C’est parti pour un nouveau chapitre, en compagnie de Gwenvael et Galahad !
Nous arrivâmes à Wahkan quatre jours plus tard. J’étais épuisé, sale et me sentais malade ; et quand je regardais Galahad, je me demandais comment il faisait pour tenir debout alors qu’il ne m’avait plus laissé monter la garde une seule fois. Nous n’avions plus fait de mauvaises rencontres ; cependant, cela ne m’avait pas empêché de continuer d’entendre sans cesse des murmures autour de moi.
Wahkan ressemblait à une ville médiévale. Elle était entourée de hauts remparts, et la grande porte en fer était protégée par une bonne dizaine de gardes. Ceux-ci ne firent pourtant aucune difficulté pour nous laisser passer et s’inclinèrent même devant nous – devant Galahad. À l’intérieur de la cité, les maisons avaient à peu près la même allure que celles que nous avions vues dans le village où nous avions dormi, tout comme les rues. Ici, les gens se déplaçaient à pied, à cheval ou dans des espèces de charrettes tirées par des bœufs ou des chevaux. Tous ceux qui nous croisaient saluaient Galahad avec respect. Celui-ci leur répondait brièvement ; il marchait rapidement, et bientôt, je devinai quel était son but. Il se dirigeait vers le petit château situé au milieu de la ville.
Quand nous arrivâmes, deux gardes nous ouvrirent la lourde porte. Un homme, probablement un serviteur, nous mena dans un long corridor.
– Je vais voir si le prince peut vous recevoir, dit-il d’une voix monocorde.
Galahad hocha la tête.
Quelques minutes plus tard, un homme qui devait avoir entre trente et quarante ans arriva. Quand il aperçut Galahad, un sourire fendit ses lèvres.
– Seigneur Galahad ! Comme je suis heureux de vous voir !
– Le plaisir est pour moi, Yuma, répondit Galahad.
Les deux hommes se serrèrent la main et échangèrent quelques nouvelles ; après quoi, le dénommé Yuma sembla prendre conscience de ma présence.
– Qui est ce jeune homme ? demanda-t-il en me saluant.
– C’est lui, répondit Galahad.
Pas un mot de plus. Et pourtant, l’expression de Yuma changea instantanément.
– Voulez-vous dire que c’est… l’Orenda ? questionna-t-il à voix basse d’un ton incertain.
– Beaucoup d’éléments semblent en effet le confirmer.
Yuma resta pensif. Puis il finit par dire à Galahad :
– Je crois que vous avez beaucoup à me raconter…
Galahad sourit.
– Oui. Mais j’ai aussi beaucoup à demander, à commencer par l’hospitalité…
– Bien sûr. Vous pourrez rester tant que vous voudrez ; ma demeure est vôtre, tout comme ma cité. Je vais vous faire mener à vos chambres.
Il appela des domestiques, et l’un d’eux me fit signe de le suivre, pendant que Galahad partait dans la direction opposée.
Le serviteur me fit monter deux étages et ouvrit une porte au début d’un long couloir.
– J’espère que Monsieur sera satisfait, me dit-il comme s’il récitait un texte appris par cœur. Cette chambre est l’une des seules possédant l’eau chaude.
« Encore heureux », pensai-je. « Il ne manquait plus que je prenne un bain froid. » Cependant, le domestique avait l’air si fier de m’annoncer cette nouvelle que je ne fis aucun commentaire.
– Si Monsieur a besoin de mes services, qu’il n’hésite pas à le faire savoir, poursuivit-il. Monsieur pourra également laisser ses vêtements dans la salle de bains ; d’autres seront mis à sa disposition.
Il attendit une minute, puis, comme je n’avais rien à dire ou demander, il s’inclina et me laissa seul.
La pièce dans laquelle je me trouvais était assez spacieuse. Elle comportait un grand lit, un bureau sur lequel se trouvaient du parchemin, des plumes et un encrier, une chaise, un grand fauteuil et une cheminée. Dans le fond, une porte menait à une salle de bains. Il n’y avait ni douche, ni lavabo, seulement une grande baignoire ronde en marbre avec deux robinets. Dans un placard, je trouvai des serviettes et toutes sortes de savons colorés. Alors que je venais d’enlever mon T-shirt, on frappa à la porte de ma chambre. Je n’eus ni le temps de répondre, ni le temps de me rhabiller que Galahad entra. Il posa des vêtements sur mon lit.
– Tiens, me dit-il. Ça passera un peu plus inaperçu que ce que tu portais jusqu’à présent. Qu’est-ce que c’est que ça ?
Il désignait les hématomes et autres marques que j’avais sur le corps. Je haussai les épaules.
– C’est la nuit où vous m’avez dit de fuir, mentis-je. Je me suis cogné un peu partout. Je ne voyais rien dans le noir.
Galahad fronça les sourcils et essaya de croiser mon regard, mais je ne lui en laissai pas le loisir.
– Admettons, finit-il par dire. Cet après-midi, je vais m’entretenir avec le prince Yuma. Tu pourras demander à un serviteur de te montrer les cuisines si tu as faim, ou la bibliothèque si tu veux faire des recherches.
– Très bien, répondis-je. Mais je crois que je vais commencer par un bain, suivi d’une sieste…
Galahad esquissa un sourire.
– C’est un bon programme, concéda-t-il.
Sur ce, il s’apprêta à quitter la chambre, mais il s’arrêta soudain et se retourna.
– Gwenvael, j’oubliais : je ne veux pas que tu sortes de ces murs. Ne va ni dans la cité, ni dans le jardin, compris ?
Et voilà, ça recommençait. À peine arrivés que Galahad jouait encore les dictateurs.
– Oui, marmonnai-je, tout en pensant que je me moquais éperdument de ce qu’il pouvait me dire.
De toute façon, quand j’aurais obtenu les informations dont j’avais besoin, je fausserais compagnie à Galahad et me mettrais en route pour Riñvier.
Je n’avais aucune idée de ce qui m’attendait là-bas, mais une chose était certaine : je n’avais rien à perdre.
À suivre mardi prochain 🙂