Episode 10

10 mins

La mystérieuse voiture de l’autre soir ne possédait pas de plaque d’immatriculation. Et avec le choc de l’action je n’avais pu identifier la marque de celle-ci.
Laetita avait des doutes sur ce que Seb avait eu le temps de lui raconter. Plus tard, elle m’avait prise à part et je m’étais expliqué. Ses craintes avaient été fondées mais je lui assurais que maintenant, Seb ne se souvenait de rien. J’y veillais et puis en le raccompagnant, il ne me reparla pas une seule fois de l’incident de la veille. Mais il restait le problème du mystérieux conducteur, qui à coup sûr, connaissait maintenant mes aptitudes.
– Le fait qu’il n’est pas mis de plaque veut dire qu’il savait probablement qui tu étais m’avait dit Laetitia assis à l’extérieur d’un café-restaurant. Sans compter qu’il est passer par une route que personne n’emprunte.
– Autant dire qu’il savait ce qu’il faisait dis-je. Ça n’a absolument rien à voir avec le hasard.

Je finis par rentrer sur Lyon pour reprendre ma vie d’étudiant. Par chance ou bien par habitude d’un travail acharné, je n’éprouvais aucun mal à suivre. Sciences Po faisait partie de ces éléments qui me maintenait encore debout. Une des choses qui me permettaient d’avoir un avenir assuré si les choses finissaient par se tasser. Alors bien que ce ne soit pas ma principale préoccupation, je faisais tout de même en sorte d’assurer. Mais l’homme ou la femme du nouvel an ne cessait de me hanter.
Un soir j’eus la surprise de voir un papier qui dépassait, sous le paillasson de mon entrée. Sans doute un mot de propriétaire me prévenant de payer le loyer à temps. J’avais eu le malheur de l’oublier une fois seulement. Et j’aurais préféré pour être honnête. En lisant le contenu du message, mon sang se glaça. « Rendez-vous à 18h Mardi au bar le bon moment ». Il fallait donc que je m’y rende demain.
Fallait-il que je prévienne Laetitia ? Pas tout de suite. Pour le moment je devais m’entretenir avec cet individu afin de déterminer ce qu’il attendait. Je ne savais pas ce dont il était capable.S’il connaissait mon adresse ici, peut-être savait-il ou vivait ma famille. La maintenant je ne savais rien de lui. J’étais clairement en mauvaise posture, mais en le rencontrant demain, je pourrais en savoir plus.
Je pensais prévenir Nathan par message mais je me retins. L’homme en question pouvait peut-être voir mes messages. Bref je ne voulais prendre de risques. Et puis je ne voulais pas mêler Nathan à mes problèmes. Je l’y avais bien assez mêlé comme ça.
Le lendemain je retrouvais Pierre et Noémie toujours inséparables. La journée passa très lentement. Les pensées pour cette mystérieuse personne me trottaient sans cesse dans la tête, et une fois les cours terminés, je ne perdis pas une minute avant d’aller au point de rendez-vous. Une fois arrivé, je fixais les tables alentours voir si quelqu’un me faisait signe pour m’inviter à sa table. Je ne vis personne le faire. Je m’installa en terrasse et attendit avec angoisse celui ou celle qui s’intéressait à mon cas.
Je consultais ma montre, j’avais de l’avance. Et à 18h précise, un homme vint s’asseoir en face de moi, légèrement stressé lui aussi. Il était plutôt grand mais fin comme une asperge.
– Je sais qui vous êtes dit-il aussitôt.
– Et qui suis-je ? Demandai-je. Je faisais de la provocation pour masquer ma peur plutôt évidente.
– Jouer pas à ça avec moi s’il vous plaît. Je sais que vous habitez au 28 rue Jean Misfard sur Lyon et votre maison familiale est sur Mimizan.
Ce type était bien renseigné. Je me demandais pourquoi il me disait tout cela. Que voulait-il en échange ? S’il était question d’argent, il serait déçu de la maigre somme que je lui donnerai.
– Qu’est ce que vous me voulez ? j’avais monté le ton de manière à l’intimider. Ma colère était bien réelle.
– Juste après votre bagarre, des hommes en costume sont arrivés sur mon lieu de travail et on intimider mon boss. Je l’ai su parce qu’il était livide lorsqu’il est ressorti de son entretien avec eux.
