Personne n’est parfait-chapitre 26

3 mins

Partie 2 : L’écho

Chapitre 26

Des semaines déjà que j’ai pris ma décision. Des semaines que je n’ai pas vu Elizabeth et que j’essaie de continuer ma vie sans elle.

C’est bizarre parce que je l’ai voulu, je m’étais trouvé une tonne de raisons de la quitter et pourtant… Je la vois dans le regard de chaque femme dans la rue, je l’imagine dans chaque situation que je vis. J’ai cette sensation que quelque soit l’endroit sur lequel je me retourne, quelque soit l’endroit où mes pas m’entraînent, elle est là, comme une ombre qui déchire la nuit. Comme si je ne pouvais pas me débarrasser de ces habitudes. Un réflexe de Pavlov qui se déclenche à chaque fois que je croise l’un de nos souvenirs. Pourtant, je sais que je n’ai pas eu tort.

Mais vous voyez, à l’instant encore, j’arrive sur le lieu d’un suicide et dans le salon, je sens son parfum. La touche d’ylang-ylang, la plus prononcée, m’envoûte quand elle se mêle à la rose et à la fleur d’oranger. Je pense que la fragrance émane du foulard en soie, griffé de motifs paisley aux teintes turquoise, violette et rose, posé sur le buffet. J’ai envie de l’attraper, de fourrer mon nez dedans et de l’inspirer comme si c’était le cou d’Elizabeth mais je n’ose pas m’approcher plus près. Je suis certain que je me fais des idées, que des tas de femmes achètent les mêmes produits, bien que j’ai l’impression que jour après jour, l’atmosphère s’emplit de quelque chose de malsain, comme si la vie prenait plaisir à me narguer.

J’ai tout donné pour Elizabeth. Elle a besoin de quelqu’un pour la soutenir et je ne suis pas ou plus cet homme là. Point final. Je souffre mais ça ne durera qu’un temps. En attendant, je lutte contre mes insomnies à coups de tisanes aux plantes même s’il y a toujours un moment où je ne peux pas m’empêcher de repenser à elle, à nous. C’est vrai, tous ces signes finissent par me rendre fou. Alors dans mes rêves, je pleure et elle me console en buvant mes larmes.

Heureusement, mon boulot de flic m’aide à garder la tête sur les épaules. Par exemple, quand je l’ai vue tout à l’heure, j’ai tout de suite mis un nom sur la victime et j’ai pensé que c’était triste d’en arriver là quand on a encore la vie devant soi. Je ne le connais pas personnellement mais il fera bientôt les titres de la rubrique fait-divers. Dommage, parce que son appartement semble confirmer ce que je sais déjà, il doit avoir plutôt pas mal réussi sa carrière.

Dans le fond, le début d’un couloir nous laisse penser que s’y trouve l’accès à la cuisine, à la salle d’eau ainsi que l’escalier qui mène à l’étage de ce duplex. Quant à la pièce à vivre où nous nous trouvons, elle fait une taille raisonnable et une bibliothèque tapisse l’un des murs blancs. Les livres de droits s’y partagent le territoire avec Stephen King ou Lovecraft. Tout est résolument moderne, le canapé et les fauteuils en cuir noir, la table basse en verre, le parquet. La journée, le soleil doit s’engouffrer par les deux immenses fenêtres. D’ailleurs, sur le rebord de l’une d’elle, encore entrouverte, le cendrier déborde tandis que les battants claquent au moindre courant d’air. Je la referme avec précaution, m’assois et jette un œil dehors. Quelques mètres au sud, j’imagine la Seine entourant l’île de la Cité. Impeccablement situé, impeccablement arrangé. Si Liz avait bien voulu déménager, c’est un appartement comme celui-là qu’elle aurait aimé. Moi, par contre, je n’ai pas envie d’y faire de vieux os. On a fini, on devrait rapidement remballer, les nuits sont longues et d’autres affaires nous attendent. Et puis il ne fait pas bon être ici. Je ne supporte plus cette façon qu’a Elizabeth de me tourmenter même quand elle n’est pas là.

Nous sommes donc sur le point de décoller lorsqu’un de mes collègues attire mon attention sur un carnet qu’il a trouvé à côté du foulard. Comme lui, je reste scotché. La page qui s’offre à nous est noircie à coups de stylo-bille, pour certains si violents qu’ils traversent la feuille, mais derrière se devine un dessin au crayon de Raphaël et moi. Je prends le calepin, stupéfait, avant qu’il ne me tombe des mains. À quelques mètres de moi, Elizabeth vient de pénétrer dans l’appartement. Est-ce elle qui a fait ça ? Le dessin et… le cadavre. Le doute m’assaille mais je ne veux rien laisser paraître. Je dois simplement faire mon travail.

Passé la surprise, je lui demande :

– Qu’est-ce que tu fais là ?

– Moi ? J’habite plus ou moins ici. Mais, vous ? Qu’est-ce qui se passe bordel ?

Inspiration : Tainted love, Soft Cell


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