Attention aux mensonges

9 mins

Je vous partage un autre petit bout de moi, plus noir, plus trash ! Je l’ai proposé, il y a longtemps également au concours Pampelune. Peut-être un peu trop spécial pour faire l’objet d’un concours. Aux âmes sensibles s’abstenir.

Discussion intérieure d’un esprit tortueux « Simple… très simple ! Trop simple !!! Une vie si calme. Ça ne me va pas ça ! Pas assez excitant, pas assez envoûtant !
Seul, plus de petit ami avec qui débattre, s’ébattre ou se battre. Ennui… quand tu nous tiens ! Elle est où mon envie d’antan… la folie de la jeunesse ?! »

Sarah… nom si banal quand on y réfléchit. Une petite bonne femme sans grande ambition…
Elle avait pris un emploi, il y avait peu, suite à un événement d’ampleur dans sa vie et afin de changer drastiquement d’environnement. 

Quelle idée, je suis d’une limpidité à faire peur. Rien ne me va mais pour faire plaisir à tous, je me fourvoie dans ma propre vie. C’est bien pathétique comme situation ! On dirait, à me voir, que j’engage une lutte contre la fatalité qui est mienne. Rien du tout… je suis comme une plante qui manque d’eau… asséchée, fripée par la vie. Elle ne m’a rien donné ! Pire … elle m’a tout pris !



Il fut un temps où elle avait été mariée, heureuse (en partie) et comblée (au besoin). Puis, une autre s’était pointée et lui avait volé tout en un battement de cil. Elle avait d’abord succombé aux remords pensant que cela venait d’elle et ceux-ci avaient fait place à la fureur.
Elle s’était déchaînée sur elle violemment, un jour sans prévenir mais cela lui avait valu de perdre son emploi puisque la belle n’était autre que sa collègue de travail. Elle avait eu la mauvaise idée de l’inviter à manger un soir, créant sans le vouloir une rencontre inévitable entre son homme et la dite voleuse.

« 32 ans… mon âge et plus désirable que moi » s’était-elle dit effondrée le jour où il était parti la laissant seule dans sa maison de 200m2 dans un quartier chic. Bien vide depuis qu’il l’avait abandonné à ses idées noires ! De style régionale en brique rouge, elle l’avait meublé seule, car comme elle lui avait dit, lui « n’avait aucun goût ». Chaque meuble avait sa place et tout était d’un modernisme consternant… elle sentait l’envie de défoncer tout ce petit monde propret à coup de masse pour ne plus avoir à se mentir en arborant un intérieur rangé, là où son moi intérieur hurlait au désordre absolu.

Sarah avait une bien piètre opinion de son job… par job, on entend petit boulot. Ça n’en était pas un mais comme elle ne souhaitait pas y rester…
Étant complètement étrangère à la notion d’esprit d’équipe et de communication, elle ne pensait pas qu’il était nécessaire d’en informer ses collègues qui pensaient tous ne jamais la voir partir. A la question :  “Ça va le boulot ? Tu t’es bien intégrée ?”  Suivait une réponse des plus communes, quelque peu mensongère et impertinente :
“Pourquoi ? Ça devait mal se passer ? »  

Son collègue le plus proche s’appelait Gérard. D’une bonhomie sans commune mesure, c’était un homme basané et grand.  Elle avait découvert sans trop d’intérêt qu’il avait 55 ans alors qu’elle lui en aurait donné trente-cinq. Les yeux bleus, une barbe naissante et le regard bienveillant, il était devenu son binôme par la force des choses. Elle le haïssait de n’être que bonté et vérité, là où elle-même n’était plus que balivernes et malveillance.
Leur travail, dans ce bureau tout aussi ennuyeux que ces collègues, était de fournir leur aide aux gens dans l’impasse. Un peu comme une assistance sociale avec des moyens plus importants. Ça allait de l’aide financière aux recherches d’individus disparus. Le secret professionnel était une devise pour ce lieu dont la situation géographique représentait bien le statut. Caché dans une impasse sur un boulevard très peu fréquenté, l’enseigne disait à qui voulait bien l’entendre que les ennuis avaient toujours une façon d’être résolus.
Jusqu’alors, elle n’avait rencontré que des gens dont les soucis ne l’intéressaient guère. Complètement indifférente à leurs infortunes, pensant que tous ces abrutis ne pouvaient être plus malheureux qu’elle, chaque jour, elle se faisait la réflexion intérieurement qu’elle ferait bien sauter tout le pâté de maison pour ne plus avoir à les voir.
Toutes ces années passées à mentir aux autres sur son compte pour ne pas avoir à expliquer ces pensées cruelles et incompréhensibles, à se justifier et à se défendre d’un quelconque problème mental, l’avait rendu comme accro à cette apparence créée pour la situation. Elle était devenue dépendante de ces mensonges quotidiens.

