Le monde s’est mis à trembler, et il ne s’est plus jamais arrêté.
C’est arrivé d’un coup, sans raison apparente…
Non… Pour être honnête, il y a eu des signes. Quelques frémissements par-ci, par-là.
On n’y a pas fait attention, cela se produit parfois…
Jusqu’à ce qu’on ne puisse plus les ignorer.
Je ne sais pas comment c’est arrivé et après tout qu’importe ? Ça ne changera pas. Des spécialistes se réunissent, ils tentent des choses. J’espère qu’ils trouveront.
Mais comment arrêter un tel séisme ? La vie elle-même s’en retrouve changée ! La routine quotidienne est balayée pour laisser sa place à un nouveau monde où tout est à redécouvrir, réinventer.
Il faut apprivoiser cette réalité où toutes les certitudes ont volé en éclats.
Tenir debout est de plus en plus difficile, le moindre effort pour contrer ce cataclysme est épuisant.
Les appuis se dérobent, tout va trop vite. Le monde est parti au triple galop et je perds toutes mes prises. Tout s’écroule.
Je repense au temps où je pouvais courir, sauter, grimper dans les arbres. Cette période bénie de l’enfance insouciante où rien ne peut changer, où nous serons toujours comme ça…
Bien sûr, je n’ai plus l’âge de toutes ces galipettes dans l’herbe… Je n’ai jamais eu peur de vieillir. Mais il y a une différence entre perdre l’agilité de sa jeunesse, et devoir lutter pour ne pas chuter à chaque pas.
Chaque geste devient ainsi un combat. Il faut trouver la bonne position, agir lentement, être conscient de tout son corps, réfléchir au moindre de ses actes, les prévoir…
Il faut anticiper les répliques majeures, pouvant survenir n’importe quand, prenant au dépourvu et donnant l’impression de tenir en équilibre sur des jambes de coton.
Le plus difficile est de devoir se reposer sur les autres. Ils ont leurs propres problèmes. Alors on essaie de gérer seul.
On échoue.
On tombe.
Encore.
L’entraide est devenue vitale. On est tous dans le même bateau. Mais il n’y a plus personne à la barre, et la mer est houleuse.
Des savants nous indiquent les prochaines étapes, nous rassurant, ou nous inquiétant. Les nouvelles ne sont de toutes façons jamais bonnes.
On passe du temps avec les siens, comme si on savait que le monde ne s’apaiserait plus jamais.
On s’adapte. On se résigne.
Je me résigne.
Ce soir, réunis avec ma famille, et mes proches, je sais très bien pourquoi je vois désormais surtout leur dos quand nous nous déplaçons.
Et alors que nous levons notre verre, je dois me rendre à l’évidence et accepter cette réalité. Ma réalité :
Mon verre est le seul à trembler.
J’aime ton regard sur ce monde en devenir qui nous chahute et nous inquiète. L’image du verre qui tremble est saisissante ! Court et efficace, ce texte en quelques mots, interpelle…Bravo Antho.
Très beau texte, comme toujours.
Spécial comme sujet, ça surprend ^^