J’ai appelé des collègues d’autres bureaux et ils avaient eu des cas similaires. Et étrangement, toutes nos recherches ont été supprimées. Par chance j’en ai récupérées à temps et j’ai finalement réussi à vous reconnaître grâce à une reconstitution plus propre de la vidéo. Ne faites pas semblant de nier vous perdez votre temps.
Cela correspondait à ce que le chef de l’agence avait dit. Ils avaient effacé les infos. Mais un petit malin était passé dans les mailles du filet.
– Je peux même vous dire que j’ai assisté au sauvetage de votre ami. Désolé de vous le dire comme cela mais j’étais le conducteur.
Si nous étions seuls, je lui aurait à coup sûr fracassé le crâne. Il sentit ma tension car il continua :
– Mais je ne comptais pas lui faire de mal je ne suis pas un meurtrier. J’allais même m’arrêter avant si vous n’étiez pas apparu aussi vite.
Ce qui expliquait sans doute son arrêt après notre chute. Mais son argument ne me rassurait pas pour autant.
– Vous êtes quoi ? Un journaliste d’investigation quelque chose du genre ?
– Non juste journaliste dit-il.
– Et qu’est ce que vous attendez de moi ?
– Je veux savoir qui vous protège. C’est quoi des flics ou un service de sécurité ?
– Pourquoi vous voudriez le savoir ? Vous cherchez à faire le buzz en faisant tomber une soi-disant organisation secrète ?
– Au moins révéler ce qu’ils font.
– Écoutez vous vous êtes mêlés de ma vie privée et je ne suis pas au courant de ce que vous me chantez ! Et puis c’est déjà suffisamment compliqué d’avoir ces…pouvoirs ou je ne sais quoi. Je veux juste vivre ma vie en paix. Vous pouvez respecter ça ?
– Je comprends dit-il. Mais ce qui est arrivé est absolument dingue je veux dire…c’est du jamais vu. Vous vous êtes défendus de manière tellement incroyable ! Vous devez être l’homme le plus fort sur terre.
La bonne nouvelle c’est qu’il ne savait pas pour Nathan, et les éventuels autres personnes que je ne connaissais pas.
– Croyez-moi c’est pas le genre de chose que l’on peut dévoiler n’importe quand. Et pour tout vous dire ce soir-là je pensais finir par terre en sang.
– Je me doute bien dit-il. Et j’imagine la frayeur que vous avez du ressentir. Mais je sais très bien qu’il y a des gens derrière vous. Un scoop arrive, des hommes avec une allure étrange passent, et puis plus rien !
– Nous sommes peut-être écoutés et suivi ! Dis-je. Je l’avais déjà trop laissé parlé. Même si je n’avais aucune confiance en lui, je ne lui souhaitais pas de se faire attraper par ces agents. Qui sait de quoi ils étaient capables.
– Je m’en doutais fortement. Je savais que je prenais un risque en venant ici.
– Alors pourquoi faites vous cela ?
– Pour la vérité. Il se passe des choses dans le monde, des choses secrètes que les gens méritent de connaître. J’ai fait ce métier pour pouvoir mettre en lumière les zones d’ombres. Tant pis si je meurs ou que l’on me fasse disparaître. Je tiens l’info la plus folle de toute ma carrière.
Ce type était fou. Il faisait passer l’information avant sa propre vie. Je reconnaissais à ses yeux écarquillés et ses manières expressives qu’il était animé d’un réel intérêt pour mon histoire. Même sans vraiment le connaître, on pourrait croire qu’il s’agit d’un homme qui se contentait de rédiger des articles classiques que l’on retrouve sur les journaux ou médias sociaux. Et là il tenait enfin un sujet digne d’un film de science-fiction, quelque chose dont on ne supposerait jamais l’existence. Mais je ne pouvais lui donner satisfaction.
– Je ne peux rien dire dis-je brusquement en me levant. Oubliez tout ça c’est mieux pour vous.
Il comprit mon angoisse car il n’insista pas. Cependant il me glissa discrètement un papier dans la main que je rangea rapidement dans ma poche.
A ce moment Nathan m’appela pour me dire de le rejoindre devant chez moi. A contrecœur, j’acceptai. Après tout, revoir un ami me ferait penser à autre chose.
Je marchais en regardant autour de moi. Pas de voiture ou d’individu suspect. Je détestais ça. Bien sûr il ne me feraient aucun mal. Même si je pouvais en soulever un d’une seule main, je ne pensais pas pouvoir résister longtemps aux armes. Pour une balle je l’avais fait. Mais contre cinq ou dix, pouvais-je vraiment résister ?
