Dans l’immense bibliothèque municipale, une conteuse crie au loup. Nous sommes mercredi après-midi, les enfants n’ont pas école. Les parents se tiennent en retrait, louchant leurs petits avec tendresse. Les bambins s’excitent. Il faut sauver la fille !
Mais parmi la ribambelle, il y en a un qui ne s’exclamera jamais. Assis dans le fond de la salle, Louis écoute patiemment. A force de venir, il la connait par cœur. Pourtant, le soir dans son lit, il oublie des mots, pas beaucoup mais quelques-uns. Il perd ainsi le beurre qui fond dans le panier, le bruit des pas dans des feuilles mortes, le coup de fusil résonne moins bien.
Alors il attend la semaine suivante, parce qu’à quatre ans tout n’arrive jamais assez vite, sauf peut-être la fin d’un conte. Il sait qu’il oubliera encore, c’est ainsi que tourne le temps.
Mais parfois, il arrive que les minutes, les heures, les années, s’écartent du chemin tout préparé. Et se forment alors les histoires…