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Jeudi 16 Décembre 2021.
Seigneur, cette fois-ci, je jette l’éponge.
Je viens de plaquer Jérémy !
Ce mec est une plaie.
J’aurais dû le faire plus tôt, je sais, mais que veux-Tu, je ne voulais pas me retrouver seule et j’espérais vraiment que les choses s’arrangent.
Pourtant je sais bien qu’on ne change pas les gens ! Sinon, cela ferait des années que ma mère l’aurait fait.
Bref, me revoilà célibataire. Encore. Cette étiquette me colle à la peau plus que n’importe lequel de mes tatouages.
Foutu karma de merde. Je ne sais pas ce que j’ai fait dans une autre vie pour mériter cette situation mais j’ai vraiment dû être une vraie connasse pour le payer aussi cher aujourd’hui.
Et voilà les fêtes de Noël qui arrivent à grands pas et je suis encore et toujours seule pour le fêter, comme une année sur deux depuis bientôt dix ans.
Si seulement Emma avait été avec moi, je suis sûre qu’on aurait passé une merveilleuse soirée. On se serait maté un super film sous nos plaids bien chauds avec nos plateaux repas remplis de bonnes choses…
Ah ! Ça aurait été le bonheur. Mais cette année, c’est au tour de papa de profiter de sa princesse et je n’ai d’autre choix que de m’incliner devant ce partage équitable du temps de présence de notre fille… Je n’ai jamais regretté d’avoir divorcé du père de ma fille mais les conséquences sont parfois lourdes à porter, pour elle comme pour nous. Plus elle grandit, plus elle souffre de notre séparation, ayant souvent l’impression d’être coupée en deux, allant de l’un à l’autre dans un va-et-vient incessant.
J’ai vraiment l’espoir de retrouver l’amour afin de reconstruire cette petite cellule familiale dont Emma aurait tant besoin.
Mais voilà, Seigneur, retour à la case départ. Et à 39 ans qui plus est.
Plus les années passent et plus j’ai l’angoisse de voir ma principale peur se réaliser : finir seule comme ma mère. Un comble quand on sait que j’ai passé la moitié de ma vie à tout faire pour ne pas lui ressembler.
Seigneur, promets-moi de m’aider à tout faire pour éviter cela. Permets-moi d’offrir à ma fille une autre vie que celle que j’ai connue.
Envoie-moi un signe, un encouragement, parce que je te jure qu’il en faut pour sans cesse tout recommencer…
Gwendoline range son journal intime et boit sa dernière gorgée de café au lait. Après avoir payé sa consommation et salué le patron de son bistrot préféré, elle
s’arrête devant une femme entre deux âges, assise par terre. Devant elle, est posée une petite coupelle à moitié remplie.
Elle la voit de temps en temps et lui donne régulièrement de l’argent.
Comme les fois précédentes, la jeune femme se met accroupie, à hauteur de la mendiante aux tenues bariolées.
Réalisant qu’elle a donné toute sa petite monnaie au cafetier, elle sort un billet de son portefeuille et le dépose directement dans la paume ouverte de l’indigente. Avec un grand sourire, elle resserre ses deux mains sur celle, gracile et douce, dans laquelle elle a glissé le billet.
La pauvre femme la remercie amplement et, dans un élan de gratitude exacerbée, embrasse la main de Gwendoline, tout en lui parlant dans une langue qu’elle ne comprend pas. Son discours s’apparente à des bénédictions d’où émane une profonde sincérité.
Sans réfléchir, la jeune femme fait la même chose en retour et pose ses lèvres sur la main abîmée. A son grand étonnement, celle-ci sent très bon.
Cet échange ne dure pas plus d’une minute mais une connexion invisible les unit.
Dans le froid et la dureté de la ville, leurs humanités se sont touchées.
Puis, Gwendoline continue sa route et entre dans le petit magasin. Tout en furetant dans les rayons d’un oeil distrait, elle tend l’oreille, interpellé par les paroles d’une célèbre chanson de Johnny Hallyday : “Je te promets…”
OK, Seigneur. Reçu cinq sur cinq. Le message est passé.
J’aime beaucoup ce chapitre on ressent pleinement cette solitude qui effraie…
Une belle écriture très fluide
Merci Beaucoup Marie Claude, votre commentaire m’encourage réellement. C’est très gentil de votre part. N’hésitez pas à me laisser vos impressions, quelques qu’elles soient, c’est vraiment aidant.