un moyen de sortir de cette pièce. Que ce soit pour eux ou les ouvriers. Je penche pour les murs, c’est le plus logique. Je pense que le plafond avance en même temps que le sol recule. C’est tout.
Il fit ainsi tout un chemin de cordes en les attachant une à une et en les passant dans les pitons en haut et en bas faisant deux lignes parallèles tout au long de sa progression. On avait les pieds sur une corde et on s’accrochait à l’autre. On avançait petit à petit comme ça. Il avait raison. Cela fonctionnait. Nous étions à la fin, descendant de la corde et faisions face à un mur.
Aucune issue. Je scrutais chaque parcelle et je vis sur le mur qu’on avait escaladé la même empreinte de main qu’avant. Les autres l’avaient remarqué aussi.
– A toi l’honneur Jenny. Oh puissante djinn ! railla Rem, assez peu élégamment je dois le dire.
Il reçut une salve de regards acides de tout le monde. Elle nous avait caché une partie de la vérité, ce n’était pas une raison suffisante pour se moquer méchamment d’elle. Nous découvrîmes un espace assez petit après. Il n’y avait qu’une vingtaine de pas à faire pour atteindre le fond. Tous les murs, le plafond et le sol étaient composés d’étranges dalles de formes géométriques ou humanoïdes. La porte aussi. Il y avait autre chose qu’une empreinte, un cadre.
– Cela a tout l’air d’un casse-tête. J’adore ça. Laissez moi le résoudre, s’enjailla Pounce comme un enfant.
– Pas la peine de le contredire. Quand il voit un casse-tête, il devient comme fou, c’est plus fort que lui, il doit le résoudre, prévint Rem qui s’en foutait comme de sa première dent de lait.
Dès la première pièce, je vus le sol dérober au fond. Rem s’en aperçut et dit me taire malgré ma terreur. Pounce était en pleine concentration et allait réussir à résoudre ce puzzle. Je sentis l’urgence s’immiscer petit à petit mais je tins ma langue. C’était un casse-tête pour moi. Dans un cadre carré était rassemblé plein de formes géométriques comme des triangles ou des trapèzes. Je vis qui les bougea au fur et à mesure. Les pièces ne pouvaient pas se détacher du cadre du mur. Celles-ci glissaient dessus et ne formaient qu’un imbroglio au départ. Il allait trop lentement. Le sol se désagrégeait et le vide était à dix mètres de nous. Il les déplaçait tranquillement mais qu’est-ce qu’il foutait ? Deux mètres de nous. Je désespérais. Un miracle à un mètre à peine. Ça y est, cela formait distinctement un symbole, celui de la couronne du roi des djinns. En effet, il avait mis quelques minutes à le résoudre mais il y était arrivé. C’était un génie. La porte s’ouvrit. Nous nous y engouffrâmes précipitamment pendant que la dernière brique se descellait du sol.
– J’ai l’impression que ce voleur était un grand malade ou un farceur fou en plus d’être intelligent et savant, informais je avec un brin de colère dans la voix.
– C’était surtout quelqu’un qui détestait profondément le roi, il avait ses raisons. De mettre ce piège mortel à quiconque voulait quérir cet objet faisait partie de son plan : nuire au roi. Détourner dérisoirement autant le symbole royal, encore un vaste pied de nez au monarque, reformula-t-elle vivement.
Finalement, nous y étions. La couronne était à une centaine de mètre de nous. Comme me l’avait rappelé Rem, il pouvait y avoir un dernier piège alors qu’on croyait avoir atteint notre but. Il lança un caillou comme la dernière fois. Il tomba sur le sol et une volée d’énormes couteaux acérés issus du plafond se fichèrent dedans. Ils devaient être bien tranchants et assez lourds pour réussir à fissurer le sol dans toute sa longueur. Rem compta utiliser la même technique que l’autre fois cependant Pounce l’en empêcha :
– C’est trop facile. Jamais deux fois le même type de piège, tu le sais. C’est la règle parmi les règles.