    C’est pourquoi, lorsque Leslie Dedieu fit son apparition, une alarme se déclencha en elle. Cette blonde sexy, digne des pin’up de Canal, habillée façon Greta Garbo dans La Rue sans Joie, transpirait le mensonge. Il fallait qu’elle s’occupe d’elle.

“  Que puis-je pour vous ?” lui avait-elle demandé en s’approchant d’elle dans le bureau aux fenêtres brunies et dont la disposition ne laissait que peu de places pour circuler. Quatre bureaux collés les uns aux autres dans un ensemble de 30m2 mal agencé. Elle avait dû faire le tour de la table de travail de son collègue pour atteindre l’entrée des lieux et accueillir les nouveaux. Car ils étaient deux, un homme et une femme, d’une trentaine d’années.
L’homme était blond aux yeux vairons. Sa démarche nonchalante avait quelque chose d’hypnotique. Il marchait derrière elle avec la même attitude formelle qu’elle arborait. Dans un imperceptible mouvement de tête, il avait éveillé un doute chez elle. Sarah bouillait intérieurement. Elle n’aurait su dire pourquoi mais l’homme en face d’elle lui rappelait quelque chose de sournoisement ancrée au fond de ses entrailles et la suspicion était si grande que son estomac la faisait subitement souffrir. Quelle était cette impression ? Qui était-il ?
Puis, le regard impassible de l’homme se posa sur elle. Il lui sembla un instant qu’il la fixait de façon insistante comme s’il ne comprenait que trop bien ses pensées. Et ce regard perçant qui s’insinuait en elle la fit trembler.

    Sarah raconta ce moment interminable à son ancienne collègue, Erika. Elle omit de préciser que ce qui la perturbait n’était autre que l’individu lui-même, elle ne lui raconta que l’effet désagréable de son regard sur tous ses muscles. Elle s’était raidie violemment et la nausée l’avait surprise durant la conversation et elle avait dû partir.

« Je suis venue pour vous demander de m’aider », dit la jeune femme soudainement plus que désemparée.

    Le collègue de Sarah s’était levé pour venir à leur rencontre mais La Greta avait insisté pour parler avec elle en privé comme pour souligner le fait que la ressemblance entre les deux femmes n’était pas fortuite. La blonde avait senti ce qu’elle avait éprouvé à son entrée dans le bureau.
Elle la conduisit dans la pièce qui jouxtait leur office. Celle dont personne n’avait idée de l’utilité. Il s’agissait d’un petit bureau inoccupé.

« Je le vois tout le temps. J’en rêve la nuit. Partout… il est partout ! Je suis là parce que je ne sais plus comment faire. » Son visage placide s’était transformé. L’expression d’effroi qu’elle arborait fit frissonner son interlocuteur. Les yeux exorbités, les joues creusées par sa mâchoire serrée, elle semblait à deux doigts de s’évanouir. « Je vous en conjure… aidez-moi ! Je ne sais pas qui il peut bien être mais j’en deviens insomniaque à me demander s’il va me tomber dessus pendant la nuit et me réduire en charpie. »
Sarah se tourna vers l’homme blond aux yeux vairons pour qu’il donne son opinion sur les dires de la femme. Il ne renchérit pas et arborait toujours ce rictus agaçant et de mauvais goût. Un autre jour, elle n’en aurait eu que faire de ce couple étrange mais quelque chose dans le regard de cet homme lui disait qu’il fallait s’intéresser de près à ce cas.