Une fois arrivé à mon appartement j’eus la surprise de voir non pas Nathan, mais Laetitia. Je m’approcha d’elle en connaissant la raison de sa présence. Ou du moins j’espérais me tromper.
– Qui était cet homme ? demanda-t’elle. Je devins rouge écarlate. Je ne pouvais cacher mon stress. Un de mes hommes t’as vu en sa compagnie. Ça ne semblait pas être quelqu’un que tu connaissais.
– Personne répondis-je. Juste quelqu’un venu me demander de l’argent.
– Il a du beaucoup insisté. Non sérieusement dis-moi Tom.
C’est à ce moment que Nathan arriva. Il nous regarda puis je le regardai. Un moment plutôt gênant puisque personne ne parlait. C’est alors Nathan qui intervint.
– Qu’est ce que vous voulez encore ? Dit-il en s’avançant de manière menaçante.
– Tom cache quelque chose répondit-elle.
Sa manière de parler m’agaça soudain.
– Ça te suffit pas de me tracer ? demandai-je. Tu le sais très bien tu dois sûrement avoir mis mon téléphone sur écoute comme celui de Nathan.
– Et bien oui je t’ai tracé c’est vrai. Mais si tu veux tout savoir non je ne vous ai pas mis sur écoute. Et j’aurais largement pu le faire.
Ça je ne m’y étais pas attendu. Je me tut.
– J’ai bien vu que vous n’étiez pas des rebelles. Alors j’ai pris quelques libertés.
Je savais depuis l’autre soir chez moi, qu’elle n’était pas si méprisante et mauvaise. Bien sûr on s’était renseigné sur mes proches et ça je ne l’appréciais pas. Elle avait beau avoir laissé de côté certaines méthodes d’espionnage, cela restait une entrave à la vie privée.
Mais malgré ça, elle semblait avoir transgressé certaines règles. Alors pour rétablir la balance, lui donner l’identité de l’individu serait correct. Sauf que je ne l’avais pas. Ce gars devait avoir prévu le coup.
– C’était un cousin du second degré. On s’est donné rendez-vous. Ça faisait trois ans qu’on ne s’était pas vus. La crédibilité du mensonge était faible.
– Tom tu m’as déjà fait le coup avec ton oncle. Elle le disait calmement mais je la sentais tendue.
– Il n’a rien à te dire dit Nathan. Laisse nous vivre nos vies tranquilles. On vous pose pas de problème.
Laetitia se rapprocha alors de Nathan. Bien que plus petite, elle ne se laissa pas impressionner.
– J’ai déjà dit que tout cela ne me plaisait pas et je n’ai pas envie de me répéter. Un homme a discuter avec Tom et il ne fait pas partie de son entourage. Alors je suis en droit de me demander qui c’est. Et si tu me parle de respect de la vie privée, je te dirai qu’elle a disparue depuis que vous n’êtes plus…vous-même.
Elle se tourna vers moi pour exiger une réponse. Je pouvais dire qu’il s’agissait d’un prof mais ça ne tiendrait pas. Si comme elle le disait, mon entourage avait été passé au crible, cela réduisant le champ des possible en terme de mensonge.
Un homme s’approcha alors. Laetitia lui fit signe que tout allait bien puis il recula.
– Salut Jean-Michel clama alors Nathan. C’est le type qui me surveillait chez moi ! Me dit-il en voyant ma surprise. Il ne m’a pas révélé son nom alors je lui en ai donné un.
Je commençais à courir. Je savais pertinemment que ça ne résoudrait rien mais je ne voulais pas leur donner l’info. A peine avais-je parcouru une vingtaine de mètres qu’un autre garde du corps se mit sur mon chemin. Il dégaina alors son arme. Mais avant qu’il puisse s’en servir je l’attrapa à la gorge et le projeta si violemment qu’il tomba sur le dos. A ce moment je me rendis compte du mal que je venais de faire et je m’immobilisa. Certes, il faisait partie d’une organisation qui me rendait la vie plutôt insupportable. Mais j’étais certain qu’il n’allait pas tirer, qu’il l’aurait dégainé pour me faire peur. Et puis je n’aimais guère être violent. Cela me rappelait mon agression. J’avais bien ressenti une haine et la façon de me défendre avait bien montré une limite ayant franchi la simple légitime défense. Mais je ne voulais plus recommencer.