Rem pensa qu’il avait été trop impatient, c’est vrai. Il lança plusieurs cailloux et pas que sur le sol. En haut et sur les côtés. Une petite pierre ricocha sur un fil invisible suspendu dans le vide et provoqua une nouvelle salve de projectiles. C’était moins facile que prévu. Heureusement je crus voir un truc lors du jet.
Pounce me devança :
– La surface a l’air disparate. Il existe deux couleurs différentes pour les pierres : brunes et grises.
– En effet, je pense qu’il faut marcher sur les brunes pour ne pas déclencher le déluge de couteaux.
Il lança sur une pierre brune une nouvelle volige et rien ne produisit. J’avais donc raison. Nous nous accroupîmes pour ne rien actionner et suivîmes le chemin tout tracé. Nous étions tout proches de la couronne. On pouvait presque la toucher du doigt.
On la prit précautionneusement ayant à appréhender probablement un nouveau danger. Une fois le couvre-chef royal levait de son réceptacle un bruit de mécanisme se fit entendre. Nous étions sur la défensive. Prêts à l’affrontement. Une porte à la dérobée s’ouvrit seulement sur le côté de la pièce.
– J’ai la sensation que ça doit être la sortie. Au moins ils ont eu l’obligeance de ne pas nous faire repasser par tous les obstacles, riais je jaune.
D5
C’était bien une échappatoire. Ce n’était qu’un passage sans dangers. Cela montait dru et allait nous mener à la liberté. Voilà, on voyait à quelques mètres la sortie. Enfin l’air frais. Je le ressentis tout de suite sur mon visage. Le soleil, qui était levé, dardait ses rayons sur nous. On était en haut d’une des falaises qu’on avait vu d’en bas. On était tous ressorti entiers de cette galère. Tout était calme. Un bruit déchira ce silence. Il était sourd et lointain. Il faisait trembler la terre. Cela ne présageait rien de bon. Quelque chose allait arriver.
C’était un monstre. Il était apparu comme par magie sur la falaise où nous étions. Il était de roches, de boue et de terre meuble. Très haut et costaud. Il faisait au moins trois mètres de hauteur et nous écrasait de toute sa masse minérale.
– C’est un golem. C’était ça l’artefact magique source: un cœur de golem endormi. Le reste du monstre s’est probablement réactivé quand on a pris la couronne. Je me disais aussi que cela finissait trop bien, déclama Rem avec agacement et un soupçon d’excitation.
Il eut à peine le temps de finir sa phrase que le monstre attaqua. Je crus qu’il l’avait touché et il se sortit du nuage de poussières que l’impact avait causé. Il avait esquivé le coup de bras gigantesque et toucha le monstre de terre de sa main . Une fois sa magie d’enveloppement mise en place sur une partie de sa victime, il pulvérisa l’immense bras en augmentant la pression de l’air dans la zone qu’il avait créé. Il ne resta qu’un moignon. Une chose étonnante se produisit. J’avais l’impression qu’il se reconstituait.
L’immense masse eut à peine le temps de réagir qu’il se prit une immense rafale de vent de Séphyra ce qui le trancha presque en deux. Le colosse de pierre tenait le coup et avança dangereusement vers nous, nous surplombant de toute sa hauteur. Il glissa sur l’ombre de Shrin. Il l’avait étendu très loin pour se préparer à l’attaque ou à la défense. Il se fracassa contre le sol, s’explosant en mille morceaux.
C’en était fini de lui. C’est ce qu’on croyait mais l’impression que j’avais eu se confirma. Il se rassemblait progressivement morceau par morceau et revint encore plus grand. Pas loin de quatre mètres nous dominait.
– Nous n’avons décidément pas de chance. C’est un Maximum! Un type de golem qui se reconstitue tout le temps. De plus, il revient encore plus grand et plus fort à chaque fois qu’il est vaincu. Personne ne sait comment le battre car personne a survécu face à ce monstre presque immortel, s’énerva Rem.
La bataille allait s’avérer périlleuse si on ne trouvait pas une façon de le battre. J’étais alors dans mes pensées et le golem en profita pour m’attaquer violemment d’un coup de pied magistral.
