Au Champs de Mars,
14h30
.
Interloquée par les propos de Valentin, je détourne la tête et je le regarde.
— Comment ça, tu as entendu parlé de moi ?, je m’étonne. Je ne suis pas parisienne et c’est la première fois que je te vois.
— Un de mes amis suit ton blog et ne rate jamais une de tes publications. D’ailleurs, vous parlez ensemble quotidiennement.
— Attends… Ne me dis pas que ton ami, c’est le mystérieux Aaron dont Laure me parle régulièrement sans trop m’en dire. Si ?, lui demande ma meilleure amie en tombant des nues.
— Si, c’est lui, confirme-t-il avec son sourire chaleureux.
Un blanc s’installe et mon cœur rate un battement avant de repartir de plus belle. Je m’attendais à tout sauf à ça. Qui aurait cru que je tomberais sur un ami d’Aaron aujourd’hui ? Personne, même pas moi. Les chances pour que cela arrive était mince voire inexistante et pourtant, c’est arrivé. On dit souvent que le hasard fait bien les choses. Sauf que là, c’est bien trop gros pour être vrai. Ne pouvant pas m’empêcher de mon montrer suspicieuse voire méfiante, je préfère couper court à ce pique-nique.
— Je suis désolé, mais je dois y aller, j’annonce en me levant.
— Pourquoi tu veux partir précipitamment ? Il y a un problème ?, s’étonne et me demande ma meilleure amie.
— Non. Mais je ne suis pas venu uniquement à Paris d’aujourd’hui pour visiter la Capitale ou pour une virée shopping avec toi. J’ai un rendez-vous personnelle aussi et le temps que je m’y rend, j’ai peur d’être en retard.
— Sans paraître indiscret, il est où ton rendez-vous ? Parce que je peux t’y emmener. Ma voiture est garer à quelques rues d’ici, me demande Ethan.
— C’est gentil, mais je suis obligé de décliner l’invitation.
— Est-ce que ça a un rapport avec ta famille ?, continue ma meilleure amie.
— Oui.
— Je vois. La seule chose que je te demande, c’est de rester joignable et de m’appeler lorsque ton rendez-vous est terminé pour que je vienne te chercher. D’accord ?
Je hoche la tête en guise d’approbation. Ce qui ravi Caroline et me répond avec un sourire que je lui rend. Je salue Ethan et Valentin et remonte le Champs de Mars par l’Avenue Anatole France. Avant de prendre celle de Charles Risler pour remonter la rue de Bellgrade. Le tout à l’aide de mon application GPS que je ne quitte pas des yeux pour éviter de me perdre.
Je ne tarde pas à recevoir un message de Cyril. Un ancien coup de cœur et ami que j’ai rencontré, il y a sept ans. Je l’ai recontacté récemment pour Jordan. J’espère que ses conseils seront utiles, tant pour moi que pour ma mère.
« De Cyril à Laure.
Je suis arrivé au Starbuck.
Tu es où ?. »
« De Laure à Cyril.
À la rue Grenelle.
J’arrive d’ici six minutes environ. »
« De Cyril à Laure.
D’accord.
Tu veux que je te commande un café ?
C’est moi qui offre ;-). »
« De Laure à Cyril.
Je veux bien, merci.
Tu n’es pas obligé, tu sais ?. »
« De Cyril à Laure.
Ça me fait plaisir ;-). »
Je souris à sa réponse et accélère le pas pour ne pas qu’il attende trop longtemps. La patience et Cyril, ça fait deux. Du moins, d’après ce que je me souviens de l’époque. De plus, le revoir me fait plaisir. J’ignore ce qu’il est devenu depuis six ans. Cependant, j’ai pu constater lors de nos échanges récents qu’il était toujours le même. Séducteur, franc et égocentrique. Étrangement avec Cyril, je me suis toujours senti à l’aise et en confiance malgré mon physique peu avantageux. J’espère que cette sensation sera présente aujourd’hui. Sinon, je risque de me refermer comme une huître et je ne parlerais pas ou peu. Ce qui reviendrait à lui avoir fait perdre son temps.
Je continue de remonter la rue Grenelle quelques instant avant de prendre à gauche dans la rue Cler pour rejoindre celle de Saint de Dominique. Après quelques minutes, j’arrive au Starbuck et entre à l’intérieur, signalant ma présence aux baristas présent. Ce salon de café parisien est dans les tons clairs et il est moins bondé que ce que je pensais au vue de la tranche horaire. Quand à l’ameublement et la décoration, il sont moderne et contemporain avec une touche d’authenticité. L’ambiance, elle, est chaleureuse et conviviale et invite à l’échange.
Je cherche Cyril des yeux quelques instants avant de le trouver. Il s’est installé dans un coin plus ou moins isolé de l’établissement. Je le rejoins et nous nous saluons avec une bise et nous échangeons quelques banalités. Puis je m’installe sous son invitation et nous commençons à faire un résumé de nos vie de se six dernières années.
J’ai appris que sa fille, Naïa rentrer au collège à la rentrée prochaine. Qu’il travail encore en saisonnier, voyage toujours par mont et par vaux et qu’il est marié depuis un an. De mon côté, je lui est rapidement parlé de mon ex, Lucas avec qui j’ai rompu il y a dix neuf mois, après trois ans de relation bancale. Du décès mon père, grâce à qui j’avais déjà découvert le vrai visage de mon ex quelques mois après ce drame – qui m’affecte encore – et que je travaillais comme aide à domicile.
Entre temps, notre commande arrive et nous nous désaltérons entre deux anecdotes. Puis, le moment d’aborder le sujet de notre rencontre d’aujourd’hui arriva et le stress et le malaise monta en moi.
— Je suppose que tu n’a pas fait le voyage jusqu’à Paris dans le seul but qu’on se remémore de vieux souvenirs et qu’on échange sur nos vies respectives actuelles. Alors, dis-moi qu’est-ce qui se passe ?, me demande-t-il.
— Disons que je… suis dans une situation familiale complexe et je… j’aurais besoin de tes conseils et de… tes connaissances, je lui avoue hésitante avec les mains moites, le palpitant qui bat vite et fort dans ma poitrine m’assourdissant et en nage.
— Tu ne m’a pas l’air d’aller bien là. Tu ne veux pas enlever ton pull d’hiver ? Tu aurais déjà moins chaud, me propose-t-il en glissant sa main sur la mienne et remontant ma manche.
Ma réaction est directe et violente malgré moi. J’attrape son poignet avec vivacité et brutalité et le retire du mien avec un éclat de voix venant du cœur avant de baisser de tonalité.
— Non ! Surtout pas…
Il me dévisage déconcerté et interloqué. Quant a moi, je baisse les yeux, les joues rouge et me mordant la lèvre inférieure, morte de gêne.
— Je suis dé-désolé, je m’excuse à voix basse.
— Ce n’est rien, c’est de ma faute, me rétorque-t-il en libérant son poignet de mon étreinte. J’aurais dû te prévenir avant de te toucher. Je comprends que cela a pu te surprendre, termine-t-il en s’éloigne et s’installant au fond de son siège.
Loin d’être idiote, je sais qu’il dit ça pour éviter que je me sente coupable, mais c’est déjà trop tard. Un blanc lourd et pesant s’installe entre nous et nous fixons nos cafés.
Bientôt la porte de l’établissement s’ouvre et mon regard se porte sur l’homme accompagné, qui vient d’entrée. Happé par celui-ci, je le fixe, tout étant habité par une sensation étrange.