    Il était déjà apparu auparavant dans ces rêves. Cette sensation étrange de déjà-vu. Ce dérangeant malaise de la première fois. Elle avait vu cet homme dans un de ces moments qu’on ne se traduit pas. Elle était suave et douce, une étreinte chaude bien qu’insidieuse de son mental. Il était apparu dans un des rêves qu’elle faisait très souvent et il la narguait pour on ne sait quelle raison.
La première fois, il ressemblait à un point immobile au milieu de la foule. Il était dans ce rêve qu’elle avait fait suite à sa “fausse couche” provoquée.
Elle ne voulait pas de bébé et elle avait manqué cette fichue pilule et s’était rendue compte qu’elle était en cloque. Il avait l’air si heureux et près à tout pour le garder qu’elle n’avait rien dit et avait fait ça en silence, en secret. Déçu, il était vite passé à autres choses mais elle avait commencé à rêver de l’homme aux yeux vairons. Le point dans la foule.

Par la suite, elle avait continué à mentir. Elle sait si bien le faire. Avant, elle se mentait à elle. Elle se mentait sur ses envies, sur ses choix et puis elle avait commencé à mentir aux autres pour en arriver à ce que ce soit comme une seconde nature. Quand on a une vie qui plairait à personne, on s’invente un monde qui nous plaît. Enfin c’est ce qu’elle s’était mis en tête mais au fond, ça changeait pas grand chose au problème.
Il avait changé de place dans les mois qui suivirent. A chaque mensonge, le point s’avançait dans la foule jusqu’à ce qu’elle commence à voir ses yeux. Mais pas que, elle avait le sentiment d’être suivie hors de ses rêves aussi.
Ces yeux… des yeux vairons ! Il était sournois ce sourire qu’il arborait.

Les jours qui suivirent la venue de la blonde, elle recommença à rêver de lui. Les sueurs froides et la peur avaient repris son cours. Pourtant, ça faisait trois jours qu’elle n’y était pas descendue. Pourquoi ressurgissait-il alors que plus personne ne lui parlait d’eux ? Ce soir, elle y retournerait.

“Elle a fait quoi ?” dit-elle manifestement estomaquée.
“Elle a sauté par la fenêtre du troisième. Ils disent qu’elle avait le regard si torturé que sa mère l’a à peine reconnu à la morgue.”
Elle ne comprenait pas. Greta Garbo n’avait pourtant pas l’air d’avoir envie de mourir. Encore plus si elle était venue terrorisée les voir pour qu’il la sauve de ce qui la pourchassait.
“La police a aussi dit qu’il y avait une enquête en cours sur la mort de son époux. Un riche usurier. Les résultats des prélèvements sur la voiture du mari aurait prouvé hier qu’il y avait de fortes chances qu’elle l’ai écrasé avec la BM de l’autre.”
Son sang ne fit qu’un tour. C’était ça le lien entre elle et la blonde: un mensonge ! Mais non ! C’était pure folie ! Inepte !

Sarah était rentrée plus tôt ce jour là. Elle avait posé son regard cinq secondes sur la porte et avait passé son chemin. Elle avait attrapé son Apple et taper mythe mensonge pour trouver pas mal d’inepties sur des enfants dieux qui guettent les mensonges des humains mais rien qui ne la fassent frémir. Au point qu’elle referma son ordinateur avec désinvolture pour aller se servir un verre de vin blanc dans un verre ballon seule sur la terrasse. Un frisson lui parcourut l’échine quand son téléphone sonna. Elle sentit une présence derrière elle sans la voir.
Elle savait au fond d’elle de quoi il s’agissait sans vraiment se l’expliquer et sans vraiment vouloir y croire. Elle décrocha son téléphone:
“Miss Fish, enchanté ! Je suis l’inspecteur Duncan.” Un silence de quelques secondes suivi l’annonce.
“Oui, euh pardon ! Je suis fatiguée aujourd’hui. J’ai perdu une cliente.” Encore un autre mensonge. Elle n’allait sûrement pas se lamenter pour une pauvre folle suicidaire.
“Oui, je vous appelle car nous avons du nouveau dans l’affaire de votre ex-mari disparu. Seriez-vous disponible demain matin pour quelques questions et un bilan de situation ?”
“Bien sûr, si je peux l’aider !” Elle raccrocha et se rendit devant la porte.

