C’est l’histoire d’un croque-marmot, d’une servante reproductrice, d’un bébé et de tout plein de personnages qui sont à l’origine de cette histoire qui se déroule en un lieu incertain, à une époque incertaine, mais qui serait vraie. C’est ce qui m’affirma l’auteur. Un homme discret qui n’a jamais voulu me dire son nom, ni son prénom, encore moins son âge. Après avoir poser son manuscrit dans ma boite aux lettres, il me téléphona, me demandant si j’avais lu son manuscrit, je lui répondais que j’avais pas mal de retard sur d’autres textes qui étaient prioritaires,lui faisant comprendre par mon ton assez sec, que je le lirais plus tard . Un silence accompagna ma réponse
– Vous devriez le lire. Sa voix était nette, presque sentencieuse qui m’obligerait à lui obéir.
Je ne sais pourquoi, mais lorsque je posais le combiné du téléphone, je fut intrigué par la curiosité qu’il venait de susciter en moi. Je ne sais si ce fut sa voix, ou si je sentis qu’il était différent de tous ces auteurs qui vous argumentent leur livre, comme si il était crucial qu’il fut publié, mais que vous repoussez d’un air décontenancé sur la valeur réelle d’une publication qui vous font répondre par un courrier passe partout répété à l’envi, dont vous ne modifiez que le nom de la personne qui le recevra.
Je lu donc les premières pages écrites de cette belle écriture de l’écolier qui s’applique à faire des lettres cunéiformes placées sur des lignes imaginaires, presque tracées au cordeau, pour être déchiffrées sans difficulté.
Ces premières pages achevées, je du me résoudre à me laisser corrompre par la curiosité de continuer la lecture de ce manuscrit qui m’envouta.
A son deuxième appel téléphonique, nous nous donnâmes rendez-vous dans un café, lieu qu’il jugeait moins protocolaire que des bureaux modernes et parfois si froids, d’éditeurs. Il argumenta aussi qu’il désirait de la discrétion, ne voulant être vu par d’autres personnes que moi.
Habitué à toutes les excentricités des auteurs qui peuplent mon univers, je ne trouvais pas cela étrange et acceptais.
Je rencontrais un homme, petit par sa taille, d’un âge avancé mais aux yeux vifs et étincelants d’intelligence, tels le sont ceux d’un enfant très éveillé. Il paraissait chétif, mais je sentais en lui une force colossale. Il avait le cheveu rare d’un blond presque roux. Une sorte de barbichette en virgule qui cachait maladroitement une profonde fossette au menton. Il était habillé d’un costume passe- partout, gris perle. D’une chemise rosée, délavée, ornée d’une cravate d’une teinte rosie plus appuyée, nouée à la 1900. Je remarquais qu’il portait des boots façon cow-boy, sûrement une excentricité d’un voyageur perdu dans ses souvenirs.
Il attaqua par une clinquante question :
– Alors ?
Sa voix était fluette, mais incisive. De celle qui n’aime pas la désobéissance.
Je me sentis redevenu élève devant son professeur. J’articulais avec presque un bégaiement timide, mon acceptation. J’évoquais un contrat d’éditeur, évoquait un pourcentage. Une sorte de rictus ironique se dessina sur le coin de ses yeux. Il se leva, paya son café et partit.
Il me rappela le soir. Nous discutâmes longuement. Je voulu savoir des détails. Il resta évasif, ne voulant m’éclairer sur différents aspects qui ferait que cette histoire soit vraie. J’entendis son sourire au téléphone. Il me fit comprendre par des sous-entendus, qu’il venait de l’époque décrite dans l’histoire, mais par mesure de sécurité, il ne pouvait m’enseigner sur plus de faits. Il raccrocha. Je suis resté des heures sur ce manuscrit. L’écriture, parfois malhabile, avec quelques erreurs de syntaxe, décrivait un être tourmenté, pris d’angoisses, comme s’il était à l’origine de faits qui le menaçait. Je sentis qu’il ne pouvait être que l’un des protagonistes. Mais cela n’était pas possible, tout m’indiquait que ce n’était pas notre époque mais que … mais que … soudain au détour d’une phrase, un fait étrange m’indiqua que je me trompais. Pourquoi devais-je penser à ce que cette histoire se déroulait à une autre époque ? Si cela était, cela aurait impliqué qu’il avait voyagé dans le temps ? Qu’à une époque lointaine, existaient des croques-marmots, des sorcières bienfaisantes, des chauve-souris devenus animaux de compagnies et d’autres créatures qui ne pouvaient jamais avoir existé, sauf dans l’imaginaire d’un peuple moyenâgeux, victime de ces superstitions fantasques qui entretiennent les longues veillées d’hiver, où blottis les uns contre les autres, on s’amusait tels les enfants à se faire peur. Ce n’était pas le cas. Son style appuyé, parfois vindicatif, parfois agressif, démontrait que la réponse était ailleurs. Ailleurs. Je réfléchis à cette possibilité. Je levais les yeux. Mon regard traîna sur la fenêtre. La nuit venait de s’installer, et quelques étoiles éclairaient un ciel bleu noir. Une étoile brillait plus que les autres. Je savais qu’une étoile était un astre qui, parfois, était mort depuis longtemps.
La lumière voyageant à travers l’espace, continuait de nous faire croire à son existence alors qu’elle avait disparue. Ces mondes d’ailleurs, loin de chez nous où seraient peut-être des autres vies …
Des autres vies, de celles qui ne pouvaient être imaginées, ou transposées… trans… por… tées.
« Transportées », cela me fit sursauter.
Je repris le mot, le fit tournebouler dans ma tête. Je le savourais.
Pourquoi ce pragmatisme qui voulait que tout se déroule chez nous, sur cette terre.
Je regardais le ciel qui se trouait d’une vérité qui éclatait.
Et si … Je souris à la nuit.
Il devint évident que cette histoire fut lue, même si je savais qu’un grand nombre de lecteurs croiraient lire une fiction créée pour un divertissement de lecture.
Il était clair pour l’éditeur que j’étais, qu’il m’importait ce qu’en penserait les gens, j’avais entre les mains, une preuve qu’un autre monde existait, Ce monde qui était sûrement à l’origine des superstitions, voire de ces récits anciens qui entremêlaient notre univers très terre à terre et d’autres, si lointains, qui et cela m’amena un autre sourire les amenaient eux aussi à nous voir comme des être fantastiques, étranges, que l’on glisse dans les aventures pour faire frissonner d’angoisses, nos peurs naturelles.
Je laissais la nuit se complaire à attendre le jour, allongé sur mon divan, le manuscrit relu, posé à côté de moi. Je crois que je m’endormis, le sourire dans les yeux.
Fin du Prologue …
Très sympa 😉