CHAPITRE 4
Bob est accueilli avec joie par Walter, un bulldog français au couleur noire et blanche. Pendant qu’il le caresse avec joie, le molosse lui léchouille le visage. Madame Adamsky scotchée contre la porte, tremble de tout son corps. Bob tente de la rassurer.
-N’ayez crainte, il ne ferait pas de mal à une mouche.
-Vous… vous, pourriez le sortir d’ici s’il vous plaît… Bégaie t’elle.
Consterné, Bob, soulève son chiot et l’enferme dans les toilettes.
-Je suis désole mon pote, je revient vite.
Walter lâche un léger soupir en se léchant les pattes. Bob invite la vieille dame étrange, à prendre place à son bureau. Doté d’aucune fenêtre, la pièce est sombre, seulement éclairée par un néon. Malgré une VMC à bas prix, la brume de la fumée de cigarette a du mal à se dissiper. Se servant de bureau de travail et de logement, l’appartement est dans un piteux état. Pour gagner un peu de place, un lit escamotable vertical y est installé sur le côté. Il est en ce moment même déplié. Les draps sont tachés et troués. Sur son bureaux rustique, il prend place en face de Madame Adamsky, devant son ordinateur fixe datant des années 2010. Même si ça semble compliquée, elle est encore plus repoussante lorsque on se trouve à quelques centimètre de son visage. Le gras ressort de toutes ses pores. Sa courte coiffure frisée a la texture de la paille, arrondie son visage d’autant plus. Bob n’a pas le souvenir d’avoir déjà vu une moustache aussi épaisse sur une femme. Malgré toutes ces caractéristiques, il est impossible de lui donner un âge précis. Bob se sert un verre de whisky bon marché sans prendre la peine d’y proposer.
-Que puis-je pour vous Madame Adamsky ?
-Je ne coucherai pas avec vous. affirme t’elle avec assurance.
Bob expulse le contenu de son verre.
-Je vous demande pardon ?! S’exclame t’il, la nausée lui remontant dans la gorge.
Elle montre du doigt le lit dépliée.
-Non, non ce n’est pas ce que vous croyez ! C’est un malentendu ! Je n’attendais personne aujourd’hui. Je n’ai pas pris le temps de ranger ! S’affole t’il.
Il se précipite, soulève le plumard, et avec témérité, réussit après une multitude d’échec, à le replier contre le mur pour éviter tout autre malentendu. Essoufflé, il reprend sa place et commence à perdre patience.
-Bon, en quoi puis-je vous aider ? je n’ai pas toute la journée madame.. Demande t’il en agrippant son carnet de note et de quoi écrire.
Paranoïaque, elle gesticule sur son dossier puis rapproche son visage du sien en chuchotant.
-Vous n’avez pas de micro sur vous ?
-Non Madame. Notre conversation est confidentielle, bien entendu.
-Cette affaire est de la plus grande importance…
-Je vous écoute.
-Les chattons..
-Je vous demande pardon ?
-Les chattons… Les chattons disparaissent…
-Vos chattons ont disparus ?
-Non, non pas les miens ! Je n’ai pas d’animaux. Trop dangereux monsieur, bien trop dangereux. Puis pas le temps. Pas la place. Ceux des gens monsieur ! Tout à commencé à Shangaï puis au Congo, avant de se produire en Europe, à Varsovie entres autres, et maintenant c’est au tour de Paris ! A Paris même. Et ça va continuer. Encore et encore…
Pendant quelle débite ses élucubrations, Bob inscrit en italique sur son calepin le mot « Folle » accompagné d’une grossière caricature de son visage.
-La société du triangle, ça vous parle ? Le questionne t’elle, la voix tremblotante de peur.
-Je n’en ai jamais entendu parler non.
-Argh ! Crie t’elle d’une voix stridente. Puis-je vous faire confiance ?
-Je le crois oui. Répond t’il peu convaincu.
-Vous êtes un raté donc vous avez tout d’un intègre.
-Euh… Je vous remercie. Rajoute Bob, ne sachant comment le prendre.
-Il y a donc que vous capable de retrouver les chiots.
-J’ai peur de ne pas bien vous suivre, ce n’était pas des chatons ?
-Chatons, chiots c’est pareil ! Faites attention à votre chiot Monsieur ! Hurle t’elle soudainement.
Irrité, elle buffle violemment, en agrippant une feuille blanche, et un stylo plume traînant sur le bureau bordélique, avant d’y dessiner un triangle au trait épais suivit de son numéro de téléphone, d’une adresse, d’une date et d’une heure. Elle le plie consciencieusement puis le fait passer à Bob. Lorsque leurs mains se rapprochent, Madame Adamsky en profite pour la lui agripper avec poigne. Un relent d’écœurement traverse l’estomac de Bob à la vue des croûtes épaisses présentes sur ses doigts.
-Je compte sur vous monsieur Pomme, je compte sur vous !
Bob fuit son regard et ne prend pas la peine de rectifier la prononciation de son nom. Elle vérifie ensuite l’heure sur sa montre.
-Vite, vite, je n’ai rien à faire là. Ils sont à mes trousses. Il ne faut pas qu’ils me trouvent !
Bob est dans l’incompréhension la plus totale. Madame Adamsky saute de sa chaise. Elle se précipite vers la porte et observe le couloir par l’entrouverture.
-Pouvez vous, jeter un coup d’œil s’il vous plaît.
-Euh, oui bien sûr.
Bob se lève paresseusement puis rejoint le rez-de-chaussée.
-Personne en vue, vous pouvez y aller.
Madame Adamsky le frappe à l’épaule avec la paume de sa main.
-Plus discrètement ! Malheureux ! Vous êtes sûr d’être Détective privé ?!
Après l’avoir sermonné, elle s’en va au galop traînant son poids comme elle peut. Après avoir effectué quelques mètres, elle s’arrête pour reprendre son souffle.
-Allez-y, allez-y, à l’adresse ! Constater ce qu’il ce trame. Vous ne le regrettez pas ! Ouh ça non ! Cette affaire vous propulsera au sommet monsieur! Le peu d’humanité qui reste dans ce bas monde compte sur vous.
Elle reprend sa route, avant de disparaître sous les yeux écarquillés du détective.
Du tiroir de son bureau, Bob sort un os de Boeuf qu’il donne à son Walter pour le récompenser de sa patience. Il se vautre dans sa chaise en repensant au propos confus de Madame Adamsky. Atteindre les sommets de la gloire est la dernière chose qui serait susceptible de l’intéresser. L’humanité ? Il n’y croit plus depuis des lustres. Qui est encore assez naïf pour y croire encore. Il relit le mot de Madame Adamsky en disant que cette femme est tout bonnement cinglée, avant de le froisser en forme de balle et de le jeter en direction de sa poubelle. Le boule ricoche sur l’angle et se perd sur le sol avec le reste des objets sans importances.