Partie 2 : L’écho
Chapitre 22
Avec le recul je me dis que cette rupture avec Arnaud est peut-être la décision la plus raisonnable. Surtout pour lui. J’ai pourtant du mal à m’y faire. Tant de mal.
Chacun avance maintenant de son coté, les choses évoluent et bien que je me noie dans le boulot pour oublier, je n’arrête pas de penser à lui. C’est toujours une fois que l’occasion est passée que l’on a exactement la réaction, la réplique adéquate, celle qui fait mouche. Merde…
Je m’en veux tellement, je me repasse le film cent fois. Sans toi. Les phrases que j’aurais dû dire pour le retenir, celles que j’aurais dû souffler avant pour qu’il ait envie de rester. Si j’avais réalisé, si j’avais agi autrement, il ne serait pas parti, c’est sûr. J’aurais dû laisser derrière nous tout ce qui était trop lourd dans nos vies.
Le temps passe. Il y a quelques temps, j’ai rencontré Jimmy. Il y a peu de gens avec qui tout s’est passé aussi naturellement qu’avec lui.
Comme promis, j’étais revenue le voir le lendemain de notre première rencontre. Même endroit, à 22h. Il m’avait invitée dans un bar voisin que je ne connaissais pas mais auquel je me suis vite accoutumée. Des pierres apparentes dans la salle principale, et également dans la cave où le serveur nous a installés. Un piano, des fauteuils, une ambiance cosy de chambre version fin du dix-neuvième siècle. Commode, bibliothèques mais surtout ce qui faisait la particularité du lieu, des chats dans des arbres. Une quinzaine de boules de poils qui viennent se frotter sur vous pendant que vous mangez, prenez votre café, que vous pouvez caresser, câliner, noyer d’affection comme bon vous semble sans poser de question. C’était comme si Jimmy avait compris la fascination que j’avais pour ces animaux et à quel point ils m’apaisaient. Comme s’il ne laissait rien au hasard, et employait tous les moyens possibles pour m’amadouer. Ou m’impressionner ?
C’est donc dans cette atmosphère faussement étrange qu’à mon tour, j’ai commencé à essayer de percer ce mystère qui l’entourait, chercher la raison pour laquelle il m’avait choisie parce qu’il s’agissait bien de cela. Il m’avait choisie. Il a commencé à parler, de lui, de son passé un peu, de son avenir beaucoup. Il avait de l’ambition, des rêves, tout pour plaire. Il ne passait pas sa vie à attendre. Il fonçait.
– Allez, à ton tour maintenant. Parle-moi de toi.
– De moi ? Y’a pas grand-chose à dire tu sais.
– Arrête, je suis sûre qu’il y a de quoi faire un roman.
– Peut-être.
Finalement, je me suis étendue sur le seul sujet où j’étais sûre de ne pas faire de faux pas : mon boulot. L’intérêt que je lui portais, l’application que j’y mettais, à ma manière. Lui m’a également longuement parlé du sien. Depuis les grands dossiers qui avaient fait sa renommée dans le milieu à ses dernières affaires, moins passionnantes. Il avait intégré depuis quelques années une entreprise basée en région parisienne dont le nom ne m’était pas inconnu. Comme moi, il avait voulu donné un tournant à sa carrière. Mais pas pour les mêmes raisons. Le tumulte l’avait vidé, il cherchait à présent la tranquillité.
Hormis cela, je n’avais rien à raconter. Ce n’était pas la peine d’inventer n’importe quoi, il avait dû enquêter sur moi et je ne comprenais pas encore pourquoi il me testait.
Il était déjà tard. Après un deuxième, puis un troisième verre dans un autre bar, il m’a enfin expliqué pourquoi j’étais ici. Il a posé sur la table la copie intégrale du dossier sur lequel il voulait que je travaille avec lui. Rien à voir avec la routine qu’il m’avait évoquée en début de soirée.
Il avait besoin d’un journaliste, quelqu’un qui mérite sa confiance pour collaborer et il avait entendu parler de moi. Est-ce que j’étais prête ?
Devinant le trouble qui m’agitait, il me défia pour finir de me décider.
– Si tu t’en sens pas capable, tant pis, je demanderai à Matthieu Fournier, tu le connais ?
– Bien sûr, on a fait l’école de journalisme ensemble.
J’ai omis de préciser qu’à l’époque, je trouvais ce petit con arrogant et prétentieux. Vous allez me dire, c’est peut-être l’hôpital qui se fout de la charité mais… Non, nous étions différents. Je n’ai jamais voulu faire de mal à personne alors que lui, je ne pourrais pas le jurer.
– Tu n’es donc pas sans savoir qu’il est plutôt doué.
– Pourquoi tu lui demandes pas à lui alors ?
Il me regarda avec des yeux remplis d’une colère intérieure.
– Fais pas chier Lizzie, tu sais très bien pourquoi.
Cette familiarité soudaine, bien que sous-jacente depuis le début, m’a surprise. Il ne m’avait pas encore appelée par ce diminutif, celui que seule ma mère me donnait, et ne s’était jamais montré aussi nerveux. Je devais lire dans ses pensées, comme il semblait lire dans les miennes. Il me voulait moi et personne d’autre. Avec prudence, j’ai finalement accepté.
Voilà donc quelques temps maintenant que je bosse avec Jimmy et après tout, peut-être bien que c’était ça qu’il fallait. Mon cerveau tourne à cent à l’heure. Mon instinct m’a donné raison. Je vis. Oui, je vis. Faisant fi des orages, de la pluie et des malheurs.
Inspiration : La vie, DJ Ross featuring Kumi
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