CHAPITRE 3
Bob rejoint son fidèle destrier, une vieille Golf II noire sortant tout droit des années 80. L’un des derniers modèles en circulation. Entre les emballages de paquets de clopes vides, il sort un vieux cd de sa boîte à gant, qu’il glisse dans le lecteur de son autoradio. Comme toujours, le périphérique est bondé de monde. Un nuage noir de fumée se forme au dessus des véhicules empêchant d’apercevoir les avions décollant de Roissy. Après avoir toussé deux, trois fois, il se résigne et referme la vitre, préférant être intoxiqué par la fumée de son joint. Tout en tirant dessus, il se délecte des notes Jazzy et Blues de Tom Waits, et de sa poésie douce et amère. Il coupe la route à un chauffeur livreur qui montre son mécontentement en appuyant avec insistance sur son klaxon. Il tourne à la prochaine sortie pour accéder au 20ième arrondissement. Il ralentit. Un accrochage a eu lieu sur le bord de la route entre un motard et un conducteur. La police s’occupe de la circulation, et disperse la foule envahissant les trottoirs. Il se débarrasse de son pétard. La densité de Paris a doublé lors de ces 10 dernières années, devenant semblable aux villes telles que Tokyo, Pékin ou encore Mumbaï. La plupart des gens ont repris l’habitude de remettre leur masque dans les rues. Après la pandémie de COVID, place à l’air pollué. Les maladies respiratoires et les cancers n’ont jamais autant explosés pour les habitants de la capitale. Les pauvres gens sont laissés à l’abandon et peu de personnes sont logées convenablement. Bob se contente de vivre dans son bureau situé dans la défavorisée Cité de Python-Duvernois. Après avoir garé sa Clio dans son garage qui a été récemment recouvert de graffiti anarchiste par des jeunes du quartier, il passe entre deux immeubles délabrés puis s’engouffre dans une petite impasse. Il descend les marches, le menant dans une sorte de sous sol. Il traverse le long couloir en trifouillant ses clefs.
Lorsque il tourne à gauche puis relève la tête, il tombe nez à nez avec une vieille femme étrange squattant le seuil de sa porte. « Au non pas elle… » se dit-il. Ne s’étant pas encore fait remarqué, il en profite pour reculer à pas de loup. Même s’il n’a pas d’autre projet, il n’avait pas l’humeur de l’écouter. Il glisse le long du mur. Attentive, la vieille dame réagit, d’une voix tremblotante d’inquiétude.
-Qui va là ?! Il… Il y a quelqu’un ?!
Caché derrière la façade, la respiration de Bob s’intensifie. Ses tocs reviennent au galop. Il renifle bruyamment. « Non pas maintenant » s’alarme t’il. Il passe sa main sur sa bouche et se concentre pour lutter contre son syndrome. Il bloque son visage en fermant les yeux et en coupant son souffle. Mais la pression est bien trop forte. Un violent pet inattendu lui échappe et résonne dans le couloir. En panique, la femme sort de son minuscule sac à main, son téléphone portable à clap et se met à hurler.
-Ah ! Je sais que quelqu’un est là ! J’appelle la police, sortez !
Devant ces menaces, Bob rongé de honte se sent obligé de sortir de sa cachette.
-Calmez vous madame Adamsky, ce n’est que moi. Je cherchais juste… mes clefs.
-Vous m’avez fait une peur bleue ! S’écrie t’elle en serrant sa poitrine avec ses mains.
Bob tourne la clef dans la serrure. Dos à elle, il l’a soupçonne être entrain de le sentir.
-Je vous en pris, rentrez. Dit-il en cachant son dégoût.
Il referme derrière eux sa porte en bois marron composé d’une vitre en verre dépoli où son nom est inscrit en gras « BOB POLMES » suivit de sa profession « DETECTIVE PRIVE ». Le parfait cliché.