Laetitia arriva à cet instant en sortant de sa poche un…taser. Avant que je ne me pose d’autre questions, Nathan arriva juste derrière elle en lui arrachant l’arme des mains. Il la plaqua ensuite contre une voiture. Laetitia se débattait mais ses efforts restaient vains.
Je restais immobile et commença à trembler. Bon sang cette situation n’était pas au programme. El les attaquant de cette manière nous venions de nous mettre en fâcheuse posture.
– Pardon dis-je alors. Nathan relâche-là !
J’ai bien cru qu’il allait me répondre négativement mais après un instant d’hésitation, il relâcha son étreinte. De mon côté, j’aidais le type à se relever. Heureusement rien ne semblait cassé, même s’il se tenait douloureusement le dos.
– Je ne voulais pas dis-je en m’adressant à lui et Laetitia. J’en ai juste marre d’être observé sans cesse.
– Je comprends bien dis alors le fameux Jean-Michel. Mais on fait notre boulot.
– Désolé dit alors Nathan à Laetitia. Même si je ne t’apprécie pas je n’aurais pas du lever la main sur toi sans raison. J’étais surpris de sa réaction mais aussi impressionné. Vu la façon dont il la détestait, je considérais cela comme un progrès de sa part.
– On va faire l’impasse là-dessus dit-elle. Vous vous êtes emportés avec la pression. Vous réagissez mal au stress intense.
– Comment ça ? Demandai-je. Elle était médecin aussi ?
– Disons juste que c’est la dernière fois dit-elle d’un ton sévère. Si un cas comme celui-ci devait se reproduire, on vous emmène au quartier général. Et je vous garantis que ce sera moins fun.
Ouais je m’en doutais bien. Revoir le prétendu chef ne me ferait pas plaisir.
– Au point ou on en est vous voudriez pas une bière ? Demanda alors Nathan.
Je le regarda subjugué. Je m’attendais à tout sauf à ça. Laetitia et Jean-Michel firent de même.
– Croyez-moi je me surprend moi-même. Mais avec le stress quotidien et toute cette histoire de super-pouvoir, d’espionnage, ça dépasse l’entendement. Et puis si on est censé se croiser pendant encore longtemps autant s’amuser quand on le peut. Et franchement j’ai pas envie de passer tout mon temps à vous haïr. Comme tu le dis Jean-Michel, vous faites votre taff. Un taff qui nous emmerde, mais ça reste votre taff.
– D’accord accepta alors Laetitia après quelques secondes d’hésitation. Mais juste une.
– Ca me va dit Jean-Michel. Mais ça restera spécial. On est vos surveillants pas vos amis.
On se dirigea vers le bar le plus proche pour commander à boire. Mais en chemin un portable vibra. Rien d’alarmant jusqu’à ce que Laetitia pousse un cri de stupeur après l’avoir visionné. Elle se tourna alors vers nous.
– Qu’est ce qui se passe demandai-je.
– Il se passe que vous avez un nouveau copain.
Je compris alors mais je regardais la vidéo et vis un type en plein forêt. Jusque là rien d’anormal jusqu’à ce qu’il se mette à entourer un arbre de ses bras. La qualité de la vidéo était parfaite cette fois rien à voir avec le téléphone préhistorique avec lequel on m’avait pris en flagrant délit. Cette fois-ci on distinguait clairement le visage de l’individu. Son pote filmait et le petit blond commença alors à pousser sur ses jambes avec espoir de faire sortir l’arbre de terre. Et bien sûr il réussit non sans mal.
– Regardez disait alors le mec sur la vidéo. Ça c’est mon pote ! Ils s’exclamèrent tous les deux et le plus costaud allongea l’arbre sur l’herbe.
Ça devait arriver. Il était même étonnant que personne n’ai eu cette réaction suite à la découverte de ces capacités hors normes. Mais peut-être que ceux transformés étaient comme moi à vouloir rester discrets. Ou bien ils ne le savaient tout simplement pas. Si l’on n’était pas pris dans une bagarre et que l’on n’essayait pas d’arracher des arbres, il était fort probable que l’on ne sache jamais ce que l’on a de plus que les autres.

Maintenant, soit l’agence allait de nouveau devoir faire taire des gens, soit le phénomène risquait de prendre une ampleur considérable.

 

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