VINGT — MAËLLE (suite)
– Vraiment ? dit-elle, tu crois que ça marche. Ça pourrait être une de ces idioties à deux balles.
– Bien sûr que ça marche. Ça marche même super bien, parce que la personne que tu as aidé va aller dire à tout le monde que tu l’as aidé.
Elle fronça les sourcils, je ne l’avais pas convaincue.
– Ah oui. Mais tout le monde va vouloir que je l’aide.
– Non. Ils seront trop timide, parce que tu n’aides pas les personnes qui demande. Ils attendront que tu leur proposes de l’aide.
Elle hocha la tête en souriant.
– Alors, il faut que je trouve quelqu’un. Je crois qu’il y a un gars au boulot qui a des problèmes financiers, je vais lui donner de l’argent.
Je secouai la tête.
– Non. Donner de l’argent, ça tout le monde peut le faire. J’ai une meilleure idée, qui a un autre avantage.
Son front se plissa, elle était à l’écoute.
– Il faut que tu héberges quelqu’un.
– Quoi ? s’écria-t-elle, mais je ne vais pas laisser entrer un étranger, quand même ?
– Non. Je t’ai dit que j’ai une super idée, laisse-moi parler. J’ai un ami dans la classe qui a des problèmes familiaux et il n’aura plus de logements d’ici dix jours. Je le connais, il n’est pas méchant, il faut juste ne pas trop l’embêter et il sera très discret. En plus, il est mineur, alors ta gentillesse n’en sera que plus grande, tu imagines : une mère de famille héberges un pauvre adolescent SDF. Tu serais au top.
Elle réfléchit.
– Mmm… Tu as bien réfléchi à la situation, remarqua-t-elle, soupçonneuse.
Mais j’avais prévue qu’elle me dirait ça.
– Oui, l’autre jour au magasin j’ai entendu des gens jaser à mon passage et ce n’était pas à ton avantage. Alors je me suis dit que j’allais trouver une solution.
Elle sourit.
– Je veux bien le rencontrer. Comment s’appelle-t-il ?
– Alexandre.
Elle hocha la tête.
– Tu peux l’inviter à déjeuner samedi, il pourrait rester l’après-midi pour qu’on puisse faire sa connaissance.
– Je lui dirais, dis-je en souriant.
J’avais réussi. Alexandre allait rencontrer mes parents dans trois jours. Cela n’allait pas être une partie de plaisir mais on pouvait y arriver.
– C’est un rigolo ton copain ? demanda mon père.
J’hésitai. Si je disais la vérité, il allait se vexer. Mais si je mentais Alexandre allait vivre un enfer.
– Euh… je crois que oui. Mais, il est dans une période difficile alors, il ne rit plus trop.
Mon père fit la moue mais ne dit rien d’autre. Je crois que j’avais réussi mon coup.
Nathan, mon petit frère, me regardait avec son regard perçant. Il avait compris que je n’avais pas tout dit. Il m’interrogea du regard et je lui fis comprendre que je lui expliquerai quand on sera seul.
Une fois dans ma chambre, je téléphonai à Alexandre. Il devait être en train d’attendre de mes nouvelles car il décrocha aussitôt.
– Alors ? demanda-t-il.
Même à travers le téléphone je pouvais sentir qu’il était anxieux.
– Tu viens manger samedi et tu restes l’après-midi, répondis-je.
– OK.
Il semblait soulager, mais je sentais qu’il savait que la partie n’était pas encore gagné.
– Merci pour tout ce que tu fais pour moi, murmura-t-il.
Je souris.
– Pas de quoi. À demain.
– À demain.
Et je raccrochai.
Il comptait vraiment sur moi maintenant. Je sentais le poids de sa confiance peser sur mes épaules. Mais j’étais heureuse de cette confiance et de pouvoir l’aider.