Quelque part dans le sud de la France, P1 : Chap 1

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PARTIE 1

Chapitre : 1

 Cachouac, est une petite commune minière située dans le sud-ouest de la France. Riche en houille, roche carbonée sédimentaire combustible correspondant à une qualité spécifique de charbon, elle connut son essor économique et démographique grâce aux mines malgré les conditions de travail des plus pénibles et dangereuses. Ce qui aura pour effet de nombreux décès et de nombreux orphelins.

Après une multitude de grève, dont les principales de 1948 et celle entre 1961 et 1962 où plus de 1500 mineurs restèrent 66 jours au fond de la mine, les ouvriers ne purent lutter contre la grande machine et le déclin de l’industrie minière (la dernière mine a définitivement fermée en Juin 2001). La région réussira à se relever, en devenant un site industriel. Le travail était redevenu prospère mais ce fut de courte durée.

Même si ce n’est pas pour les mêmes raisons, l’histoire se répéta encore et encore, et les usines ont fermées au fur et à mesure, à cause du rachat d’entreprise et de la mondialisation, engendrant le désespoir d’une partie de la population.

Vivante et festive dans les années 80-90 où le mouvement punk fut à son apogée en France, la commune est devenu l’ombre d’elle-même. Les bars se sont vidés si ce n’est la présence des derniers hommes noyant leurs démoralisations dans leurs verres. La culture est au point mort tout comme l’éducation. Les derniers jeunes vagabondent dans les rues où leurs perspectives d’avenir s’évaporent au rythme de leurs pas dans des destinations inconnues. Leurs espoirs et leurs rêves se sont dissipés avec le reste de la ville. Aucune perspective d’avenir pour ceux qui sont restés fidèles à leurs racines. Ici, une vieille école primaire et un petit collège perdurent encore à exister. Mais pour combien de temps ? Peu de gens dont les études sont des priorités finissent leurs vies ici. Le SMIC est le salaire le plus commun des habitants tant bien pour ceux qui ont trouvé un emploi. Un trou devenu paumé. Les murs des maisons sont délabrés. La moitié des bâtisses sont laissées à l’abandon. Le peu de gens qu’ils restent vives entassés dans leurs maisons avoisinantes. La majorité de la population est composée de vieilles personnes, à qui il reste comme seule activité, la promenade de leur clébard dans le parc municipal. C’est triste et gris, et pourtant nous sommes en plein été.

C’est dans ce climat que Jeff et Yann, amis depuis leur tendre enfance s’y sont fait et flottent sans but ni désir prenant part à leur hobbies. D’ailleurs, ils sont actuellement en plein concours de pétanque organisé par Miche, le vieux propriétaire de « L’embuscade », le bar situé dans le centre-ville.

Plutôt doués dans cette discipline, Jeff et Yann sont en lice pour la troisième place de la doublette contre Roger et le Dodge, deux anciens champions Aveyronnais de pétanque du début des années 2000. Des adversaires coriaces et de mauvaises fois qui ne leurs laisseront aucune chance. Il faut savoir qu’à la pétanque, ça ne rigole pas. Tu peux être les meilleurs amis du monde, une fois que tu es sur le boulodrome, il n’y a plus d’amitié qui tienne. Pour mettre un peu de peps lors de leur entraînement, il arrivait à Jeff et à Yann de mettre en jeu différentes choses. Ils misaient des paquets de bonbons, des briquets, ou un tas de bricoles, pour finir à parier à coup de 30 balles, jusqu’à même mettre en jeu une télévision ! Yann s’en souvient très bien. Celle que Jeff a dans son salon n’est d’autre que la sienne. Il se contente maintenant d’un vieil écran 20 pouces pour ses parties de consoles. Mais une parole est une parole.

Contre c’est vieux de la vielle, la partie est plus que tendue. Ses salops n’ont pas arrêté de rouspéter de tout son long, déconcentrant par la même occasion Yann, très vite perturbable. Dodge n’arrêtait pas de causer, faire des commentaires, râler pour un rien. Lorsque, ils jouaient trop près, trop loin, rien ne lui échappé. Le joueur le plus insupportable contre lequel on peut jouer. Malgré toutes les tentatives de Jeff pour calmer son collègue, ce dernier n’était plus dans sa partie et à deux doigts de balancer sa boule dans la gueule du Dodge.

En dépit de tous les essais des vieux roublards, Jeff et Yann réussissent tant bien que mal à leur tenir tête par miracle, jusqu’à faire un ex-aequo parfait de 12 à 12.

Mais malheureusement pour eux, la dernière manche est mal engagée. Roger pointeur de son équipe, réussit à taper dans sa boule et à les avancer jusqu’au cochonnet, dépassant le pourtant joli point de Yann, qui en furie, ne peut s’empêcher de gueuler « Quel chance de cocu ! ». Sentant une faille, Dodge en rajoute une couche. Yann est à bout de nerf.

-Je vais me le faire !

Jeff s’interpose.

-Calme toi, il me reste une boule ça peut le faire !

-Assure mec ! Je veux pas perdre contre cette paire de connard!

-Ne me mets pas la pression, tu sais très bien que je suis une merde quand tu me mets la pression.

-J’ai rien dit, je dis rien.

-Merci.

-Mais assure  !

-Ferme la putain !

Jeff se prépare au tir de sa vie. Il se place dans le cercle. Pour remporter la partie pas besoin de cogiter, il faut faire un carreau sur la boule la plus proche du cochonnet. Il prend sa respiration. Des coups comme ça, il en a réussi une centaine mais jamais dans un moment aussi crucial. Il se concentre, tente d’oublier les rires et les commentaires de Dodge et de Roger. Il souffle, prend son temps, cherche la position la plus stable, sa boule bien placée dans la paume de sa main. Lorsqu’il le sent, il balance son bras, sans freiner son geste. La boule prolonge son mouvement. Il est droit. Pendant un centième de seconde, sa mâchoire se crispe et il ferme les yeux automatiquement. Il entend le bruit de la boule claquer celle de son adversaire. Mais maintenant, faut croiser les doigts pour qu’elle soit resté à côté du cochonnet. Avant d’ouvrir les yeux, il entend Dodge faire un commentaire désespéré: « Putain de merde, c’est pas vrai ». Yann lui saute dessus. D’un enthousiasme exagéré, il le soulève dans les airs. Jeff comprend enfin. Grâce à son tir, ils remportent la partie. Yann le fait virevolter dans tous les sens.

-Arrête tu vas me faire vomir !

Yann explose toute sa rage qu’il avait contenue jusqu’alors, enchaînant les gestes grossiers et les injures envers le duo d’adversaire, qui tête baissée quitte le boulodrome.

-C’est ça barrez-vous sans nous serrer la main, sans même nous payer un verre, bande de gros tas de merde ! Hurle Yann en leur direction.

Après s’être vidé de son énergie débordante, il part récupérer son prix, une enveloppe de 50€ en liquide. Pour fêter leurs troisièmes places rien de mieux que de dépenser l’argent gagné, chez celui qui leur à fait gagner, dans leur bistrot favori, « L’embuscade » de chez Miche.

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