Invincible, invulnérable, insoucieux de ce qui l’attend. Il se refuse à l’évidence. Se met la tête dans le sable. Se barricade derrière d’inextricables certitudes. Yeux clos, oreilles bouchées, lèvres cousues. Pieds et poings déliés pour nier l’inacceptable.
Des torrents de pluie crèvent le ciel en quelques minutes. Des plaies béantes cratérisent la Terre, puis la noient désespérément après des mois de sécheresse intense. Rues abattues. Maisons retournées. Ponts de pacotille. Lui seul ne voit rien.
Un brin d’herbe. Une cigarette qui se consume. Une lumière de flammes s’élèvent dans la nuit. Des hommes luttent. Combat inégal et dangereux. De l’Homme contre ses propres contradictions. Contre ses tristes interdits. Mais, lui, fier et beau, continue simplement à fumer.
Hier, il m’a parlé. Il s’est ri des cordes qui tombaient, des tornades qui dévastaient, des lumières qui s’ouvraient dans le ciel d’automne. Il ne sait pas qu’il ne sait pas. Insensément naïf ou volontairement cynique, il va, le cœur vaillant. Dans un instant, il ne sera plus, pourtant.
Autour de sa maison, au bord de la grande route, l’enfer à mille degrés. La canicule sévit depuis plusieurs semaines là où il vit. Elle n’est rien, pourtant. Juste un peu inconfortable. Les flammes qui l’enserrent depuis midi sont assassines. Il hurle d’effroi. Mais personne ne l’entend.
Longtemps, il a clos les paupières. Peur d’être aveuglé par des images qui le tuent irrémédiablement. Il n’a plus que ses mains pour pleurer. Ses pieds et ses jambes ne sont plus que fange. Boue de compassion pour un homme qui, jusqu’au bout, s’est cru autruche.
Nul n’est invincible. Nul n’est invulnérable. Les lumières incandescentes ne pardonnent rien. Elles avancent sans pitié. Brisent tout quand elles passent. Pas de remords pour elles. Ni pour les ondes vengeresses. Tout était joué d’avance. Lui seul n’a rien vu.