J’en avais réchappé. J’avais eu de la chance. Shrin m’avait retiré de la trajectoire juste à temps avec son ombre sinon j’aurais fini écrabouillé ou dans la stratosphère. On ne m’attaquait pas comme ça en traître, il allait le payer à cent pour cent. Déjà je sentais mes ongles s’étiraient et s’aiguisaient. Je lançai un coup de griffes mémorable qui le fendit en milles morceaux.
– T’as entendu ou quoi ? T’es bouché ? On t’a dit qu’une fois vaincu, il revenait plus fort et plus grand. Espèce d’impotent, qu’est-ce que tu as fait ? me sermonna Rem avec vigueur et courroux.
Ainsi, la bête revint. Le golem mesurait maintenant cinq mètres et devait peser pas loin d’une tonne. Si un coup nous touchait, nous serions morts sur le coup. Shrin essaya quelque chose de bien ambitieux. Il voulait l’immobiliser avec son ombre. Cette dernière s’enroula autour du géant. Celui-ci sembla s’immobiliser petit à petit sous la contrainte de l’ombre. Si cela ne fonctionnait pas, c’était un gain de temps. Au moins, cela nous laisserait le temps de réfléchir et d’examiner la situation sous un nouvel angle pour résoudre l’énorme problème qu’on avait en face de nous. Déjà l’ombre cédait peu à peu du terrain, le colosse était d’une force incroyable malgré le formidable pouvoir de Shrin. Personne n’arrivait à trouver de solution à cette grosse épine dans le pied. Tous restait désespérément cois.
Soudain, une voix féminine explosa dans le silence.
Celle de Jenny qui était resté en arrière, protégé par le valeureux et courtois Pounce.
– Je sais ! Les golems ont souvent une marque sur le corps qui leur donne vie. Il faut seulement la trouver et l’effacer et il ne bougera plus.
– Pas si facile à faire qu’à dire, petite maigrichonne, critiqua Rem, ce qui ne nous aidait pas.
– Nous n’avons pas d’autre choix que d’essayer cette option. Tu en vois une autre ? réprimanda Pounce.
Le susmentionné ne répondit rien à cela.
D6
– Shrin, je sais que tu ne vas plus tenir longtemps. Quand tu lâcheras ton emprise, essaye de le déséquilibrer en le faisant pencher. Quand je dirais: ‘Suivez-moi !’, vous me suivrez sans poser de question. On va effacer cette marque, dit Pounce.
Il n’en pouvait plus. Il s’exécuta. Le golem s’ apprêtais à tomber, ne tenant que sur un pied. En effet, l’autre avait été explosé par un violent coup de vent de Séphyra sous l’ordre de Pounce. Je me demandais ce qu’il comptait faire. Il n’allait pas faire comme moi auparavant et pourtant il le fit. Il le détruisit en gros morceaux en utilisant le pouvoir du vent.
– Suivez moi ! ordonna-t-il.
Il courut vers les débris du gros monstre. Ça y est, je comprenais. On devait rendre le monstre inapte à l’attaque pour un temps. Vu le choc, cela durerait un assez long instant j’espère. Nous cherchâmes la marque sur son corps immense. Ce n’était pas facile. Le temps était compté.
– Je l’ai trouvé sur sa nuque, enfin je pense que c’est sa nuque, informa Shrin.
– Alors efface la et vite ! Cela presse ! bougonna Rem.
– Vite partons avant son possible réveil. On ne sait pas si cela fonctionnera vraiment, s’activa Pounce.
En effet, aucun effet visible était à constater. Il se reconstituait et était toujours en vie. Cette fois-ci, il mesurait six mètres de haut et dépassait largement la tonne. Il était encore plus monstrueux si c’était possible.
– Shrin t’as bien effacé la marque, demanda Pounce.
– Oui, bien sûr, la trace n’est plus visible.
– Je ne comprends plus rien. Cela paraissait logique.