Encore cette sensation désagréable dans le cou. Un poids qui tendit tout son être.
Elle saisit la poignée et s’engouffra dans l’escalier. L’odeur de pisse et de viandes avariées auraient fait vomir quiconque sauf elle. Elle avait fini par s’y faire, à force, se délectant de ce “mal pour un bien”.
Ils étaient là, ces deux bâtards qui avaient fini de rendre sa vie insipide. Dans la pisse et la merde avachis l’un sur l’autre à cause des liens qui les maintenaient dos à dos.
Elle sourit. Ils ne méritaient que ça, Mr Fish, l’ex-mari et la soi-disant collègue et amie, Erika. Les foutus amis et amants. Les enfants de putain qui l’avaient poignardé alors qu’elle les croyait mari et amie.
Elle s’avança et attrapa les cheveux de la fille. Elle respirait encore. Dommage !
Elle regarda son ex-mari qu’elle avait roué de coup dès le premier jour. Avec une planche, puis avec un tuyau. Il avait agonisé et elle avait décidé de le laisser crever.
Ils étaient là depuis quinze jours. Il était mort depuis deux. Elle les avait nourri assez pour qu’ils tiennent longtemps.
Elle se demandait combien de temps il faudrait avant qu’il pourrisse et que les vers s’attaquent à lui pour venir attaquer la chair de l’autre.

    Un nouveau souffle dans son cou puis un bruit à l’étage.
        Dolos
Elle se tourna pour chercher qui parlait dans son dos mais ne vit rien. Ce mot… elle l’avait vu quelque part… Elle monta l’escalier en courant, terrifiée par quelque chose qu’elle sentait de plus en plus proche.
        Dolos
Toujours derrière elle. Mais où. Le dieu impie des mensonges… Dolos ! Qu’est ce que c’était que cette foutue histoire ?
        Dolos
Elle trébucha sur le tapis de la cuisine pour s’étaler avec son verre ballon de tout son long dans le couloir. Quand le verre ballon éclata sur le sol, le rebond du pied en cristal qu’elle tenait du bout des doigts comme on lui avait appris vint se ficher droit dans son œil assez profond pour mettre un terme à toutes ses questions à la mord-moi-le-noeud. Elle eut quelques secondes de conscience où elle vit Dolos, l’homme aux yeux vairons se pencher vers elle, un sourire sadique et… les dents pointus. A l’autre bout de la pièce des hommes en gilet pares-balles entrèrent dans la maison, armés jusqu’aux dents, et se dirigèrent jusqu’à l’escalier.

Fini ! Fini ! Elle avait tout compris. La blonde et l’homme aux yeux vairons que personne ne voit. Les mensonges ! Trahi par sa propre malveillance et l’autre brune qui s’en sortirait… Pour la première fois de sa vie, elle se disait à elle-même la vérité sans se mentir :
Quelle vie de merde !

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3 Commentaires
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Haldur d'Hystrial
1 année il y a

Hello Curly.
Le problème de ce texte est me semble-t-il la confusion. Par exemple tu ne donnes pas d’indication sur le job de Sarah. On comprend qu’il s’agit d’aider des gens mais on ne sait pas en quoi.
Autre chose. Elle reçoit la blonde seule dans son bureau et tout à coup elle se tourne vers le gars aux yeux vairons. C’est un peu incohérent.
Pour la suite j’ai été un peu perdu. Peut-être à cause du champagne…

Haldur d'Hystrial
1 année il y a

Pour le champagne, je parlais de mon propre état !

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