Les Crapules de la Cabane – Chapitre 7

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                           Chapitre 7 : quand une porte se ferme…

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Aussitôt la porte de la Cabane poussée, on se mit tous les quatre à ratisser la salle du regard. Pas de Lenny. Merde. Il passait ses journées au bistrot, et pour une fois qu’on avait besoin de voir sa sale trogne d’abruti, il manquait à l’appel. J’expirai un profond soupir et posai mes poings sur mes hanches, tapotant du pied.

— Je t’ai déjà dit de pas revenir avant d’avoir réglé ton ardoise, Harlem ! Casse-toi ! hurla Walter.

— Calme-toi papy, on fait qu’passer !

— D’ailleurs celui-là aussi il m’en doit une, d’ardoise ! Et une longue comme le bras ! ajouta-t-il en pointant son doigt vers Mohan.

— Je t’ai déjà dit que j’te paierai quand le système cessera de taper sur la gueule des prolos à grands coups de taxes et d’imp… commença l’anarchiste pour se justifier.

— De quoi ? D’impôts ? Depuis quand t’en payes toi des impôts ?! Espèce de crevard ! Et puis moi, j’suis pas le gouvernement, j’suis un prolo aussi, p’tite bite ! Un travailleur précaire ! Un oublié de la société ! Et moi j’en paye des putain d’impôts espèce de…

— Ça va, c’est bon, j’ai compris ! J’te règlerai ça la semaine prochaine !

— T’as intérêt ! Sinon j’te pète les genoux, Mohan ! s’excita Walter en brandissant sa béquille.

Je levai les yeux au ciel. Angus ravala un petit rire moqueur et Mohan secoua la tête. Taz lui, rêvassait, comme d’ordinaire.

— Faudrait déjà qu’il puisse mettre un pied devant l’autre, le vieux, chuchotai-je à l’oreille de Mohan.

— Ouais, il traine la patte, l’ancêtre. C’est l’alcool ça !

— Non non, c’est juste la vieillesse. Il a au moins cent ans, le machin !

Pas cent ans, non, mais il descendait une pente sacrément raide. Walter, c’était comme un cafard. Increvable. Je m’approchai du comptoir, suivi de ma clique et claquai des doigts pour attirer l’attention du vioque qui avait le nez dans sa caisse.

— Dis-moi, Walter !

— T’es encore là, toi ?! Je t’ai dit de t’casser !

— Mais merde, détends-toi ! J’veux juste te poser une putain de question ! Ça aussi tu l’fais payer, bordel de merde ?! C’est de perdre tes ch’veux qui t’rend aussi hargneux ?!

— Tu peux parler toi, avec tes tempes qui s’élargissent ! A mon âge, t’auras plus un poil sur le caillou !

Il n’avait pas tort. Quoi que, à son âge, je ne serais peut-être même plus de ce monde. Tôt ou tard, mon foie finirait par me lâcher. Ça ou autre chose. C’est qu’ils n’avaient pas une espérance de vie très longue, les piliers de la Cabane. Il n’y avait que Walter qui tenait encore debout. Du moins, presque debout.

— Bref ! le coupai-je avant qu’il ne m’envoie un fion de plus. Tu saurais pas où on pourrait trouver Lenny ?

— Lenny ? demanda Walter, comme s’il avait mal entendu.

— Oui, Lenny, insistai-je.

— Celui qui bave sur mon comptoir toute la journée ?

— Celui-là même.

— Et qui a encore moins de cheveux que toi et vachement de bidoche ?

— C’est ça.

— Que sa mère a fait de la zonzon ?

— Oui, Walter ! Lenny ! C’est ce mec-là !

— T’es pas au courant ?

— Au courant de quoi ? demandai-je en haussant un sourcil, tandis que mes acolytes se rapprochaient, friands de ragots.

— Il a passé l’arme à gauche, pas plus tard qu’hier !

— Hein ?

— Il a cassé sa pipe, le bougre !

— Quoi, il est mort tu veux dire ?

— Ouais, il a tiré sa révérence. Dans son lit. Couvert de pisse. Il est mort comme il a vécu, comme un pignouf.

Merde… Je grognais entre mes dents. Ça me faisait rager en dedans d’avoir tout ce fric qui dormait dans des briques de coke sans pouvoir en faire quelque chose !

— Et tu saurais pas où on pourrait trouver sa daronne, à Lenny ? demanda Mohan.

— Qu’est-ce que vous lui voulez à la vieille de Lenny ? s’étonna Walter.

Je m’apprêtais à le rembarrer, en lui suggérant de se mêler de ses affaires, mais Taz me coupa l’herbe sous le pied, avec son innocence habituelle !

— Ben il parait qu’elle s’y connait vachement en trafic de drogues, avoua-t-il avec une sincérité déconcertante.

Mais quel neuneu ! Une vague de « chut » à son encontre, il serra les dents d’un air confus et sursauta quand le coude d’Angus frappa ses côtes.

— Non, mais c’est pas pour nous ! se ravisa Taz en grimaçant de douleur. C’est pour un copain qui veut vendre de la cocaïne.

A nouveau, on lui somma de se taire. J’agitais ma main devant ma gorge, lui signifiant clairement que s’il ouvrait encore sa gueule, ce serait la dernière fois.

— Hein ? grinça le tavernier.

— Non non, rien, fais pas attention à lui, répondis-je en haussant les épaules. Non, c’est parce qu’on voudrait lui présenter nos condoléances, à la maman de Lenny.

Walter s’apprêtait à nous répondre quand un sifflement discret attira mon attention. Je regardais autour de moi, sans parvenir à identifier la source du chuintement.

— Pssss ! me fit à nouveau un type au fond de la salle.

Il agita sa main, me faisant signe d’approcher. Je posai mon index sur ma poitrine, l’air ahuri, cherchant à vérifier s’il s’adressait à moi. L’homme acquiesça. Mon regard intrigué croisa ceux de mes compères et on s’avança finalement jusqu’à l’étranger. Je n’avais jamais vu sa sale tête auparavant, il n’était pas du coin. Il nous incita à nous asseoir à sa table, d’un signe de tête furtif. On s’exécuta dans un silence de mort, toisant l’inconnu d’un air méfiant.

— J’ai entendu votre conversation.

Je déglutis nerveusement. Il fallait se méfier, il y avait toujours des oreilles qui trainaient dans ce gourbi. Et des sales oreilles !

— Je crois que je peux vous aider, ajouta le quinquagénaire.

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2 Commentaires
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DeJavel O.
2 années il y a

Alors les affaires démarrent !

Évidemment, avoir Taz dans la bande ce n’est pas ce qu’on pourrait appeler un avantage mdr.

Donc des personnages qui se définissent, tous aussi peu doués les uns que les autres ! Un vrai plaisir à lire !

Envoyez la Crapule 8 !

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