Je m’apitoyais et eux aussi. On reculait devant cette montagne de rocs, évitant ses assauts, n’attaquant plus. Nous étions à court d’énergie et surtout d’idées. A l’abri de la bête dans une cachette de fortune. Celle-ci nous cherchait, à l’affût. Comment la battre ? Non, décidément, on ne pouvait pas abandonner et mourir écrasé par ce gros balourd de monstre.
– Allez !On ne va pas abandonner. Nous le vaincrons !
Je les encourageais avec vivacité. Encore une fois, je n’étais pas décidé à me laisser faire et à être battu.
Avec ma phrase,tous avaient repris du poil de la bête et dans cet élan, Pounce eut une idée et remarqua :
– Quand le géant de pierre a été immobilisé et juste à l’instant, quand on a évité ses attaques, j’ai vu le monstre diminuer de taille. Serait-ce possible que ce soit la solution à notre problème coriace ?
– Je ne sais pas si c’est la bonne. Je dirais qu’on devrais l’essayer pendant qu’on a de la force, dit Rem.
– Tu as tout à fait raison, jeune camarade, sinon il va nous expulser dans l’infini et l’au-delà.
J’étais assez confus, l’ancien devin avait essayé de faire une blague à ce moment-ci.
– Blague ésotérique très mal venue Shrin.
– Quoi c’était pour détendre vos chakras. Vous êtes stressés les gars. On va y arriver. Faut pas s’en faire.
– Tu sais ce qui te dit mon chakra, il dit d’aller te faire
… pendre. On n’a pas idée de plaisanter en pareil moment, éructa Rem qui était furax. Il allait se battre.
Qu’il était sanguin. Shrin avait au moins raison pour lui. Il devrait être moins impulsif.
– Assez discuté ! Nous allons le distraire et gagner du temps jusqu’ à ce qu’il soit assez petit pour pouvoir le maîtriser sans difficultés, planifia le manieur d’âmes.
– On ne devrait pas rester caché, m’opposais je pour une fois à un des plans de Pounce.
– Il nous retrouvera rapidement. Ce n’est pas une bonne idée. Excuse moi, beau gosse. Allons y !
A peine se termina sa phrase que le golem était déjà sur nous. Il avait eu raison. La créature avait repéré l’anfractuosité où nous étions. Nous nous séparâmes pour qu’il ait plus de difficultés à nous attaquer. Il ne pourrait suivre qu’une personne à la fois.
La malchance. C’était sur moi qu’il portait son attention. Il n’aurait pas pu s’attaquer à Rem. On avait moins besoin de lui que d’autres. Je plaisantais sur son compte mais plus le monstre me poursuivait, plus j’y pensais sérieusement. J’évitais encore un nouveau coup de poing. Ce n’était pas un bras qu’il avait, c’était un immense tronc d’arbre à la place. S’il me touchait, je finirais en purée. Je courais à perdre haleine, espérant le distancer. C’était vrai que les rares fois où je pouvais me retourner, il paraissait de plus en plus petit, pas loin de quatre mètres. Soudain, je trébuchai sur une branche qui était tombée à terre. Il y avait peu d’arbres ici et c’était moi qui tombais littéralement à cause d’une branche, la poisse!
– Hé oh par ici grand idiot ! Viens m’attraper !
Shrin. Il venait de me sauver la vie, encore une fois. Il avait détourné l’attention du colosse de pierres. Ce n’était pas possible, je devais devenir plus fort. Je lançai sous le coup de l’émotion une vague de lumière avec mon bras, l’effleurant à peine. Cela avait eu le mérite de lui remettre ma présence à l’esprit. Il me poursuivit de nouveau. Personne avait compris mon geste et dans un sens, moi aussi. J’avais peur de me faire écrabouiller mais je ne voulais pas me reposer constamment sur mes amis pour pouvoir me défendre.
Je le sentais. On était au bout. Il ne mesurait maintenant plus que trois mètres. Deux puis un puis cinquante centimètres. Nous allions enfin pouvoir l’appréhender sans qu’il y ait de dangers.
D7
J’étais sur les rotules. J’avais couru tout un marathon pour qu’il rapetisse de six mètres à une vingtaine de centimètres. Cela avait été un périple épuisant. Pounce avait pris le golem entre ses mains.
– Bien joué beau gosse ! Par contre, tu n’as pas été un peu dingue de le défier quand tu es tombé ?! Tu m’as fait une peur bleue ! me gronda-t-il comme si j’étais un enfant à surveiller. Ce que je n’étais pas. J’étais assez grand pour faire mes choix.
– Je devais faire quelque chose. Vous êtes tous super géniaux et puissants alors que moi, c’est tout le contraire. J’ai la sensation de servir à rien.
– Qui a détruit le golem d’un simple jet de lumière ? Alors qu’il ne le fallait pas mais bon. C’est qui ?
– C’est moi.
– Qui a distrait le golem pendant qu’il rapetissait ?
– C’est encore moi.
– Alors ne dis jamais que tu ne sers à rien, me réconforta Pounce.
– Bon c’est bien mignon tout ça cependant on a problème sur les bras. Je devrais dire entre les mains. Qu’est-ce qu’on va faire de ça ? J’aurais bien proposé que je le réduise en poussières avec ma magie d’enveloppement mais il reviendrait à la vie.
– Ce n’est qu’une âme perdue parmi d’autres qu’on a accolé à ce corps minéral. Je propose de l’accepter comme compagnon de voyage. Une fois que j’aurais compris son âme, il ira mieux, temporisa Pounce.
Avec hésitation, Rem hocha la tête. Soudain ,la créature se transforma en pierre en forme de cœur.
D8
Nous sortîmes des falaises. Pounce dit :
– Enfin, ma chère Jenny, nous avons ta couronne. Que vas-tu faire à présent que cette quête est finie?
– Je vais retourner au pays des djinns pour la redonner à mon roi. Comme j’avais dit au début.
– Je te trouve très craquante, très convaincante… Pounce s’était emmêlé les pinceaux. Du coup il fut rouge pivoine pour un temps. Après ce temps :
– … mais tu me mens. Je le sens. Ça se voit que tu n’aimes pas ton roi. Tu n’as même pas été un minimum offensé par les caricatures de ton roi faits par le bâtisseur dans cet édifice. Alors pourquoi tu veux la couronne ? Pour toi-même ?
– Pas exactement. Je connais le pouvoir que renferme la couronne. Elle permet à quelqu’un d’acquérir mille vœux si il a un génie coincé dans un objet comme une lampe au lieu des trois habituels.
– Tu as donc un maître. Tu n’es pas un djinn libre.
– Oui et il m’a promis de me délivrer. Seulement, il avait déjà réalisé deux vœux: être riche et être en bonne santé. Son troisième était d’apporter la paix partout où il irait. Vœu réalisable. Je ne peux pas apporter la paix dans le monde mais ça oui.
Elle fit une pause pour respirer puis reprit :
– Il avait un choix à faire. Par crainte du refus, je lui ai dit qu’il existait un artefact : la couronne du roi des djinns. Elle peut se faire réaliser milles vœux. Il était hésitant puis il accepta de me laisser partir pour la retrouver. Je ne pouvais pas m’enfuir de toute façon. Il tenait ma lampe, il tenait mon existence.
Une fois cette discussion terminée, un long silence se fit. On devait enregistrer les choses qu’elle nous avait dite. Ce n’était pas si facile à accepter tout ce bordel.
Je me disais que j’en avais marre de réfléchir et instinctivement, je constata :
– Tu as besoin de notre aide. On va t’accompagner. Cette histoire est assez originale pour qu’on s’y intéresse. Il y a quelque chose qui me chiffonne dans tout ce que tu m’as raconté mais je ne sais pas quoi.
– Oui, tu as bien raison. De plus, nous avions l’intention d’aller dans cette direction quand tu nous as rencontré, me bassina Pounce avec cette sornette.
Ouais, c’était ça. C’était plutôt qu’une jeune fille ne le laissait pas indifférent. Il ne nous la faisait pas. On était parti pour une nouvelle aventure. Youpi !!!